TROISIEME
DIMANCHE
DE
CARÊME 2019
(Lc 13, 1-9)
Cette
semaine, nous passons du chapitre 3 au chapitre 13 de St Luc, sans
doute pour adapter les textes à ce temps de Carême et nous
permettre
d'entendre et de prendre très au sérieux l'appel à la conversion.
N'est-ce pas un des éléments essentiels de ce temps fort de notre
Liturgie ? Se laisser convertir un peu plus à l'Amour qui est
Dieu même ! Cet appel à la conversion n'a pas d'autre objectif
que de se laisser purifier pour aimer un peu à la manière du Père !
Un peu ! en effet, qui prétendrait qu'il aime vraiment ?
Aimer est une exigence de tous les instants qui réclame l'oubli de
soi pour permettre à l'autre de devenir ce que Dieu espère de lui à
partir de ce que , Dieu, lui a offert en matériaux de base !
« Car
tout vient de Lui et tout retourne en Lui ! » « La
Parole qui sort de ma bouche ne me revient pas sans résultat, sans
avoir fait ce que je voulais et réussi sa mission » (Is 55,11)
Un
jour, des gens rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens que
Pilate avait fait massacrer,mêlant
leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient.Jésus
leur répondit :« Pensez-vous
que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les
autres Galiléens,pour avoir subi un tel sort ?
Avec
la péricope de ce jour nous semblons être en présence de la
gazette du coin qui rapporte les événements des environs sauf
qu'ici, ces événements sont présentés à Jésus Lui-même . Et
nous sommes en droit de nous interroger sur la motivation des
interlocuteurs de Jésus. Nous y reviendrons.
Dans
le chapitre qui précède, Jésus
met Ses disciples en garde
contre la persécution dont ils seront l'objet et Luc
rapporte un reproche de Jésus à la foule qui ne sait pas discerner
le caractère messianique de ce qui se passe sous ses yeux. Ils
savent prévoir sans erreur le temps qu'il fera, mais ne voient pas
le temps présent.

Puis
Jésus poursuit par un appel à la réconciliation :
chacun
des auditeurs devait se réconcilier avec Dieu pour échapper à
l'accusateur, sous peine d'une condamnation.
“Lorsque tu vas avec ton adversaire devant le magistrat, tâche en
chemin de te dégager de lui, de peur qu'il ne te traîne devant le
juge, que le juge ne te livre à l'officier de justice, et que
celui-ci ne te mette en prison. Je te le dis, tu ne sortiras pas de
là que tu n'aies payé jusqu'à la dernière obole.” Lc. 12:58-59
Il
a donc été envisagé que ces “quelques personnes” qui
s'adressent maintenant à Jésus : pensent voir dans un « fait
divers » récent, un de ces signes précurseurs dont Jésus
vient de parler, ils veulent démontrer que eux, sont capables de
discerner les signes des temps, que les victimes d'un massacre
devaient faire partie des “hypocrites” dénoncés à l'instant
par Jésus. Si tel est le cas, ces hommes n'avaient pas compris que
les signes à reconnaître n'étaient pas les catastrophes, mais
la prédication de Jean-Baptiste et les faits surnaturels qui
accompagnaient Jésus depuis le début de son ministère.
Deux
autres signes manquaient avant le déclenchement des jugements :
celui de la crucifixion et celui de la résurrection de Jésus. Il a
été supposé que ces “quelques personnes” étaient venues, non
pour écouter les enseignements de Jésus, mais pour lui tendre un
piège en
lui faisant prononcer des paroles contre Rome, ce qui aurait permis
de l'accuser de sédition devant Pilate ou devant Hérode. En
précisant que les victimes étaient de Galilée, comme Jésus, ces
personnes auraient cherché peut-être, à entraîner Jésus dans un
discours émotionnel contre l'occupant. La réponse de Jésus
suggère un autre motif à l'intervention de ces hommes. Il est donc
plus simple et cohérent de supposer que ceux qui viennent rapporter
ce fait tragique le font sous le coup d'une violente émotion à
cause de son caractère de profanation tragique d'un rituel, comme si
des païens (ici des Romains) avaient accompli un sacrifice humain
dans l'enceinte même du temple. Ces personnes viennent peut-être
tout juste d'arriver, et n'ont même pas entendu les enseignements
précédents de Jésus. Mais ce dernier va utiliser leur récit pour
en tirer un enseignement auquel ils ne s'attendaient pas.
L'histoire
ne rapporte pas plus le récit de ce massacre ordonné par Pilate,
qu'elle ne rapporte le récit du meurtre des nourrissons de Bethléem
par Hérode. De telles violences touchant des gens ordinaires
n'étaient pas rares dans l'empire. Les
Israélites, comme beaucoup de religieux, pensaient que les
infirmités et les malheurs de l'existence étaient la conséquence
de fautes visibles ou cachées, commises par les victimes ou par
leurs ancêtres.
La gravité du malheur était considérée comme proportionnelle à
la gravité de la faute. Rappelons-nous la question des disciples à
propos de l'aveugle
“Jésus
vit, en passant, un homme aveugle de naissance. Ses disciples lui
firent cette question: Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses
parents, pour qu'il soit né aveugle ?” Jn. 9:1-2
Ici
la tragédie sanglante est d’autant plus frappante que
du sang animal s'est trouvé mélangé à du sang humain
lors d'un rituel de sacrifice dans l'enceinte du temple, près de
l'autel. Le sang étant le véhicule de l'âme, du souffle de vie,
l'image confuse mais insupportable d'un mélange des souffles
s'invitait dans les pensées. Ne fallait-il pas, selon la Loi de
Moïse, éviter de manger de la viande animale encore porteuse de son
sang ? Ici, près de l'autel, le contact des deux sangs était
immédiat !
Il est possible que les soldats romains soient intervenus pour
capturer des meneurs religieux nationalistes, et que ces derniers
aient opposé une vaine résistance.
“… ce qui était arrivé à des Galiléens dont Pilate avait mêlé
le sang avec celui de leurs sacrifices” Lc. 13:1b
Si
tel est le cas, ce massacre est une préfiguration de ce qui va
advenir en l'an 70 lors de la chute de Jérusalem et du temple où se
seront réfugiés les derniers défenseurs.
Ponce
Pilate est né à Lyon en l'an - 10. Il fut nommé par Tibère
procurateur de Judée (de 26 à 36). Il fut renvoyé à Rome et
mourut vers 39 après. J.-C. exilé par Caligula à Vienne (Gaule) ou
à Lucerne (Suisse). Selon Flavius Joseph, les relations de Pilate
avec les Juifs ont été houleuses dès le début de son mandat.
Comme d'autres occupants, il n'a parfois pas hésité à faire couler
le sang juif. “croyez-vous
que ces Galiléens fussent de plus grands pécheurs que tous les
autres Galiléens …”

La
chute de la tour de Siloé, autre fait divers n'a rien de surprenant
, elle s'inscrit dans ces catastrophes d'hier et d'aujourd'hui qui
nous déstabilisent, nous font beaucoup parler et écrire, mais
auxquelles nous ne pouvons rien changer ! Ces événements , la
plupart du temps brutaux. Qui pouvait envisager le dernier incendie
dans le Var ce 18 mars ? Qui pouvait prévoir les inondations de
ces derniers jours au Mozambique ? Nous sommes là devant la
difficile question de la souffrance : pourquoi ? Nous
n'avons d'autre éclairage que celui donné dans le si beau livre de
Job dans l’Écriture Sainte, et celui de savoir jusqu'où notre
Sauveur est allé, Lui, dans la souffrance pour nous obtenir le
Salut !
Dans
le Livre de Job Dieu demande à ce dernier de reconnaître que la
maîtrise des événements lui échappe puis il l'invite à garder
intacte sa confiance en son Créateur .Ce à quoi Job répond par ces
merveilleux versets pleins de foi, d'abandon :Job
répondit au Seigneur et dit: Je
sais que tu peux tout, et que pour toi aucun dessein n'est trop
difficile.
«Quel est celui qui obscurcit le plan divin, sans savoir?» Oui,
j'ai parlé sans intelligence de merveilles qui me dépassent et que
j'ignore. «Écoute - moi, je vais parler; je t'interrogerai,
réponds-moi.» Mon oreille avait entendu parler de toi;
mais maintenant mon œil t'a vu.
C'est pourquoi je me condamne et me repens, sur la poussière et sur
la cendre. (Job 42)
Jésus
affirme ici qu'il n'y a aucun lien entre la souffrance et le péché,
n'en est-il pas le témoin absolu ? Lui Jésus, qui n'a pas
connu le péché, se livre par amour pour nous offrir la Vie
éternelle ! Ce qui est central dans cette péricope c'est
l'appel à la conversion :Mais
si vous ne vous convertissez pas,vous périrez tous de même. »
Ne
perdons pas notre temps dans l'accessoire mais entendons cet appel
de Jésus à nous laisser convertir à l'Amour qui est Dieu. Se
laisser convertir c'est se laisser enseigner par la Parole de Jésus,
la laisser descendre en nous , nous interroger sur notre manière de
l'accueillir et de la vivre dans nos relations :
Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas, et vous
ne serez pas condamnés. Pardonnez, et vous serez pardonnés. (Luc
6)
Vous
avez reçu gratuitement : donnez gratuitement. (Matthieu 10)
Aimez
vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent. Souhaitez
du bien à ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous
calomnient. (Luc 6)
Soyez
miséricordieux comme votre Père est miséricordieux. (Luc 6) …
Nous
n'aurons jamais fini de nous ajuster à cette Parole parce qu'elle
est vivante et que nous découvrons sans cesse de nouvelles facettes
qui nous invitent à aimer
comme Dieu aime Elle
est vivante, la parole de Dieu, énergique et plus coupante qu'une
épée à deux tranchants ; elle pénètre au plus profond de l'âme,
jusqu'aux jointures et jusqu'aux moelles ; elle juge des intentions
et des pensées du cœur.
Pas une créature n'échappe à ses yeux, tout est nu devant elle,
dominé par son regard ; nous aurons à lui rendre des comptes.
(Hébreux 4)
La
seconde partie de ce verset pourrait nous laisser croire que Jésus
est en pleine contradiction « vous
périrez tous de même. », il
ne s'agit pas ici de la mort physique mais de la mort spirituelle et
donc éternelle. La privation totale et définitive de la vision d'un
Père aussi bon que l'est Notre Père des cieux ! Vous périrez
si délibérément vous refusez de vous ajuster à la Parole de Vie
qu'est Mon Évangile, cette Bonne Nouvelle pour tous les hommes et
tous les temps ! Mais Dieu est Père, nous ne le dirons jamais
assez, Il est infiniment patient c'est tout l'enseignement de la
Parabole du figuier qui suit :
Jésus
disait encore cette parabole :« Quelqu’un avait un
figuier planté dans sa vigne.Il vint chercher du fruit sur ce
figuier,et n’en trouva pas. Il dit alors à son
vigneron :‘Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur
ce figuier,et je n’en trouve pas.Coupe-le. À quoi bon le laisser
épuiser le sol ?’Mais le vigneron lui répondit :‘Maître,
laisse-le encore cette année,le temps que je bêche autour pour y
mettre du fumier.Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir.Sinon,
tu le couperas.’ »
Il
vint chercher du fruit sur ce figuier,et n’en trouva pas Jésus
pense bien sûr aux fruits de l'Esprit « Le
fruit de l'Esprit, au contraire, c'est
la charité, la joie, la paix, la patience, la mansuétude, la bonté,
la fidélité, la douceur, la tempérance.
Contre de pareils fruits, il n'y a pas de loi.(Galates 5) »
Si
nous entrons dans la logique de la Parabole nous sommes ce vigneron
qui souhaite prendre les grands moyens et, pour ce faire décide de
couper tous les arbres, « nos frères » qui à notre
regard ne fructifient pas ! D'une part nous n'avons pas les
moyens d'en juger, nous ne voyons que l'apparence, l'écorce, Dieu,
Lui regarde le cœur «
L'homme regarde à l'apparence extérieure, mais Dieu regarde au
cœur. » 1 Samuel 16. 7
et d'autre part, il ne resterait personne car le juste lui-même
(le
saint) ne peut faire le bien sans pécher ! »Car
aucun homme n'est assez juste sur terre pour faire le bien sans
pécher » Qo6
Dieu,
est Miséricorde, « Dieu
ne veut pas la mort du pécheur mais qu'il se convertisse et qu'il
vive Ez 18 .
Au
fond, ici, Jésus nous demande de changer notre regard : Dieu
n'est pas ce père fouettard qui, martinet en mains, nous assène
quelques coups de lanières , Dieu
est essentiellement un Père et un Père miséricordieux qui
aime chacun de Ses enfants et leur laisse le temps de découvrir qui
Il est ! Certains, peut-être, feront cette découverte lors de
l'émerveillement de la Rencontre, qu'importe ! L'essentiel
n'est-il pas dans le fait d'adhérer, en toute liberté et de nous
jeter émerveillés dans les bras de ce Père « lent
à la colère » « Le Seigneur est tendresse et pitié,
lent à la colère et plein d’amour. (Ps 145, 8) »
celui
qui se croit solide,qu’il fasse attention à ne pas tomber.1 Cor 10
Je
vous rassemblerai de tous les pays,
et
je vous ramènerai sur votre terre.
Je
ferai sur vous une aspersion d'eaux pures et vous serez purs;
de
toutes vos souillures et de toutes vos abominations je vous
purifierai.
Et
je vous donnerai un cœur nouveau,
et
je mettrai au dedans de vous un esprit nouveau;
j'ôterai
de votre chair le cœur de pierre;
et
je vous donnerai un cœur de chair.
Ainsi,
par vous, je montrerai que je suis le Dieu Saint
(Ezéchiel
36)
Antienne
d'ouverture de la Liturgie de ce jour
L'Ermite
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire