CINQUIÈME DIMANCHE APRÈS PÂQUES
(Jn 15, 1-8)
La péricope qui est proposée à notre méditation en ce cinquième dimanche après la fête de Pâques nous fait passer, du chapitre 10 au chapitre 15 de St Jean. Dans cet intervalle, il y a eu la résurrection de Lazare , l'onction à Béthanie, l'entrée à Jérusalem, l'annonce par Jésus lui-même, de Sa glorification par Sa mort, le Lavement des pieds et l'annonce de la trahison de Judas, les adieux, durant lesquels Pierre exprime son immense amour à Jésus qui l'invite à plus de réalisme :"Seigneur, lui dit Pierre, pourquoi ne puis-je vous suivre à présent? Je donnerai ma vie pour vous." Jésus lui répondit: "Tu donneras ta vie pour moi! En vérité, en vérité, je te le dis, le coq ne chantera pas que tu ne m'aies renié trois fois." (Jean 13) remarque suivie de certaines recommandations et promesses encourageantes pour les aider à tenir dans l'épreuve :
-Que
votre cœur ne se trouble point. Vous
croyez en Dieu, croyez aussi en moi.
Ce
qui laisse sous-entendre qu'ils n'ont pas compris que Jésus est Dieu
à l'égal du Père ! Nous en avons la preuve dans les versets
qui suivent :
- Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père; s'il en était autrement, je vous l'aurais dit, car je vais vous y préparer une place. Et là où je vais, vous en savez le chemin."Thomas lui dit: "Seigneur, nous ne savons où vous allez; comment donc en saurions-nous le chemin?" Jésus lui dit: "Je suis le chemin, la vérité et la vie; nul ne vient au Père que par moi.Si vous m'aviez connu, vous auriez aussi connu mon Père… Dès à présent, vous le connaissez et vous l'avez vu." Philippe lui dit: "Seigneur, montrez-nous le Père, et cela nous suffit."Jésus lui répondit: "Il y a longtemps que je suis avec vous, et tu ne m'as pas connu? Philippe, celui qui m'a vu, a vu aussi le Père. Comment peux-tu dire: Montrez-nous le Père! Ne crois-tu pas que je suis dans le Père, et que le Père est en moi?
- Si vous me demandez quelque chose en mon nom, je le ferai.Si vous m'aimez, gardez mes commandements. Et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Consolateur, pour qu'il demeure toujours avec vous;
- Je vous ai dit ces choses pendant que je demeure avec vous.
- Mais le Consolateur, l'Esprit-Saint, que mon Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera toutes choses, et vous rappellera tout ce que je vous ai dit.
- je vous laisse la paix, je vous donne ma paix; je ne la donne pas comme la donne le monde. Que votre cœur ne se trouble point et ne s'effraye point.
- Et maintenant, je vous ai dit ces choses avant qu'elles n'arrivent, afin que, quand elles seront arrivées, vous croyiez.Mais afin que le monde sache que j'aime mon Père, et que j'agis selon le commandement que mon Père m'a donné, levez-vous, partons d'ici.
Et Jésus reprend son enseignement avec une image très suggestive et facile à comprendre pour des personnes proches de la nature. Mais ne nous y fions pas, certains termes engagent les apôtres et soi-même, jusque dans les fibres de l'être.
«
Moi, je suis la
vraie vigne, et
mon Père est le
vigneron. Le
Vigneron est « propriétaire » de Sa vigne, c'est Lui qui
prend les décisions et prend soin de Sa vigne c'est donc Lui qui
veille à son bon développement .Ici, la vigne, c'est Jésus et
cette vigne-Jésus
, comme tout pied de vigne, est constituée de différentes parties :
la Souche c'est Jésus , les rameaux ou sarments ce sont les
disciples et chacun de nous, la grappe, le fruit , c'est ce que
produisent les sarments, c'est le fruit de leur travail, de leur
investissement, du don d'eux-mêmes pour le champ du Père.
Régulièrement, le Père-Vigneron,
visite Sa vigne et Il la taille pour lui permettre de porter
davantage de fruits. Bien sûr, Il ne touche pas à la souche elle
est le corps sur lequel sont greffés les sarments, le Père
-Vigneron,
taille les sarments que nous sommes. Tout
sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, mon
Père l’enlève ;
tout sarment qui porte du fruit,
il le purifie en le taillant, pour qu’il en porte davantage.Mais
vous, déjà vous voici purifiés grâce à la parole que je vous ai
dite. Nous sommes
ces sarments que taille le Père-Vigneron
et comment s'y prend-Il ?
Le
Père-Vigneron,
pour nous aider à grandir en amour , donc en sainteté, nous donne
la « Parole
-Souche »
pour nous permettre de vivre dans son esprit ! C'est ce que
décrit St Paul dans la Lettre aux Romains : « Je
ne réalise pas le bien que je voudrais, mais je fais le mal que je
ne voudrais pas.
Si je fais ce que je ne voudrais pas, alors ce n'est plus moi qui
accomplis tout cela, c'est le péché, lui qui habite en moi. Moi qui
voudrais faire le bien, je constate donc en moi cette loi : ce qui
est à ma portée, c'est le mal. Au
plus profond de moi-même, je prends plaisir à la loi de Dieu. Mais,
dans tout mon corps, je découvre une autre loi, qui combat contre la
loi que suit ma raison et me rend
prisonnier de la loi du péché
qui est dans mon corps. Quel homme malheureux je suis ! Qui me
délivrera de ce corps qui appartient à la mort ? (Romains
7) C'est ce que l’Église appelle le
combat spirituel ! Notre être profond est tiraillé, nous
sommes constamment confrontés à des choix « Vois,
je mets aujourd'hui devant toi
la vie et le bien, la mort et le mal. Car
je te prescris aujourd'hui d'aimer le Seigneur, ton Dieu, de
marcher dans ses voies, et d'observer ses commandements, ses lois et
ses ordonnances,
afin que tu vives et que tu multiplies, et que le Seigneur, ton Dieu,
te bénisse dans le pays dont tu vas entrer en possession Dt
30,15
Mais
pour que la sève circule et donne son fruit le sarment doit :
"Demeurez
en moi, comme moi en vous.De même que le sarment ne peut pas porter
de fruit par lui-même s’il ne demeure pas sur la vigne,de même
vous non plus,si vous ne demeurez pas en moi".
Jésus
, comme Il le fait souvent, nous parle à l'impératif : nous
devons DEMEURER rattachés à Jésus comme Il L'est Lui-même au Père
, ainsi c'est la même sève qui circule et alimente tout le corps.
Un sarment qui se détache du pied de vigne meurt et il ne reste plus
qu'à le jeter au feu Si
quelqu’un ne demeure pas en moi,il est, comme le sarment, jeté
dehors,et il se dessèche.Les sarments secs, on les ramasse,on les
jette au feu, et ils brûlent.
ils deviennent cendres ! Si nous voulons continuer de vivre
éternellement nous devons être reliés à la « souche-Jésus ».
Quels moyens avons-nous pour cela ?
Le
premier, c'est évidemment,
l'intégration au CORPS - ÉGLISE
par le sacrement du baptême et par l'Eucharistie et la Confirmation,
ces trois sacrements dits de l'initiation. Ce
préalable posé, nous
devons vivre de ce don , l'entretenir au maximum de nos
possibilités.Comment ?
Par
la fréquentation assidue
de l’Écriture Sainte
et plus particulièrement des Évangiles où Jésus nous donne toutes
les clefs pour vivre en mettant nos pas dans les Siens. C'est le
deuxième moyen. St Matthieu nous donne un résumé de ce vivre avec
Jésus en déployant le magnifique sermon sur la montagne suivi par
le grand commandement de l'Amour fraternel : « Et
moi je vous dis: Aimez
vos ennemis et
priez pour ceux qui vous persécutent, afin que vous deveniez
enfants de votre Père qui est dans les cieux; car il fait lever son
soleil sur les méchants et sur les bons, et descendre la pluie sur
les justes et sur les injustes. Si en effet vous aimez ceux qui vous
aiment, quelle récompense méritez-vous? Les publicains eux-mêmes
n'en font-ils pas autant? Et si vous ne saluez que vos frères, que
faites-vous d'extraordinaire? Les païens eux-mêmes n'en font-ils
pas autant? Vous
donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait.
(Matthieu 5)
Or,
voici son commandement : mettre notre foi dans le nom de son Fils
Jésus Christ,et nous aimer les uns les autres comme il nous l’a
commandé.Celui qui garde ses commandements demeure en Dieu,et Dieu
en lui ;et voilà comment nous reconnaissons qu’il demeure en
nous,puisqu’il nous a donné part à son Esprit. 1 Jn 3 c'est
la deuxième lecture de notre Liturgie.
Et,
comme nous sommes fragiles, faibles, les aspérités de la route nous
font facilement trébucher, parfois tomber, il nous reste alors à
suivre le fils du Père miséricordieux de la Parabole et à nous
jeter dans les bras du Père pour accueillir Son Pardon Lui qui
guette sans cesse notre retour quand nous commençons à flancher.
Ses bras restent grands ouverts pour nous accueillir et nous serrer
sur Son cœur. Il nous mettra le vêtement de fête, enfilera à
notre doigt l'anneau de l'alliance et nous ouvrira le festin des
forts , l'Eucharistie ! C'est le troisième moyen !
Avec
les sacrements
nous avons la prière personnelle et
communautaire.C'est
le quatrième moyen. Pour
toi, quand tu veux prier, entre dans ta chambre et, ayant fermé ta
porte, prie ton Père qui est présent dans le secret; et ton Père,
qui voit dans le secret, te le rendra. (Matthieu
6) Et
nous pouvons rentrer dans la chambre de notre cœur n'importe où , y
compris au milieu d'une foule compacte. Quand nous nous sentons en
danger, quand nous craignons de fléchir, de nous laisser entraîner,
même dans le vacarme de nos grandes cités, un appel intérieur
suffit à rétablir l'équilibre. Le Père envoie ses armées
célestes pour nous garder, mais nous devons
le désirer car
Dieu, nous le rappelions plus haut, nous laisse toujours
libres de nos choix.
Prière
personnelle et prière communautaire . C'est bien , même très
bien de prier en soi, chez soi, mais il est existentiel de rejoindre
la Communauté des croyants pour se fortifier ensemble, s'entraider.
Il y a l'assemblée dominicale mais nous avons toutes sortes de lieux
pour nous retrouver en frères et sœurs, groupes de prières,,
mouvements qui correspondent à notre sensibilité, notre appel. Nous
avons besoin de la foi de nos frères et sœurs pour soutenir la
nôtre, la développer, la partager !
Cinquième
moyen : N'oublions pas enfin le service,
le don de soi dans des lieux qui nous permettent de soutenir les plus
faibles . :
« Que sert-il, mes frères, à un homme de dire qu'il a la foi,
s'il n'a pas les œuvres? Est-ce que cette foi pourra le sauver? Si
un frère ou une sœur sont dans la nudité et n'ont pas ce qui leur
est nécessaire chaque jour de nourriture, et que l'un de vous leur
dise: "Allez en paix, chauffez-vous et vous rassasiez "
sans leur donner et qui est nécessaire à leur corps, à quoi cela
sert-il? Il en
est de même de la foi: si elle n'a pas les œuvres, elle est morte
en elle-même.
(Jacques 2)
Une
foi éthérée n'est pas la foi de Jésus-Christ nous dit Saint
Jacques. La prière ? Oui ! Les sacrements ? Oui !
Mais tout cela doit s'épanouir dans le service de la Communauté des
frères et sœurs et, notamment des plus faibles, la « Souche-Jésus »
ne nous donne -t-elle pas l’exemple ? Jésus, soigne, Jésus
guérit, Jésus remet debout, Jésus remet en état de
marche : « prends
ton grabat et va ! » Quand
les premiers missionnaires sont partis en terre étrangère on ne
leur demandait pas de faire à la place de, mais de donner les moyens
d'accomplir soi-même. Nous devons travailler à mettre nos frères
debout, en état de marche et de service.
Sacrements,
fréquentation de l’Écriture Sainte, prière seul et en
Communauté, don de soi voilà les éléments qui maintiennent les
Sarments reliés au cep pour produire des fruits savoureux et
abondants.
Moi,
je suis la vigne,et vous, les sarments.Celui qui demeure en moi et en
qui je demeure,celui-là porte beaucoup de fruit,car,
en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire.
Du moins, rien de fructueux pour l'avancement du Royaume !
Certes nous pouvons réaliser bien des choses , nous enrichir et
devenir de parfaits égoïstes centrés sur nous-mêmes et fermés à
tout ce qui n'est pas notre moi ! Quel bien en retirerons-nous ?
Quels fruits ? Du verjus ! Déjà Isaïe nous le disait :Il
en remua le sol, il en ôta les pierres, il la planta de ceps exquis.
Il bâtit une tour au milieu, et il y creusa aussi un pressoir. Il
attendait qu'elle donnât des raisins, mais elle donna du verjus. -
"Et maintenant, habitants de Jérusalem et hommes de Juda,
jugez, je vous prie, entre moi et entre ma vigne! Qu'y avait-il à
faire de plus à ma vigne, que je n'aie pas fait pour elle? Pourquoi,
ai-je attendu qu'elle donnât des raisins, et n'a-t-elle donné que
du verjus? "Et maintenant, je vous ferai connaître ce que je
vals faire à ma vigne j'arracherai sa haie, et elle sera broutée;
j'abattrai sa clôture, et elle sera foulée aux pieds. J'en ferai un
désert; et elle ne sera plus taillée, ni cultivée; les ronces et
les épines y croîtront, et je commanderai aux nuées de ne plus
laisser tomber la pluie sur elle." -- Car la vigne du Seigneur
des armées, c'est la maison d'Israël, et les hommes de Juda sont le
plant qu'il chérissait; il en attendait la droiture, voici du sang
versé; la justice, et voici le cri de détresse. (Isaïe 5) Dieu
le Père donne tout à Son peuple et à chaque personne en
particulier, nous avons tout en nous pour donner un
fruit savoureux
et abondant mais pas sans la sève, la grâce qui coule de Jésus en
chacun de nous et dans le Corps entier. Pour être productifs pour le
Royaume nous devons rester reliés à la souche, au « Cep-Jésus »L’écrivain Soljenitsyne pouvait affirmer : « Si je devais résumer la cause profonde de cette révolution désastreuse qui a détruit 60 millions d’humains, je ne saurais donner qu’une explication : l’homme a oublié Dieu »
Oublier Dieu, c'est vouloir être son propre maître et s'ériger en maître du monde . Or le seul vrai et unique Maître c'est Celui qui donne Sa vie , qui ne fait rien de Lui-même, se laisse informer à tout instant par le Père, et parce qu'Il est relié au Père Il permet à la grâce de circuler dans les sarments – les membres – du corps.
Si
vous demeurez en moi,et que mes paroles demeurent en vous,demandez
tout ce que vous voulez,et cela se réalisera pour vous.Ce qui fait
la gloire de mon Père,c’est que vous portiez beaucoup de fruit et
que vous soyez pour moi des disciples. » Jésus
insiste : nous ne porterons du fruit,qu'à condition de rester
reliés.
Dieu qui as envoyé Ton Fils pour nous sauver et pour faire de nous tes enfants d'adoption, regarde avec bonté ceux que Tu aimes comme un Père ; puisque nous croyons au Christ, accorde-nous la vraie liberté et la vie éternelle, par Jésus Christ ton fils notre Seigneur qui vit et règne avec Toi en l'unité du Saint esprit, Dieu pour les siècles des siècles Amen !
« Seigneur,
tu n'étais pas un hésitant.
Ce
que tu aimais le mieux, c'était
l'impératif :
Veillez,
donnez, marchez quand vous voyez clair,
faites-le,
luttez.
Même
à Gethsémani, après l'écrasement terrible,
tu
t'es redressé et tu as secoué les endormis.
Secoue-moi,
ne me laisse pas dormir dans les velléités et les nostalgies.
Je
sais que tu peux faire des saints des pécheurs et des mauvaises
têtes.
Mais
pas avec des mous.
Je
t'en prie, Seigneur, secoue-moi. Amen. »
(
pour que je Te reste relié(e))
Père André Sève (1913-2001)
Père André Sève (1913-2001)
L'Ermite