SIXIÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
ANNÉE B
(Mc 1, 40-45)
La
lèpre fut longtemps incurable et très mutilante, entraînant en
1909, à la demande de la Société de pathologie exotique,
« l'exclusion systématique des lépreux »
et leur regroupement dans des léproseries comme mesure essentielle de prophylaxie
La
maladie est aujourd'hui traitable par antibiotiques ; des efforts de
santé publique sont faits pour le traitement des malades,
l'équipement en prothèses des
sujets guéris, et la prévention.
Au
temps de Jésus, et avant Lui, (et longtemps encore après) la
situation du lépreux était particulièrement compliquée, c'est
ce que rapporte le passage du Livre des Lévites que nous avons en
première lecture :
«
Quand un homme aura sur la peau une tumeur, une inflammation ou une
pustule,
qui soit une tache de lèpre,on l’amènera au prêtre Aaron ou à l’un des prêtres ses fils.Le lépreux atteint d’une tache portera des vêtements déchirés et les cheveux en désordre, il se couvrira le haut du visage jusqu’aux lèvres, et il criera : “Impur ! Impur !”Tant qu’il gardera cette tache, il sera vraiment impur. C’est pourquoi il habitera à l’écart,son habitation sera hors du camp. »
qui soit une tache de lèpre,on l’amènera au prêtre Aaron ou à l’un des prêtres ses fils.Le lépreux atteint d’une tache portera des vêtements déchirés et les cheveux en désordre, il se couvrira le haut du visage jusqu’aux lèvres, et il criera : “Impur ! Impur !”Tant qu’il gardera cette tache, il sera vraiment impur. C’est pourquoi il habitera à l’écart,son habitation sera hors du camp. »
Dimanche
dernier, en quittant Capharnaüm, Jésus décide
« d'aller ailleurs, dans les villages voisins afin d'y
proclamer l’Évangile, et Il précise,
c'est pour cela que je suis
sorti. »Et il parcourut
toute la Galilée, proclamant l’Évangile dans leurs synagogues, et
expulsant les démons. » C'est dans ce contexte,
qu'un lépreux ose L'aborder . Compte tenu de la loi , n'est-il pas
choquant, que ce lépreux se permette un tel écart et que Jésus ,
en bon Juif, ne fasse rien pour l'éloigner ?
En
ce temps-là,un lépreux vint auprès
de Jésus ; il le supplia et,
tombant à ses genoux, Comment
ce malade, rejeté par sa communauté, a-t-il réussi ce tour de
force ? Il est surprenant qu'il ait trompé la vigilance de
l'entourage de Jésus , quoiqu'il en soit, il est là, et, de plus,
sans doute prosterné, puisqu'il tombe aux genoux de Jésus. Geste
d'adoration qui en dit long , sans qu'il l'exprime, sur la
considération qu'il porte à Jésus ! Devant semblable attitude
nous ne pouvons pas douter de l'intensité de son attente et encore
moins de la densité de sa confiance. Il fait partie de ceux qui ont
entendu parler des actes de Jésus et il n'a pas hésité à déjouer
« Sa protection rapprochée » pour L'approcher et
exprimer sa requête.
Il
lui dit :« Si tu le veux, tu peux me
purifier. » Cet homme manifeste qu'il a une certaine
conscience de la capacité de Jésus à soulager l'humanité , de ses
maux et infirmités. Il croit vraiment que Jésus peut le purifier
. La loi pourrait encourager Jésus à éloigner cet homme , il fait
en effet parti des hors-la-loi, des exclus , interdits de séjour,
relégués à la périphérie , au contraire, Jésus est touché
par sa confiance et sans doute, son audace :
Saisi
de compassion, Jésus étendit la main,le
toucha et lui dit :« Je le veux,
sois purifié. » Non seulement Jésus l'accueille, mais il va
jusqu'à le toucher et , au geste, Jésus joint la parole et
l'action de guérison : Je le veux, sois
purifié . Jésus est un homme libre, rien ne peut arrêter Sa
volonté de faire le bien ! Ce lépreux, participe, par
anticipation, à la liberté de Jésus , les deux ont en effet
franchi les limites imposées par la loi , les deux sont dans un
autre registre : celui de la foi, celui de la confiance pour le
lépreux, celui de l'amour inconditionnel pour Jésus qui ne fait pas
de différences entre les humains! N'est-ce pas ce qui se passe dans
les sacrements et plus particulièrement ceux du baptême et de la
Réconciliation ?
Je
ne peux m'empêcher de penser à ce cultivateur qui a accepté une
condamnation pour avoir accueilli un réfugié clandestin et pour
rester fidèle à sa conception de l'hospitalité. Bien sûr, il faut
raison garder, mais en tant que disciples de Jésus ne sommes-nous
pas invités à repousser les limites du bienséant, du bien -
pensant , de toutes sortes de conformismes ?
Je
pense aussi au Père Damien, l'apôtre des lépreux devenu
missionnaire sur une île perdue du Pacifique, il a vécu avec les
lépreux. Dans cet enfer de désespoir et de misère morale, il a
réussi à façonner une communauté fraternelle . Il a été
canonisé le 11 octobre 2009.
Écoutons
également la parole tonifiante du Pape François !
Le
Pape n'en finit plus de surprendre. Il annonçait, le 30 septembre,
sa décision de faire du G8, le groupe des huit cardinaux chargé de
plancher sur la réforme de la curie romaine qui s'est réuni pour la
première fois mardi 1er octobre, un conseil permanent. Le même
jour, il donnait une interview dé-coiffante au quotidien italien La
Repubblica,
où il fustigeait le
cléricalisme et le « vaticano-centrisme »
de la Curie. Il appelait aussi l’Église à « s'ouvrir
à la modernité »,
estimant que le prosélytisme est «
une bêtise magistrale »,
dans la mesure où l'essentiel est de «
se connaître et de s’écouter, et de faire connaître le monde qui
nous entoure ».
«
Les dirigeants de l'Église ont souvent été des narcisses,
flattés et excités de manière négative par leurs courtisans.
La Cour est la lèpre de
la papauté, a affirmé le
Pape. Dans la Curie il y a des courtisans , mais
la Curie dans son ensemble est autre chose qu'une cour. (…)
Mais elle a un défaut : elle est centrée sur le Vatican. Elle
observe et s'occupe des intérêts du Vatican, qui sont encore, pour
une grande partie, des intérêts temporels. Ce
point de vue « vaticano-centré » néglige le monde
autour de nous. Je ne partage pas ce point de vue et je ferai tout
pour le modifier. L’Église
est ou doit redevenir une communauté du peuple et des prêtres, des
pasteurs de Dieu, des évêques ayant le soin des âmes.
De
son côté, Monseigneur Rouet écrivait voilà quelques années :Les
anciens ignoraient l’origine de cette maladie ( la lèpre) et les
traitements afférents. Notre temps est plus savant et mieux armé.
Il n’empêche : voici cette femme que son mari a abandonnée quand
il a appris qu’elle avait un cancer. Sans parler du Sida qualifié
de « lèpre moderne », bien des maladies provoquent des peurs
irrationnelles qui conduisent à l’isolement. on n’affuble plus
les malades d’habits spéciaux pour lépreux, mais
on les couvre de silence et de solitude.Il
est encore des maladies qu’on tait. Sans parole, comment nourrir
l’échange entre humains ?
La technique qui soigne ne remplace pas la
parole qui guérit en replaçant dans le dialogue social.
La
« peau» de notre société est malade.
Celle-ci rejette à l’extérieur de son corps ceux par qui elle
craint sa dissolution : les étrangers bien sûr (les lépreux
étaient interdits de voyager) et tous ceux qui ne lui sont pas
directement utiles. Car notre société se
construit autour du rendement rapide, de l’adaptation accélérée.
Quant
à nous, acceptons-nous de prendre des risques, pour porter secours à
ceux qui sont différents ? Acceptons-nous d'être montrés du
doigt ? Parfois critiqués en prenant le parti du faible, du
pauvre, du rejeté ? Un employé est mis au ban, nombreux sont
ceux qui prennent le parti des apparemment plus forts ; une
jeune femme, au nom de sa foi, mais aussi au nom de son humanisme,
accepte de se démarquer, elle lui garde sa confiance, son respect,
elle le soutient moralement et ne craint pas les représailles !
(Cette situation m'a été confiée cette semaine !)
Qu'est
ce que je fais pour les lépreux d'aujourd'hui ?

Et
quand le lépreux se trouve guéri, que lui dit Jésus ?
Avec
fermeté, Jésus le renvoya aussitôt en lui disant :« Attention, ne
dis rien à personne,mais va te montrer au prêtre,et donne
pour ta purification ce que Moïse a prescrit dans la Loi :cela sera
pour les gens un témoignage. »
En bon Juif, et certainement pour détourner l'attention de Sa propre
personne, Jésus applique ici ce qui est demandé dans la loi de
Moïse :
"
Voici quelle sera la loi concernant le lépreux, pour le jour de sa
purification. On l'amènera au prêtre,
et le prêtre, étant sorti du camp, l'examinera. Si le
lépreux est guéri de la plaie de lèpre,
le prêtre ordonnera que l'on prenne pour celui qui doit être
purifié deux oiseaux vivants et purs, du bois de cèdre, du cramoisi
et de l'hysope. Le prêtre fera égorger l'un des oiseaux au-dessus
d'un vase de terre, sur de l'eau vive. Puis, ayant pris l'oiseau
vivant, le bois de cèdre, le cramoisi et l'hysope, il les trempera,
ainsi que l'oiseau vivant, dans le sang de l'oiseau égorgé sur
l'eau vive. Il en aspergera sept fois celui qui doit être purifié
de la lèpre, il le déclarera pur et
lâchera dans les champs l'oiseau vivant. Celui qui se
purifie lavera ses vêtements,
rasera tout son poil et se baignera dans l'eau;
et il sera pur. Ensuite il pourra entrer dans le camp,
mais il restera sept jours hors de sa tente. … Le prêtre qui
fait la purification présentera l'homme qui se purifie et
toutes ces choses devant le Seigneur, à l'entrée de la tente de
réunion. Lév 14
L'important
pour Jésus, est de permettre à cet homme de retrouver
officiellement sa place dans le Temple et dans la société . Il
pourra rejoindre Jésus s'il le souhaite mais il doit faire
reconnaître sa guérison par ceux qui détiennent l'autorité, ils
l'avaient exclu au temps de la maladie, c'est à eux de le
réintégrer, de lui redonner sa place dans sa communauté
d'appartenance.
Cette
guérison, que l'on peut targuer de spectaculaire, s'inscrit dans le
combat de Jésus pour effacer toutes les différences, pour inviter
l'humanité à la fraternité universelle, en faisant tomber les
barrières dressées par nos égoïsmes, c'est sans doute l'aspect le
plus puissant de la Bonne Nouvelle de l’Évangile. Dieu nous veut
heureux, Dieu, disions-nous la semaine dernière en citant St
Irénée, « nous veut debout » !
C'est Sa joie, Son bonheur Sa gloire. Jésus ne dit-t-il pas :
Car
Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi
tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la
vie éternelle. (Jean 3)
Comme
le Père a la vie en lui-même, ainsi a-t-il donné au Fils
d'avoir la vie en lui-même (Jean 5)
Car
c'est la volonté de mon Père qui m'a envoyé, que
quiconque voit le Fils et croit en lui, ait la vie éternelle; et
moi je le ressusciterai au dernier jour." (Jean 6)
C'est
l'esprit qui fait vivre, la chair n'est capable de rien. Les
paroles que je vous ai dites sont esprit et elles sont vie.
(Jean 6)
Entre
les Actes des Apôtres et les évangiles, la Vie est citée 104
fois ! Ce lépreux, après des années de souffrance, de
malédictions de toutes sortes, recouvre la santé, recouvre la
Vie, et Jésus lui demande la discrétion ! Mais il éclate
de vie, de bonheur, de joie, comment retiendrait-il sa langue , même
en faisant un effort pour taire la merveille, celle-
ci, parle
d'elle-même, il suffit de le regarder, de voir le changement
opéré ! Hier exclus, rejeté, défiguré, écrasé, ignoré,
éloigné, forçant les gens à changer de trottoir, à se détourner,
à prendre un autre chemin ( qui n'a jamais fait cela pour éviter un
gêneur, un bavard, un « pestiféré …,) aujourd'hui, même
sans le dire, la vie éclate en lui, elle s'impose, elle déroute
même, alors :
Une
fois parti,cet homme se mit à proclamer et à répandre la
nouvelle,de sorte que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans
une ville,mais restait à l’écart, dans des endroits déserts. De
partout cependant on venait à lui.
Non
seulement cet homme est guéri de ce qui faisait sa honte, son
malheur, mais il est PURIFIE, lavé, il redevient, aux yeux de tous,
l'ami de Dieu . Dieu l'a toujours considéré comme tel, mais pas
les hommes, car ce sont les hommes qui dressaient des barrières
infranchissables, il était banni ! Comment ne laisserait-il pas
éclater sa joie ?
Pourquoi,
Jésus lui demande t-Il de se taire ? Jésus sait très bien que
semblable changement, sans être dit, saute aux yeux ! Je vois
deux raisons à cela, il y en a bien d'autres sûrement !
Nous
avons vu Jésus , envahi, pressé par la foule dans la maison de
Pierre, une foule avide de Le toucher, et d'être touchée, une
foule, même si sa quête est plus de « gourmandise » que
de foi , en attente , assoiffée d'une vie meilleure, une foule qui a
découvert son Sauveur, Celui qui guérit, libère, ouvre un horizon
nouveau, une ère nouvelle. Mais Jésus ne veut pas se laisser
enfermer « Allons
ailleurs, dans les villages voisins,
afin que là aussi je proclame l’Évangile ; car c’est pour cela
que je suis sorti. » Jésus dit clairement son intention
d'annoncer largement la Bonne Nouvelle du Salut et cela ne fait pas
que des heureux, nous le savons et ne tarderons pas à le
constater . Ce serait la deuxième raison du silence demandé au
lépreux. Si Jésus fait des heureux, si les gens cherchent à Le
toucher, s'ils courent après lui, d'autres s'insurgent et
polémiquent .Les scribes et les pharisiens se mirent à
penser
«
Quel est cet homme qui dit des blasphèmes ? (Luc 5) »
« les
pharisiens disaient aux disciples : « Pourquoi votre maître
mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? » (Matthieu
9)

« Jésus
ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville,mais restait à
l’écart, dans des endroits déserts. De partout cependant on
venait à lui » Pouvons-nous
oser penser et croire que Jésus devient à son tour le lépreux qui
«
n'avait ni forme ni beauté pour attirer nos regards, ni apparence
pour exciter notre amour. Il
était méprise et abandonné des hommes, homme de douleurs et
familier de la souffrance,
comme un objet devant lequel on se voile la face; en butte au mépris,
nous n'en faisions aucun cas. Vraiment
c'était nos maladies qu'il portait, et nos douleurs dont il s'était
chargé; .. Mais
lui, il a été transpercé à cause de nos péchés, broyé à cause
de nos iniquités; le
châtiment qui nous donne la paix a été sur lui, et c'est par ses
meurtrissures que nous sommes guéris.
Nous étions tous errants comme des brebis, chacun de nous suivait sa
propre voie; et le Seigneur a fait retomber sur lui l'iniquité de
nous tous. Is 53
Oui,
Jésus s'est fait lépreux pour nous donner la Vie ! Jésus est
venu pour que l'homme ait la vie et la vie en abondance ?
Il prend sur Lui notre déchéance pour nous élever à la dignité
de fils, à la Vie de Dieu ! En revêtant notre chair, Jésus
s'est chargé de notre péché, Il s'est fait lépreux pour nous !
Voilà jusqu'où conduit l' AMOUR inconditionnel d'un Dieu qui se
fait homme !
Je
suis venu pour la vie
Je suis venu pour la vie
Je suis venu pour la vie éternelle.
Je suis venu pour la vie
Je suis venu pour la vie éternelle.
O
Père sois béni,
De cacher ce mystère aux puissants,
De révéler aux petits,
L'incroyable amour de ton cœur de Père.
Ne soyez un obstacle pour personne,
ni pour les Juifs, ni pour les païens,
ni pour l’Église de Dieu.
Ainsi, moi-même, en toute circonstance,
je tâche de m’adapter à tout le monde,
sans chercher mon intérêt personnel,
mais celui de la multitude des hommes,
pour qu’ils soient sauvés.Imitez-moi,
comme moi aussi j’imite le Christ.
De cacher ce mystère aux puissants,
De révéler aux petits,
L'incroyable amour de ton cœur de Père.
Ne soyez un obstacle pour personne,
ni pour les Juifs, ni pour les païens,
ni pour l’Église de Dieu.
Ainsi, moi-même, en toute circonstance,
je tâche de m’adapter à tout le monde,
sans chercher mon intérêt personnel,
mais celui de la multitude des hommes,
pour qu’ils soient sauvés.Imitez-moi,
comme moi aussi j’imite le Christ.
1
Co. 10
L'Ermite
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