vendredi 23 février 2018

ILS DESCENDIRENT DE LA MONTAGNE

DEUXIÈME DIMANCHE DE CARÊME

Année B


(Mc 9, 2-10)
 
L’Évangile de ce dimanche est d'une très grande intensité spirituelle, pour les apôtres, pour les disciples de Jésus que nous sommes, par grâce.

La « transfiguration », littéralement, « le changement de figure », révèle, pour un cours instant, le vrai visage de Jésus , le Fils de Dieu.
Lui, de condition divine ne retint pas jalousement le rang qui l'égalait à Dieu Phil 2, en effet Dieu s'est caché dans notre chair, Il s'est habillé de notre chair, au point de voiler Sa divinité «et reconnu pour homme par tout ce qui a paru de lui; (Philippiens 2) mais la Transfiguration permet, pour un cours instant de voir Son véritable visage, resplendissant d'un éclat inégalable, d'un éclat qui vient de l'Ailleurs qui participe à la Majesté même du Père, avec qui Il est UN.

Souvenons-nous de Moïse « Or, si le ministère de la mort, gravé en lettres sur des pierres, a été entouré de gloire au point que les fils d'Israël ne pouvaient fixer leurs regards sur la face de Moïse à cause de l'éclat de son visage, tout passager qu'il fût, combien plus le ministère de l'esprit ne sera-t-il pas entouré de gloire? (2Corinthiens 3) l'Ancien Testament
décrivait déjà le visage de Moïse , brillant d'un éclat surnaturel, soulignant ainsi l'origine divine de ses rendez-vous sur la montagne, et, par déduction, de la loi mosaïque «et les fils d'Israël voyaient rayonner son visage. Puis il remettait le voile sur son visage jusqu'à ce qu'il rentrât pour s'entretenir avec le Seigneur. »  (Exode 34) 

Les personnes de Moïse et d’Élie sont les deux personnages les plus importants de la Bible juive. Ils représentent respectivement la loi (la Torah) et les visionnaires (les prophètes). La transfiguration, en décrivant la conversation de ces deux personnes avec Jésus, montre comment Jésus assume ces deux traditions, l'Ancienne et la Nouvelle Alliance.

En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean,et les emmena, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. En tant que disciples du baptiste, Pierre et Jacques sont présents lors du baptême de Jésus et ils ont sans doute entendu la voix du Père «Or, il arriva en ces jours-là que Jésus vint de Nazareth de Galilée et se fit baptiser par Jean dans le Jourdain. Et, comme il remontait de l'eau, il vit les cieux entr'ouverts et l'Esprit qui descendait sur lui, comme une colombe. Et il y eut une voix des cieux : " Tu es mon Fils bien-aimé, en toi j'ai mis mes complaisances. (Marc 1)

Lorsque Le chef de la synagogue demande à Jésus d'intervenir pour sa fille gravement malade Jésus «  Il ne laissa personne l'accompagner, sinon Pierre, Jacques, et Jean son frère. Ils arrivent à la maison du chef de synagogue. Jésus voit l'agitation, et des gens qui pleurent et poussent de grands cris. (Marc 5)

Au Jardin des Oliviers c'est toujours Pierre, Jacques et cette fois, Jean le disciple bien-aimé « Il emmène avec lui Pierre, Jacques et Jean, et commence à ressentir frayeur et angoisse. Il leur dit : « Mon âme est triste à mourir. Demeurez ici et veillez. » S'écartant un peu, il tombait à terre et priait pour que, s'il était possible, cette heure s'éloigne de lui. Il disait : « Abba ... Père, tout est possible pour toi. Éloigne de moi cette coupe. Cependant, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux (Marc 14)

Au Baptême au moins deux d'entre eux entendent la voix du Père, les trois sont témoins de la résurrection de la fille de Jaïre, nous les retrouvons ici à la Transfiguration ce n'est pas innocent ! En effet, c'est encore eux qui seront invités à se faire proche de Jésus au Jardin des Oliviers. Comment tenir devant une telle souffrance et semblable débâcle, s'il n'y a pas eu, auparavant , un avant - goût du mystère. Nous savons que malgré tout cela il y aura des ratés, Pierre renie, Jacques et les autres fuient, Judas trahit, seul Jean reste debout au pied de la Croix avec Marie, la Mère de Jésus ! Nous pouvons penser qu'après la mort de Jésus, enfermés dans le cénacle, tout ces événements font surface , qu'au bout du tunnel de la Passion commence à sourdre la lumière qui sera couronnée par l'appel à la visite au tombeau vide et les différentes apparitions de Jésus après la Résurrection !

Pierre, quant à lui, ne peut pas, ne pas se souvenir des Paroles qui lui furent adressées par Jésus : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église » !! et « Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous passer au crible comme le froment. Mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne sombre pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères. » Pierre lui dit : « Seigneur, avec toi, je suis prêt à aller en prison et à la mort. » Jésus reprit : « Je te le déclare, Pierre : le coq ne chantera pas aujourd'hui avant que, par trois fois, tu aies affirmé que tu ne me connais pas. » (Luc 22)

Que ce soit pour les apôtres ou dans nos vies personnelles, tout a du sens, absolument tout , le Seigneur conduit tout, et, si nous savons regarder, si nous relisons nos vies à la lumière de l’Écriture Sainte, nous sommes forcés d'admettre qu'hier préparait notre aujourd'hui, alors nous rendrons grâce et pourrons adorer en vérité !

Et il fut transfiguré devant eux. Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille.
Pendant qu'il priait, l'aspect de son visage devint autre, et son vêtement d'un blanc éblouissant. (Luc 9)
Et il se transfigura devant eux: son visage resplendit comme le soleil, et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière. (Matthieu 17)

Marc nous dit que Jésus fut transfiguré, Luc que son visage devint autre, et Matthieu son visage resplendit comme le soleil, Luc précise qu'à ce moment-là Jésus priait. Que pouvons-nous comprendre et retenir ? Que la prière , la vraie, cette prière qui plonge l'être dans le cœur du Père, est transformante et que toute proportion gardée quand nous prions vraiment, Le Père nous transforme à l'intérieur et à l'extérieur. Nous n'en avons pas nécessairement conscience, mais cela EST ! Là où Dieu est PRÉSENT , cela se voit, les incroyants, ou les mal-croyants ne le nient pas, bien au contraire.

Si le Visage de Jésus resplendit comme le soleil, Il est d'une luminosité telle que c'est difficilement soutenable, certaines icônes représentent les apôtres complètement retournés, tellement la surprise est grande et le rayonnement brûlant !

Quand brûlerons-nous comme Jésus ? Quand nos frères seront-ils renversés en essayant de nous regarder !
 
Il n'y pas que le visage de Jésus qui change mais Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille. Marc "son vêtement d'un blanc éblouissant". (Luc 9) "ses vêtements devinrent blancs comme la lumière". (Matthieu 17)

Selon les spécialistes le blanc n'existe pas , la lumière est en effet ce qui le définit le mieux. Le blanc de blanc, comme dit la publicité, brûle les yeux, trop de lumière oblige à prendre les moyens d'atténuer cette luminosité . Les Prophètes, notamment Daniel, voient la divinité revêtue d'un manteau blanc et d'une barbe blanche ou comparée à de la laine pure ( Daniel 7 et 10) 
 
Dans la symbolique des couleurs le blanc est symbole de pureté, d'innocence. Au début du christianisme, le baptême était un rite initiatique et se nommait « l'Illumination ». Après avoir prononcé « ses promesses», le nouveau chrétien naissait à sa véritable vie . Il revêtait, selon le Pseudo-Denys, des habits d'une éclatante blancheur. Dans cette « trans-figuration » de Jésus, nous sommes invités à voir tout cela et, surtout la manifestation de Sa divinité. Si les trois apôtres choisis bénéficient de cette grâce insigne n'est-ce pas pour leur permettre de garder la foi au moment de l'abaissement « Il s'est abaissé lui-même, se faisant obéissant jusqu'à la mort, et à la mort de la croix. C'est pourquoi aussi Dieu l'a souverainement élevé, et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et dans les enfers, et que toute langue confesse, à la gloire de Dieu le Père, que Jésus-Christ est Seigneur» (Philippiens 2)
 
N'est-ce pas pour soutenir notre marche que le Seigneur, nous fait don de moments privilégiés ( retraite, intensité dans la prière,immanence parfois, signes évocateurs...) qui nous permettent de tenir dans l'épreuve et de porter notre regard plus loin ? 
 
Élie leur apparut avec Moïse,et tous deux s’entretenaient avec Jésus. ( Nous avons évoqué le sens de cette présence plus haut) Pierre alors prend la parole et dit à Jésus :« Rabbi, il est bon que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes :une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. »De fait, Pierre ne savait que dire,tant leur frayeur était grande. La réaction de Pierre n'a rien de surprenant ! Les apôtres vivent une grâce d'exception, d'une intensité à nulle autre pareille, on peut imaginer qu'ils éprouvent une immense paix, la grâce des grâces ! Ils sont inondés par la lumière qui émane de Jésus, ils sont associés à Son intimité, ils perçoivent Sa Gloire comment auraient-ils envie de redescendre pour affronter la banalité et parfois la cruauté du quotidien et entendre les sarcasmes des ennemis de leur Maître ? Le désir de Pierre est légitime et parfaitement altruiste puisqu'il parle de dresser une tente pour Jésus, pour Moïse et Élie, dans son élan, il en vient à s'oublier et à oublier ses frères ! La paix et la joie le (les) comblent, ils resteraient bien là pour l'éternité si une nuée les couvrit de son ombre,et de la nuée une voix se fit entendre :« Celui-ci est mon Fils bien-aimé :écoutez-le ! »

La nuée céleste qui les enveloppe est le signe de la présence divine « La nuée couvrit la tente de la Rencontre, et la gloire du Seigneur emplit la Demeure. Moïse ne pouvait pénétrer dans la tente de la Rencontre, à cause de la nuée qui reposait sur elle et de la gloire du Seigneur qui remplissait la Demeure. A chaque étape, lorsque la nuée s'élevait et quittait la Demeure, les fils d'Israël se mettaient en marche. Si la nuée ne s'élevait pas, ils restaient sur place jusqu'au jour où elle s'élevait. » (Exode 40) 

 La voix céleste affirme la divinité du Fils pour enjoindre les disciples à l’écouter. Selon le texte évangélique. Écouter Jésus, c’est-à-dire, lui obéir avec intelligence, c’est donc obéir à la Sagesse éternelle, dont la Loi et les Visionnaires bibliques furent des expressions partielles. La religion juive trouve ici son accomplissement et son dépassement dans la religion chrétienne, laquelle contient la religion juive et la transcende. Dans la Bible, Moïse et Élie avaient eu la révélation de leur message sur une montagne : « Lorsque le Seigneur eut achevé de parler à Moïse sur la montagne de Sinaï, il lui donna les deux tables du témoignage, tables de pierre, écrites du doigt de Dieu. (Exode 31) et Élie se leva, mangea et but, et, avec la force que lui donna cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits jusqu'à la montagne de Dieu, à Horeb. (1Rois (CP) 19) 
la transfiguration donne un visage à cette révélation. Ce que ces deux personnes avaient entre-aperçu sur leur montagne était la Raison divine faite homme, Jésus. Les apôtres vont devoir, maintenant, se rendre à l'évidence : ils viennent de recevoir une grâce incomparable, chargée de force et d'intelligence de la foi . Cette grâce exceptionnelle est comme un fortifiant qui devrait leur permettre d'affronter, le moment venu, la dure réalité du rejet de leur Maître, ils doivent à présent revenir à la réalité du quotidien. Ce qui vient de se passer est un avant-goût de ce qu'ils vivront et que tout chrétien est appelé à vivre durant l'éternité. Pour le moment il convient de continuer le combat contre les passions qui agitent l'être intérieur mais aussi celles du monde environnant, la route est encore longue, ils ne doivent pas céder à la « gourmandise spirituelle : « dressons ici trois tentes... » le monde les attend , tout en continuant à se former à l’École de Jésus, il leur revient d'annoncer la Bonne Nouvelle de l'Amour infini de Dieu aussi : Soudain, regardant tout autour,ils ne virent plus que Jésus seul avec eux.Ils descendirent de la montagne,et Jésus leur ordonna de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu,avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts.Et ils restèrent fermement attachés à cette parole,

Comblés , débordants d’allégresse, ils osent ouvrir les yeux, et, stupéfaction : ils ne virent plus que Jésus seul ! L’Évangile ne dit rien de ce douloureux moment où il est impératif de revenir à la banalité du quotidien , nous savons simplement qu'Ils descendirent de la montagne, Sans doute ne réalisent-ils pas encore le privilège dont ils ont été gratifiés et qui engage l'a-venir, ils apprennent seulement qu'il ne doivent raconter à personne ce qu’ils avaient vu,avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts.Et ils restèrent fermement attachés à cette parole, Et c'est Jésus qui leur en donne l'ordre en des termes qui malgré tout les dépasse. La Passion-Résurrection le prouvera ce n'est qu'avec la venue de l'Esprit Saint que tous ces événements trouveront leur accomplissement et que leurs yeux s'ouvriront vraiment. « Alors, le disciple que Jésus aimait dit à Pierre: "C'est le Seigneur!" Simon-Pierre, ayant entendu que c'était le Seigneur, mit son vêtement et sa ceinture, car il était nu, et se jeta dans la mer. » (Jean 21)

Jésus s'approcha, et prenant le pain, il leur en donna; il fit de même du poisson. C'était déjà la troisième fois que Jésus apparaissait à ses disciples, depuis qu'il avait ressuscité des morts.Lorsqu'ils eurent mangé, Jésus dit à Simon-Pierre: " Simon, fils de Jean, m'aimes-tu plus que ceux-ci?" Il lui répondit: "Oui, Seigneur, vous savez que je vous aime." Jésus lui dit: "Pais mes agneaux." Il lui dit une seconde fois: "Simon, fils de Jean, m'aimes-tu?" Pierre lui répondit: " Oui, Seigneur, vous savez bien que je vous aime." Jésus lui dit: "Pais mes agneaux." Il lui dit pour la troisième fois: "M'aimes-tu?" et il lui répondit: "Seigneur, vous connaissez toutes choses, vous savez bien que je vous aime." Jésus lui dit: "Pais mes brebis." (Jean 21)



Simon avait bien besoin d'être conforté dans Sa Mission de Pasteur universel, de colonne de l’Église naissante, devant ses frères, Jésus, le Miséricordieux le sait, et le confirme dans l'appel initial « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église … Pais mes agneaux, paix mes brebis ! » 
 
Je marcherai en présence du Seigneur
sur la terre des vivants
. (114, 9)

Je crois, et je parlerai,
moi qui ai beaucoup souffert. 
Il en coûte au Seigneur
de voir mourir les siens !

Ne suis-je pas, Seigneur, ton serviteur,
moi, dont tu brisas les chaînes ?
Je t’offrirai le sacrifice d’action de grâce,
j’invoquerai le nom du Seigneur.

Je tiendrai mes promesses au Seigneur,
oui, devant tout son peuple,
à l’entrée de la maison du Seigneur,
au milieu de Jérusalem !
L'Ermite

vendredi 16 février 2018

QUI SONT MES BÊTES SAUVAGES ?

PREMIER DIMANCHE DE CARÊME
 ANNÉE B
(Mc 1, 12-15)

PETIT RAPPEL POUR LES OUBLIEUX :

Le nom carême vient de la contraction du mot latin quadragesima, qui signifie « quarantième ». La durée de quarante jours commémore à la fois :
    • les quarante jours et quarante nuits du jeûne de Moïse avant la remise des Tables de la Loi
    • et les quarante jours de la tentation du Christ dans le désert entre son baptême et le début de sa vie publique
La pratique du carême remonte au IV e siècle Les jours qui ont précédé la Pâque et la mort de Jésus, ni Jésus ni ses disciples n'ont jeûné. Les récits des Évangiles indiquent qu’à Béthanie, seulement quelques jours avant sa mort, ses disciples et lui se sont rendus chez des gens, où ils ont pris des repas. Jésus a en outre mangé le repas de la Pâque la nuit précédant sa mort. — Matthieu 26:6, 7 ; Luc 22:15 ; Jean 12:2. C'est durant le Concile de Laodicée (348? - 381?) que fut prescrit l'usage exclusif du pain et des fruits secs pendant le temps qui correspondait au carême.

Au VIIe siècle, le carême fut établi dans son calendrier actuel. À cette époque, le jeûne consistait à ne prendre qu'un repas quotidien en fin de journée et à s'abstenir de toute nourriture les jours du Vendredi et du Samedi saints.

Aujourd'hui l 'Église demande aux fidèles de jeûner au minimum les jours du mercredi des Cendres et du Vendredi saint. Mais la pratique réelle du jeûne est difficile à mesurer. En outre, la tradition de manger maigre — c'est-à-dire de s'abstenir de viande et de plat à base de graisse animale — le vendredi se perpétue. Le début du carême est le mercredi des Cendres.
Les trois grands axes du CARÊME :
  • intensification de la Prière,
  • de la Pénitence ( jeûne, abstinence, et ce que l'esprit nous inspire)
  • du Partage ( le jeûne, en particulier, est orienté au partage.)
ILLUSTRATION (ALETEIA)

Le carême, c’est le moment où l’on réfléchit sur soi-même, où on laisse entrer Dieu dans nos cœurs et où l’on s’ouvre aux autres. Une réflexion, et des actions. L’abbé Amar nous explique dans une vidéo que le carême est avant tout l’occasion de « faire un peu le tri dans nos vies, de revoir la place de certaines choses, de certains désirs, de liens qui peuvent (je dis bien qui peuvent) nous ligoter, et nous empêcher d’être vraiment libre ».

 Des privations, donc. Mais
des privations intelligentes. L’abbé Amar aborde le sujet hautement polémique du chocolat : « Ce n'est pas interdit de manger du Nutella pendant le carême, allez-y, prenez en, on s’en moque. La vraie question c’est : « est ce que je suis libre par rapport au Nutella ? » Et puis aussi la cigarette, la télé, ou plein d’autres choses encore ! Les réseaux sociaux, mon smartphone, ma tireuse à bière, ma machine à café… Faites l’essai ! Supprimez tout ça pendant 40 jours – j’ai même envie de dire 10 jours, ou même 3 jours. Vous verrez, c’est très instructif, et on apprend beaucoup de choses sur soi-même ».  

Il s’agit de mener une réflexion constructive, de se débarrasser du superflu. Objectif : laisser plus de place dans nos vies et dans nos cœurs pour l’amour de Dieu. Une stratégie imparable démontrée par le Père Amar : « comme j’accepte d’être moins centré à l’intérieur, sur moi, sur mes désirs, sur mes petits plaisirs, bien logiquement, je vais être plus attentif à l’extérieur. A Dieu d’abord, par la prière, la messe, les sacrements […] Et puis je me tourne vers les autres, vers ceux qui vivent tout autour de moi, peut-être même les plus pauvres et les plus délaissés que j’avais complètement oubliés. C’est pour ça qu’on dit que le carême est un temps de partage. » Les trois « P » du carême : Prière, Pénitence, Partage. (ALETEIA)

Jésus venait d’être baptisé. C'est en ces termes que s'ouvre l’Évangile de notre premier dimanche de Carême ! Plusieurs parmi nous attendaient certainement le récit détaillé de Jésus au désert tenté par trois fois par Satan. Nous verrons que Saint Marc donne une version très brève de cet événement mais pas moins dense d'ailleurs ! l’Évangéliste oriente notre attention sur la baptême de Jésus or, les deux lectures d'ouverture de la Liturgie de la Parole parlent :
  • la première d'Alliance
  • la seconde de notre baptême
Et, cette seconde lecture éclaire, donne le sens profond de l'alliance établie par Dieu avec l'humanité : quand Noé construisit l’arche,dans laquelle un petit nombre, en tout huit personnes,furent sauvées à travers l’eau. C’était une figure du baptême qui vous sauve maintenant :le baptême ne purifie pas de souillures extérieures, mais il est l’engagement envers Dieu d’une conscience droite et il sauve par la résurrection de Jésus Christ.

Jésus, Premier des baptisés, lui qui n'a pas besoin de purification, a épousé vraiment toute notre condition, sanctifié toutes les étapes et ouvert ainsi à l'humanité le chemin du Salut ! Ne nous dira-t-il pas à un moment, : « Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ; personne ne va vers le Père sans passer par moi. » (Jean 14) 

Jésus, non seulement, à travers l’Évangile nous montre la Route, mais Il est cette Route, ce Chemin « sans moi, vous ne pouvez rien faire » Jn 15,5 que nous sommes appelés à
suivre pour faire partie de Ses amis. Comme Jésus commence Sa Vie Publique par le Baptême de Jean le Baptiste, de même, la porte qui ouvre une vie nouvelle à l'humanité, est le sacrement du Baptême, signe indélébile de notre alliance avec Dieu Père, et Fils et Saint Esprit ! St Paul est clair : le baptême ne purifie pas de souillures extérieures, mais il est l’engagement envers Dieu d’une conscience droite et il sauve par la résurrection de Jésus Christ.

Si le baptême acte notre engagement, notre Alliance avec Dieu Trinité cela ne va pas de soi, il y a en effet quelqu'un qui n'apprécie nullement les amis du Dieu d'Amour, comment nous épargnerait-il, s'il a osé attaquer le Fils unique du Père. Il sait qui est Jésus, plusieurs fois, ne lui dira-t-il pas, par la bouche de « possédés » : « je sais qui tu es, tu es le saint, le Saint de Dieu » et Jésus ne manquera pas de lui imposer silence parce que Son heure n'est pas encore venue ! Comme Il le fait ici dans ce séjour au désert, St Marc dans cette version très brève souligne plusieurs points :

Aussitôt l’Esprit le pousse au désert et, dans le désert, il resta quarante jours,tenté par Satan. Il vivait parmi les bêtes sauvages,et les anges le servaient. l'événement désert a lieu immédiatement après le baptême
  • c'est l'Esprit qui pousse Jésus au désert
  • Jésus y reste quarante jours tenté par Satan
  • Jésus est confronté aux bêtes sauvages
  • heureusement, l’Évangéliste introduit une note de douceur : les anges Le servaient
Comment pouvons-nous appliquer ce verset à notre vie de chrétiens engagés par le Baptême à marcher dans les pas de Jésus ?
Il me semble que nous sommes invités à comprendre que si le baptême qui nous lie à la Très Sainte Trinité est « l'arme » par excellence pour faire face au maléfique , il n'exclut pas le combat spirituel . Jésus lui-même, sera constamment confronté au Mal et cela sur tous les fronts, tout au long de sa vie : les scribes, les Pharisiens, nous le rappelions dimanche dernier, dès sa naissance Il doit fuir devant Hérode, Ses apôtres qui ont parfois des difficultés à comprendre Ses paroles, Ses comportements et cela jusqu'aux derniers instants : l'un le trahit, l' autre le renie et Il se retrouvera quasi seul au moment de la crucifixion. 

Dès lors, l'ami de Jésus ne peut pas espérer vivre à la manière de Jésus, sans combat !Le Mal, sous différentes formes, est là , à notre porte ! Invitation à tricher, à mentir, à dérober, à détruire une réputation, provocations de toutes sortes, divisions dans les familles pour des broutilles en général, broutilles qui nous paraissent des montagnes, la société de consommation, le pouvoir, la quête de gloire, le profit... !
 
Si nous prenions le temps de regarder cela à la lumière de Jésus nous comprendrions que l'important est ailleurs ! « mieux vaut pour toi entrer dans la Vie boiteux ou manchot, que d'avoir deux pieds ou deux mains et d'être jeté dans le feu éternel. »Mt 18 
 
Mais nos perspectives sont courtes en général, et nous voyons l'immédiat de l'offense nous nous arrêtons à ce que nous pensons perdre remettant le vrai gain à plus tard bien plus tard ! Nous avons une fringale inouïe de jouissance immédiate ! Où nous mène-t-elle ? Demandons à Jésus la grâce de regarder haut et loin mais en vérité !

Les bêtes sauvages sont justement tout ce grouillement de passions diverses et variées, lancinantes ou violentes qui nous poussent à mal faire et à mal vivre ! Puissions-nous décider vraiment, sincèrement, de changer l'une de ces chaînes qui nous alourdit et nous empêche de remporter le trophée de l'Amour : « Vous savez bien que, dans les courses du stade, tous les coureurs prennent le départ, mais un seul gagne le prix. Alors, vous, courez de manière à l'emporter. Tous les athlètes à l'entraînement s'imposent une discipline sévère ; ils le font pour gagner une couronne de laurier qui va se faner, et nous, pour une couronne qui ne se fane pas. Moi, si je cours, ce n'est pas sans fixer le but ; si je fais de la lutte, ce n'est pas en frappant dans le vide. Mais je traite durement mon corps, et je le réduis en esclavage, pour ne pas être moi-même disqualifié après avoir annoncé aux autres la Bonne Nouvelle.  » (1Corinthiens 9) Comprenne qui pourra, dit ailleurs Jésus !

Ce séjour de Jésus au désert, n'est-il pas un appel pour chacun de nous à savoir nous retirer , à faire silence, pour entendre la voix du Seigneur en nos cœurs ? Oh elle sera parasitée par toutes sortes de sollicitations, plus alléchantes et trompeuses les unes que les autres, (les bêtes sauvages de notre évangile) l'essentiel sera de tenir ce que nous avons décidé, l'effet se manifestera au moment où nous nous y attendrons le moins ! Dieu tient compte de notre désir, de notre bonne volonté, Il n'attend pas des prouesses, Il désire notre détermination , la fermeté de nos choix. Pensons et croyons que nous ne sommes pas seuls
dans ce désert, Jésus marche devant nous, Il en a fait l'expérience avant nous, mettons nos pas dans les siens, Il nous prendra sur Ses épaules . Là nous L'entendrons nous dire parfois tout en douceur, d'autres fois avec pugnacité « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile. » L'orientation du combat réside en ces quelques mots : se laisser convertir à la lumière de l’Évangile, croire que c'est possible, reconnaître qu'il s'agit d'un chemin de LIBÉRATION . Nous délester de tout ce qui nous encombre en tout ou en partie, nous saurons alors d'expérience, que Les temps sont accomplis :le règne de Dieu est tout proche, Il (Jésus) grandit en nous !

« Vois ! Je mets aujourd’hui devant toi ou bien la vie et le bonheur, ou bien la mort et le malheur. Ce que je te commande aujourd’hui, c’est d’aimer le Seigneur ton Dieu,
de marcher dans ses chemins, de garder ses commandements, ses décrets et ses ordonnances.
Alors, tu vivras et te multiplieras ; le Seigneur ton Dieu te bénira dans le pays dont tu vas prendre possession.Mais si tu détournes ton cœur, si tu n’obéis pas, si tu te laisses entraîner à te prosterner devant d’autres dieux ( les convoitises de ce monde) et à les servir, je vous le déclare aujourd’hui : certainement vous périrez, vous ne vivrez pas de longs jours sur la terre dont vous allez prendre possession quand vous aurez passé le Jourdain. Je prends aujourd’hui à témoin contre vous le ciel et la terre : je mets devant toi la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction.Choisis donc la vie, pour que vous viviez, toi et ta descendance, en aimant le Seigneur ton Dieu, en écoutant sa voix, en vous attachant à lui ; c’est là que se trouve ta vie, une longue vie sur la terre que le Seigneur a juré de donner à tes pères, Abraham, Isaac et Jacob. » (Dt 30, 15-20)

Nous avions ce passage en première lecture jeudi, je le trouve particulièrement bien adapté à la liturgie de la Parole de ce premier dimanche de Carême. Prenons la Parole de Dieu au sérieux , la Parole de Dieu, c'est Jésus, dans l'Ancien Testament comme dans la Nouveau ! 
 
La Sagesse personnelle de Dieu, son Fils unique, est créatrice et réalisatrice de toutes choses. En effet, dit le Psaume :Tu as tout fait avec sagesse, la terre est pleine de tes créatures. Afin que les créatures non seulement existent, mais existent bien, Dieu a décidé que sa propre Sagesse descendrait vers les créatures (elle est descendue en et par Jésus) afin d'imprimer en toutes et en chacune, une certaine empreinte et représentation de son image (St Athanase d'Alexandrie.)


R/ Tes chemins, Seigneur,
sont amour et vérité
pour qui garde ton alliance.
(cf. 24, 10)

Seigneur, enseigne-moi tes voies,
fais-moi connaître ta route.
Dirige-moi par ta vérité, enseigne-moi,
car tu es le Dieu qui me sauve

Rappelle-toi, Seigneur, ta tendresse,
ton amour qui est de toujours.
Dans ton amour, ne m’oublie pas,
en raison de ta bonté, Seigneur.

Il est droit, il est bon, le Seigneur,
lui qui montre aux pécheurs le chemin.
Sa justice dirige les humbles,
il enseigne aux humbles son chemin.

l'Ermite

vendredi 9 février 2018

LEPREUX PAR AMOUR

SIXIÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

ANNÉE B

(Mc 1, 40-45)


La lèpre fut longtemps incurable et très mutilante, entraînant en 1909, à la demande de la Société de pathologie exotique, « l'exclusion systématique des lépreux » et leur regroupement dans des léproseries comme mesure essentielle de prophylaxie

La maladie est aujourd'hui traitable par antibiotiques ; des efforts de santé publique sont faits pour le traitement des malades, l'équipement en prothèses des sujets guéris, et la prévention.

Au temps de Jésus, et avant Lui, (et longtemps encore après) la situation du lépreux était particulièrement compliquée, c'est ce que rapporte le passage du Livre des Lévites que nous avons en première lecture :

« Quand un homme aura sur la peau une tumeur, une inflammation ou une pustule,
qui soit une tache de lèpre,on l’amènera au prêtre Aaron ou à l’un des prêtres ses fils.Le lépreux atteint d’une tache portera des vêtements déchirés et les cheveux en désordre, il se couvrira le haut du visage jusqu’aux lèvres, et il criera : “Impur ! Impur !”Tant qu’il gardera cette tache, il sera vraiment impur. C’est pourquoi il habitera à l’écart,son habitation sera hors du camp. »

 Dimanche dernier, en quittant Capharnaüm, Jésus décide « d'aller ailleurs, dans les villages voisins afin d'y proclamer l’Évangile, et Il précise, c'est pour cela que je suis sorti. »Et il parcourut toute la Galilée, proclamant l’Évangile dans leurs synagogues, et expulsant les démons. » C'est dans ce contexte, qu'un lépreux ose L'aborder . Compte tenu de la loi , n'est-il pas choquant, que ce lépreux se permette un tel écart et que Jésus , en bon Juif, ne fasse rien pour l'éloigner ?

En ce temps-là,un lépreux vint auprès de Jésus ; il le supplia et, tombant à ses genoux, Comment ce malade, rejeté par sa communauté, a-t-il réussi ce tour de force ? Il est surprenant qu'il ait trompé la vigilance de l'entourage de Jésus , quoiqu'il en soit, il est là, et, de plus, sans doute prosterné, puisqu'il tombe aux genoux de Jésus. Geste d'adoration qui en dit long , sans qu'il l'exprime, sur la considération qu'il porte à Jésus ! Devant semblable attitude nous ne pouvons pas douter de l'intensité de son attente et encore moins de la densité de sa confiance. Il fait partie de ceux qui ont entendu parler des actes de Jésus et il n'a pas hésité à déjouer « Sa protection rapprochée » pour L'approcher et exprimer sa requête.

Il lui dit :« Si tu le veux, tu peux me purifier. » Cet homme manifeste qu'il a une certaine conscience de la capacité de Jésus à soulager l'humanité , de ses maux et infirmités. Il croit vraiment que Jésus peut le purifier . La loi pourrait encourager Jésus à éloigner cet homme , il fait en effet parti des hors-la-loi, des exclus , interdits de séjour, relégués à la périphérie , au contraire, Jésus est touché par sa confiance et sans doute, son audace :
Saisi de compassion, Jésus étendit la main,le toucha et lui dit :« Je le veux, sois purifié. » Non seulement Jésus l'accueille, mais il va jusqu'à le toucher et , au geste, Jésus joint la parole et l'action de guérison : Je le veux, sois purifié . Jésus est un homme libre, rien ne peut arrêter Sa volonté de faire le bien ! Ce lépreux, participe, par anticipation, à la liberté de Jésus , les deux ont en effet franchi les limites imposées par la loi , les deux sont dans un autre registre : celui de la foi, celui de la confiance pour le lépreux, celui de l'amour inconditionnel pour Jésus qui ne fait pas de différences entre les humains! N'est-ce pas ce qui se passe dans les sacrements et plus particulièrement ceux du baptême et de la Réconciliation ? 
 
Je ne peux m'empêcher de penser à ce cultivateur qui a accepté une condamnation pour avoir accueilli un réfugié clandestin et pour rester fidèle à sa conception de l'hospitalité. Bien sûr, il faut raison garder, mais en tant que disciples de Jésus ne sommes-nous pas invités à repousser les limites du bienséant, du bien - pensant , de toutes sortes de conformismes ? 
 
Je pense aussi au Père Damien, l'apôtre des lépreux devenu missionnaire sur une île perdue du Pacifique, il a vécu avec les lépreux. Dans cet enfer de désespoir et de misère morale, il a réussi à façonner une communauté fraternelle . Il a été canonisé le 11 octobre 2009. 
 
Écoutons également la parole tonifiante du Pape François !
Le Pape n'en finit plus de surprendre. Il annonçait, le 30 septembre, sa décision de faire du G8, le groupe des huit cardinaux chargé de plancher sur la réforme de la curie romaine qui s'est réuni pour la première fois mardi 1er octobre, un conseil permanent. Le même jour, il donnait une interview dé-coiffante au quotidien italien La Repubblica, où il fustigeait le
cléricalisme et le « vaticano-centrisme » de la Curie. Il appelait aussi l’Église à « s'ouvrir à la modernité », estimant que le prosélytisme est « une bêtise magistrale », dans la mesure où l'essentiel est de « se connaître et de s’écouter, et de faire connaître le monde qui nous entoure ».

« Les dirigeants de l'Église ont souvent été des narcisses, flattés et excités de manière négative par leurs courtisans. La Cour est la lèpre de la papauté, a affirmé le Pape. Dans la Curie il y a des courtisans , mais la Curie dans son ensemble est autre chose qu'une cour. (…) Mais elle a un défaut : elle est centrée sur le Vatican. Elle observe et s'occupe des intérêts du Vatican, qui sont encore, pour une grande partie, des intérêts temporels. Ce point de vue « vaticano-centré » néglige le monde autour de nous. Je ne partage pas ce point de vue et je ferai tout pour le modifier. L’Église est ou doit redevenir une communauté du peuple et des prêtres, des pasteurs de Dieu, des évêques ayant le soin des âmes.

De son côté, Monseigneur Rouet écrivait voilà quelques années :Les anciens ignoraient l’origine de cette maladie ( la lèpre) et les traitements afférents. Notre temps est plus savant et mieux armé. Il n’empêche : voici cette femme que son mari a abandonnée quand il a appris qu’elle avait un cancer. Sans parler du Sida qualifié de « lèpre moderne », bien des maladies provoquent des peurs irrationnelles qui conduisent à l’isolement. on n’affuble plus les malades d’habits spéciaux pour lépreux, mais on les couvre de silence et de solitude.Il est encore des maladies qu’on tait. Sans parole, comment nourrir l’échange entre humains ? La technique qui soigne ne remplace pas la parole qui guérit en replaçant dans le dialogue social.

La « peau» de notre société est malade. Celle-ci rejette à l’extérieur de son corps ceux par qui elle craint sa dissolution : les étrangers bien sûr (les lépreux étaient interdits de voyager) et tous ceux qui ne lui sont pas directement utiles. Car notre société se construit autour du rendement rapide, de l’adaptation accélérée.

Quant à nous, acceptons-nous de prendre des risques, pour porter secours à ceux qui sont différents ? Acceptons-nous d'être montrés du doigt ? Parfois critiqués en prenant le parti du faible, du pauvre, du rejeté ? Un employé est mis au ban, nombreux sont ceux qui prennent le parti des apparemment plus forts ; une jeune femme, au nom de sa foi, mais aussi au nom de son humanisme, accepte de se démarquer, elle lui garde sa confiance, son respect, elle le soutient moralement et ne craint pas les représailles ! (Cette situation m'a été confiée cette semaine !) 
 
Qu'est ce que je fais pour les lépreux d'aujourd'hui ?
Dans notre évangile, Jésus touche le malade et À l’instant même, la lèpre le quitta et il fut purifié. Avec Jésus, Parole et geste sont porteurs de vie. Partout où passe Jésus, la vie jaillit ! Avec la vie naissent la joie, l'apaisement et, en même temps la responsabilité ! J'ai le devoir d'entretenir le cadeau de la vie : la santé est un bien précieux que je ne dois pas gaspiller . Est-ce que je sais rendre grâce pour ce don spécifique ? Est-ce que je prends les moyens de l'entretenir ou bien je le dilapide dans des excès de toutes sortes : alcool, drogue, abus de médicaments, veilles excessives !

Et quand le lépreux se trouve guéri, que lui dit Jésus ?
Avec fermeté, Jésus le renvoya aussitôt en lui disant :« Attention, ne dis rien à personne,mais va te montrer au prêtre,et donne pour ta purification ce que Moïse a prescrit dans la Loi :cela sera pour les gens un témoignage. » En bon Juif, et certainement pour détourner l'attention de Sa propre personne, Jésus applique ici ce qui est demandé dans la loi de Moïse :
" Voici quelle sera la loi concernant le lépreux, pour le jour de sa purification. On l'amènera au prêtre, et le prêtre, étant sorti du camp, l'examinera. Si le lépreux est guéri de la plaie de lèpre, le prêtre ordonnera que l'on prenne pour celui qui doit être purifié deux oiseaux vivants et purs, du bois de cèdre, du cramoisi et de l'hysope. Le prêtre fera égorger l'un des oiseaux au-dessus d'un vase de terre, sur de l'eau vive. Puis, ayant pris l'oiseau vivant, le bois de cèdre, le cramoisi et l'hysope, il les trempera, ainsi que l'oiseau vivant, dans le sang de l'oiseau égorgé sur l'eau vive. Il en aspergera sept fois celui qui doit être purifié de la lèpre, il le déclarera pur et lâchera dans les champs l'oiseau vivant. Celui qui se purifie lavera ses vêtements, rasera tout son poil et se baignera dans l'eau; et il sera pur. Ensuite il pourra entrer dans le camp, mais il restera sept jours hors de sa tente. … Le prêtre qui fait la purification présentera l'homme qui se purifie et toutes ces choses devant le Seigneur, à l'entrée de la tente de réunion. Lév 14

L'important pour Jésus, est de permettre à cet homme de retrouver officiellement sa place dans le Temple et dans la société . Il pourra rejoindre Jésus s'il le souhaite mais il doit faire reconnaître sa guérison par ceux qui détiennent l'autorité, ils l'avaient exclu au temps de la maladie, c'est à eux de le réintégrer, de lui redonner sa place dans sa communauté d'appartenance.

Cette guérison, que l'on peut targuer de spectaculaire, s'inscrit dans le combat de Jésus pour effacer toutes les différences, pour inviter l'humanité à la fraternité universelle, en faisant tomber les barrières dressées par nos égoïsmes, c'est sans doute l'aspect le plus puissant de la Bonne Nouvelle de l’Évangile. Dieu nous veut heureux, Dieu, disions-nous la semaine dernière en citant St Irénée, « nous veut debout » ! C'est Sa joie, Son bonheur Sa gloire. Jésus ne dit-t-il pas :
Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle. (Jean 3)
Comme le Père a la vie en lui-même, ainsi a-t-il donné au Fils d'avoir la vie en lui-même (Jean 5)
Car c'est la volonté de mon Père qui m'a envoyé, que quiconque voit le Fils et croit en lui, ait la vie éternelle; et moi je le ressusciterai au dernier jour." (Jean 6)
C'est l'esprit qui fait vivre, la chair n'est capable de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et elles sont vie. (Jean 6)

Entre les Actes des Apôtres et les évangiles, la Vie est citée 104 fois ! Ce lépreux, après des années de souffrance, de malédictions de toutes sortes, recouvre la santé, recouvre la Vie, et Jésus lui demande la discrétion ! Mais il éclate de vie, de bonheur, de joie, comment retiendrait-il sa langue , même en faisant un effort pour taire la merveille, celle-
ci, parle d'elle-même, il suffit de le regarder, de voir le changement opéré ! Hier exclus, rejeté, défiguré, écrasé, ignoré, éloigné, forçant les gens à changer de trottoir, à se détourner, à prendre un autre chemin ( qui n'a jamais fait cela pour éviter un gêneur, un bavard, un « pestiféré …,) aujourd'hui, même sans le dire, la vie éclate en lui, elle s'impose, elle déroute même, alors :

Une fois parti,cet homme se mit à proclamer et à répandre la nouvelle,de sorte que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville,mais restait à l’écart, dans des endroits déserts. De partout cependant on venait à lui.

Non seulement cet homme est guéri de ce qui faisait sa honte, son malheur, mais il est PURIFIE, lavé, il redevient, aux yeux de tous, l'ami de Dieu . Dieu l'a toujours considéré comme tel, mais pas les hommes, car ce sont les hommes qui dressaient des barrières infranchissables, il était banni ! Comment ne laisserait-il pas éclater sa joie ?

Pourquoi, Jésus lui demande t-Il de se taire ? Jésus sait très bien que semblable changement, sans être dit, saute aux yeux ! Je vois deux raisons à cela, il y en a bien d'autres sûrement !

Nous avons vu Jésus , envahi, pressé par la foule dans la maison de Pierre, une foule avide de Le toucher, et d'être touchée, une foule, même si sa quête est plus de « gourmandise » que de foi , en attente , assoiffée d'une vie meilleure, une foule qui a découvert son Sauveur, Celui qui guérit, libère, ouvre un horizon nouveau, une ère nouvelle. Mais Jésus ne veut pas se laisser enfermer « Allons ailleurs, dans les villages voisins, afin que là aussi je proclame l’Évangile ; car c’est pour cela que je suis sorti. » Jésus dit clairement son intention d'annoncer largement la Bonne Nouvelle du Salut et cela ne fait pas que des heureux, nous le savons et ne tarderons pas à le constater . Ce serait la deuxième raison du silence demandé au lépreux. Si Jésus fait des heureux, si les gens cherchent à Le toucher, s'ils courent après lui, d'autres s'insurgent et polémiquent .Les scribes et les pharisiens se mirent à penser 
 
« Quel est cet homme qui dit des blasphèmes ? (Luc 5) »

« les pharisiens disaient aux disciples : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? » (Matthieu 9)

Les jugements de toutes sortes fusent, Jésus est épié. Les controverses n'ont pas tardé On peut dire qu'en naissant, en arrivant sur la terre des hommes, Jésus est déjà un gêneur, Hérode n'a t-il pas peur d'être supplanté ? Jésus veut se donner le temps de former Ses apôtres de conduire le groupe à maturité Il souhaite donc une certaine discrétion pour éviter les dérapages, son heure, n'est pas encore venue. C'est je pense la raison essentielle de l'impossible silence demandé.

« Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville,mais restait à l’écart, dans des endroits déserts. De partout cependant on venait à lui » Pouvons-nous oser penser et croire que Jésus devient à son tour le lépreux qui «  n'avait ni forme ni beauté pour attirer nos regards, ni apparence pour exciter notre amour. Il était méprise et abandonné des hommes, homme de douleurs et familier de la souffrance, comme un objet devant lequel on se voile la face; en butte au mépris, nous n'en faisions aucun cas. Vraiment c'était nos maladies qu'il portait, et nos douleurs dont il s'était chargé; .. Mais lui, il a été transpercé à cause de nos péchés, broyé à cause de nos iniquités; le châtiment qui nous donne la paix a été sur lui, et c'est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. Nous étions tous errants comme des brebis, chacun de nous suivait sa propre voie; et le Seigneur a fait retomber sur lui l'iniquité de nous tous. Is 53

Oui, Jésus s'est fait lépreux pour nous donner la Vie ! Jésus est venu pour que l'homme ait la vie et la vie en abondance ? Il prend sur Lui notre déchéance pour nous élever à la dignité de fils, à la Vie de Dieu ! En revêtant notre chair, Jésus s'est chargé de notre péché, Il s'est fait lépreux pour nous ! Voilà jusqu'où conduit l' AMOUR inconditionnel d'un Dieu qui se fait homme !
Je suis venu pour la vie
Je suis venu pour la vie
Je suis venu pour la vie éternelle.

O Père sois béni,
De cacher ce mystère aux puissants,
De révéler aux petits,
L'incroyable amour de ton cœur de Père.

Ne soyez un obstacle pour personne,
ni pour les Juifs, ni pour les païens,
ni pour l’Église de Dieu.
Ainsi, moi-même, en toute circonstance,
je tâche de m’adapter à tout le monde,

 sans chercher mon intérêt personnel,
mais celui de la multitude des hommes,

pour qu’ils soient sauvés.
Imitez-moi,
comme moi aussi j’imite le Christ.
1 Co. 10


L'Ermite