vendredi 30 avril 2021

LA GLOIRE DE MON PÈRE

 

CINQUIÈME DIMANCHE DE PÂQUES


Année B


(Jn 15, 1-8)




Jésus disait à ses disciples :« Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron. Tout sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, mon Père l’enlève ; tout sarment qui porte du fruit, il le purifie en le taillant, pour qu’il en porte davantage. Voilà une image facile à comprendre, du moins au premier degré. Jésus la présente rapidement :

Jésus est la vigne . C'est à dire un ensemble de ceps cultivés et soignés dans le but de porter du fruit. Chaque cep alimente à son tour de multiples rameaux appelées sarments dont la mission est de porter les fruits, ces belles grappes de grains savoureux qui, à maturité, nous désaltèrent.

Le Vigneron , c'est le Père, notre Père, la vigne lui appartient et Il en espère un bon rendement. Pour que cette vigne porte du fruit, elle doit être soignée et entretenue. Comme tout bon vigneron, le Père surveille et la terre qui nourrit le cep et le cep qui porte les sarments qui donneront les fruits. Entretenir

une vigne est un lourd travail de suivi et d'attention. Le vigneron doit la protéger des parasites, des intempéries, dont il n'est pas toujours maître, il doit supprimer tout le bois mort qui utilise inutilement de la sève au détriment des belles branches possiblement fructueuses. Tout ce bois mort doit disparaître, et c'est le vigneron qui accomplit cette tâche où la confie à de bons ouvriers. Quant aux sarments, régulièrement, le vigneron les taille pour ne garder que la partie la plus fiable qui donnera un bon et beau fruit ! En parlant ainsi, Jésus, qui connaît bien la nature, pense à l'humanité. Jésus est ce Cep qui se ramifie en de multiples « sarments- que- nous- sommes ». Le Père-Vigneron veille sur les « sarments-que-nous-sommes » et c'est à Lui que revient la responsabilité de veiller au bon état de l'ensemble. Avec le « CEP-SON-FILS » Il n'a aucun problème car le Fils ne fait, ne dit, n'accomplit, que ce qu'Il voit faire dire, accomplir par le Père, chez le  « Père -Vigneron ». La question est celle des « sarments-que -nous-sommes » ? Quand le « Père-Vigneron » regarde le sarment, dans Sa perspicacité divine , avec Son infinie miséricorde , Lui, le Trois fois Saint , Saint est le Père, Saint est le Fils, Saint est l'Esprit , ne peut se cacher derrière des œillères, et, parce qu'Il nous aime, Il veut nous voir produire un maximum de fruits et d'excellents fruits . Non pas de ces fruits qui ne fournissent que du verjus «  Il en remua le sol, il en ôta les pierres, il la planta de ceps exquis. Il bâtit une tour au milieu, et il y creusa aussi un pressoir. Il attendait qu'elle donnât des raisins, mais elle donna du verjus. - "Et maintenant, habitants de Jérusalem et hommes de Juda, jugez, je vous prie, entre moi et entre ma vigne! Qu'y avait-il à faire de plus à ma vigne, que je n'aie pas fait pour elle? Pourquoi, ai-je attendu qu'elle donnât des raisins, et n'a-t-elle donné que du verjus? » (Isaïe 5) mais de beaux fruits, bien dorés , gonflés de pulpe, qui écrasée donnera avec abondance le jus très pur de l'Amour ! Le « Père Vigneron » espère, désire, souhaite ardemment que les « sarments – que – nous - sommes » donnent le maximum révélant ainsi au monde les richesses de Ses attributs de Père qui aime et ne sait qu'aimer. A l'évidence ce « Père-Vigneron » voit bien toutes les aspérités de notre nature et pour nous aider à donner le cent pour un, dont parle Jésus ailleurs : « Et il y a ceux qui ont reçu la semence dans la bonne terre : ceux-là entendent la Parole, ils l'accueillent, et ils portent du fruit : trente, soixante, cent pour un. » (Mc 4) Il permet que nous soyons confrontés à différentes épreuves à la fois pour être affinés comme l'or, et pour exprimer au mieux, qui, Il est Lui-même. C'est ainsi qu'avec le sécateur de l'amour, Il retire, si nous Le laissons faire, les aspérités, les minuscules branchettes, qui utilisent inutilement la sève de l'Amour et si elles restaient nous empêcheraient de rendre le fruit attendu. Saint Pierre l'exprime ainsi dans sa Première Lettre :

C'est là ce qui fait votre joie, quoique maintenant, puisqu'il le faut, vous soyez attristés pour un peu de temps par diverses épreuves, afin que l'épreuve de votre foi, plus précieuse que l'or périssable qui cependant est éprouvé par le feu, ait pour résultat la louange, la gloire et l'honneur, lorsque Jésus-Christ apparaîtra, Lui que vous aimez sans l'avoir vu, en qui vous croyez sans le voir encore, vous réjouissant d'une joie ineffable et glorieuse,… 1P1

ou la prière du Psaume 66,10

Car tu nous as éprouvés, ô Dieu! Tu nous as fait passer au creuset comme l'argent.


Et du Psaume 17,3
Si tu sondes mon cœur, si tu le visites la nuit, Si tu m'éprouves, tu ne trouveras rien: Ma pensée n'est pas autre que ce qui sort de ma bouche.

Pour réaliser ce rêve du « Père -Vigneron » , le « Cep-Jésus » nous donne la clef :

Mais vous, déjà vous voici purifiés grâce à la parole que je vous ai dite. Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut pas porter de fruit par lui-même s’il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus,si vous ne demeurez pas en moi. Voilà la clef, voilà le secret : Demeurez en moi, comme moi en vous. Et pour DEMEURER, il est impératif de rester relier au « CEP-JESUS » qui par Sa Parole de Vérité nous donne tous les outils.

Dans l'évangile de ce jour,( de la semaine) en St Jean, Jésus déclare : le Père et Moi nous sommes UN Jn 10,30, pouvons-nous, en toute sincérité exprimer cela pour définir notre relation avec le « CEP-JESUS » ? Quand nous prions, quand nous parlons avec nos semblables, quand nous travaillons, sommes-nous vraiment et de tout notre être, « branchés » sur le « CEP-JESUS », au point de dire « je suis UN avec Jésus » ? Avons-nous ce désir profond de nous laisser informer par Sa Présence en nous, de prendre le temps de L'écouter pour dire ce qu'Il veut nous entendre dire, faire ce qu'Il veut nous voir faire, aimer comme Lui aime. Le « CEP-JESUS » n'hésite pas à préciser que c'est là, le seul vrai moyen de porter un fruit qui demeure :

Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Pour demeurer en Jésus

, nous avons la Parole de Dieu, nous avons aussi les Sacrements . Que faisons-nous de ces précieux outils mis à notre disposition gra-tui-te-ment ! Nous n'hésitons pas ou peu, à consulter le psychologue, le sophrologue, le conseiller conjugal etc or, Jésus nous donne tous les outils du véritable amour, quel usage en faisons-nous ? Rares sont ces spécialistes qui nous inviteront à rencontrer l’Église. Dans ma longue vie, j'ai entendu cela une seule fois avec surprise ! Nous avions une religieuse suivie par un psychiatre depuis de nombreuses années, l'amélioration de son état n'était guère visible, et son « mal être » s'exprimait toujours par de nouvelles formes  « d'aspérités » désarmantes. Comme j'allais la chercher, après une séance de thérapie, j'ai pu discrètement demander au spécialiste si nous avancions un peu , sa réponse fut sans appel : « il serait souhaitable de rencontrer un exorciste ! » Je ne veux pas dire que nos spécialistes n'ont pas leur place, mais si nous vivions dans le Cœur de Dieu, en nous servant des outils qu'Il nous offre, nous irions tous beaucoup mieux et serions en paix avec soi-même et avec les autres. Une personne qui m'est très proche, est pédopsychiatre psychanalyste, plusieurs fois, au cours d'échanges, sans nommer qui que ce soit, évidemment, elle a fait le parallèle entre ses entretiens au Cabinet, et l'accompagnement spirituel sérieux, faisant allusion à un aspect de ma mission de consacrée.

Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est, comme le sarment, jeté dehors, et il se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent.

Pour porter du fruit nous devons permettre à la sève de circuler librement sinon LE

« CEP-JESUS » nous le dit clairement, nous nous desséchons et ne sommes plus bons que pour alimenter le feu, Dieu veuille que ce ne soit pas celui de l'Enfer. Ce feu de l'Enfer est une image bien sûr, qui dit à quel point le péché nous dégrade et dégrade la société. Une image quant au feu, mais une réalité, pensons à la parabole du pauvre Lazare : « Mon enfant, répondit Abraham, rappelle-toi : Tu as reçu le bonheur pendant ta vie, et Lazare, le malheur. Maintenant il trouve ici la consolation, et toi, c'est ton tour de souffrir. De plus, un grand abîme a été mis entre vous et nous, pour que ceux qui voudraient aller vers vous ne le puissent pas, et que, de là-bas non plus, on ne vienne pas vers nous.' Le riche répliqua : 'Eh bien ! père, je te prie d'envoyer Lazare dans la maison de mon père. J'ai cinq frères : qu'il les avertisse pour qu'ils ne viennent pas, eux aussi, dans ce lieu de torture Abraham lui dit : 'Ils ont Moïse et les Prophètes : qu'ils les écoutent ! Non, père Abraham, dit le riche, mais si quelqu'un de chez les morts vient les trouver, ils se convertiront.' Abraham répondit : : 'S'ils n'écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu'un pourra bien ressusciter d'entre les morts : ils ne seront pas convaincus.' » (Lc16) L'Enfer c'est le MAL sous toutes ses formes, et Dieu sait à quel point nous sommes doués d'imagination en la matière. Mais :

Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voulez, et cela se réalisera pour vous. Oui, parce que dans la mesure où nous restons reliés au « CEP-JESUS », dans cette mesure, nous ne demanderons que ce qui peut plaire au Père ! C'est là le secret de l'exaucement de nos prières de demande. Un père ne donnera jamais un couteau à son jeune enfant qui le demande pour jouer, même s'il trépigne et pousse des hurlements , notre « PERE-VIGNERON » ne nous donnera jamais de quoi satisfaire nos égoïsmes ou ceux de nos frères, notre orgueil, nos convoitises . Par contre si nous Lui demandons l'Esprit Saint, il n'y aura aucune restriction, car l'Esprit Saint, notre guide intérieur, guidera nos attentes pour nous et pour nos frères. Voici ce qu'écrivait , à ce propos, Saint Cyrille d’Alexandrie 375-444 : De même que la souche de la vigne fournit et distribue

aux sarments la qualité naturelle qui lui est propre et qui est en elle, c'est ainsi que le Verbe, Fils unique de Dieu le Père, introduit chez les saints une sorte de parenté avec sa nature en leur donnant l'Esprit, surtout à ceux qui lui sont unis par la foi et par une parfaite sainteté. Il les nourrit et fait progresser leur piété, il développe en eux la science de toute vertu et de toute bonté. Faut-il encore que nos frères ouvrent leurs cœurs ! Quand nous prions pour autrui, c'est peut-être la première chose à demander : que son cœur soit disposé à accueillir les dons du Père . Trop souvent les cœurs sont fermés, repliés, sûrs, d'être dans le vrai, le bon, le juste , et ils trouvent souvent des connaissances qui leur diront, sans connaître l'entourage, les situations : « surtout ne change pas » ! tu es bien comme tu es ! Je t'aime ainsi ! Dès lors pourquoi changer, pourquoi évoluer, pourquoi se poser les bonnes questions. Certes, la personne peut être très agréable, mais tous, jusqu'au dernier soupir, sommes appelés à grandir, à nous sanctifier à nous rapprocher de l'Amour qui est Dieu !

 « Nous, nous avançons toujours, dans le juste, dans l'amour, dans la bienveillance et dans le pardon. La tête haute et fiers de ce que nous sommes : de belles personnes droites et sans haine  » m'écrivait cette semaine une personne en conflit avec des proches ! Qui peut affirmer cela ? Ne tends pas, ô méchant, des embûches à la demeure du juste et ne dévaste pas le lieu où il repose ;car sept fois le juste tombe, et il se relève, mais les méchants sont précipités dans le malheur. (Prov 24)

Et comment sortir d'un tel enfermement quand on est absolument certain d'avoir raison, alors qu'on rejette des voisins, des connaissances quand ce ne sont pas des parents proches, qu'on les accable, les affuble de paroles vénéneuses etc Ceci ne veut pas dire que tout est mauvais en eux, mais on ne peut pas dire non plus que ces personnes donnent le cent pour un de la Parabole du Semeur : Et voici ceux qui ont été ensemencés "dans la bonne terre ": ceux-là entendent la Parole, ils l'accueillent et portent du fruit, "trente pour un, soixante pour un, cent pour un (Mc 4) et qu'en cet instant ils font la Gloire du Père !

Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous portiez beaucoup de fruit et que vous soyez pour

moi des disciples. »

Parmi ces fruits nous trouvons ceux de l'Esprit Saint bien évidemment « Le fruit de l'Esprit, au contraire, c'est la charité, la joie, la PAIX, la patience, la mansuétude, la bonté, la fidélité, la douceur, la tempérance. Contre de pareils fruits, il n'y a pas de loi. Ceux qui sont à Jésus-Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses convoitises. Si nous vivons par l'esprit, marchons aussi par l'esprit. Ne cherchons pas une vaine gloire en nous provoquant les uns les autres, en nous portant mutuellement envie. (Ga 5)

Jésus a clairement énoncé les conditions à satisfaire pour être son disciple :" Si quelqu'un vient à moi et ne hait pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et ses sœurs, et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple. Quiconque ne porte pas sa croix et ne me suis pas, ne peut pas être mon disciple. (Lc 14)

Être disciple de Jésus suppose que je me mette à Son écoute, que je Le regarde vivre et que Sa Vie circule en moi , que je reste relié comme le sarment au Cep pour porter un fruit qui demeure et rende gloire au Père. Sœurs, Frères n'attendons pas pour nous livrer à l'Amour, laissons le « Père-Vigneron », nous émonder, nous purifier, nous affiner , nous ne craignons rien, nous sommes cette poterie qu'Il

façonne : Oui, comme l'argile est dans la main du potier, ainsi êtes-vous dans ma main, maison d'Israël ! (Jér 18) Il en prend soin comme le vigneron prend soin de sa vigne : « Je chanterai pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne. Mon ami avait une vigne sur un coteau plantureux. Il en retourna la terre et en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité.» (Is 5)

Laissons le «Père- Vigneron » retourner la terre de notre cœur, permettons-Lui de tailler les « sarments-que-nous-sommes » pour en recueillir un fruit qui demeure pour Sa seule Gloire. Sachons toutefois qu'avec Dieu nous n'en n'aurons jamais fini, et faisons nôtre les paroles de ce chant Liturgique


Va plus loin Va plus loin

Même si tu te crois arrivé

Va plus loin Va plus loin

Le voyage est à peine commencé

Et la route est encore longue vers la fraternité

Et l'horizon de l'amitié



Viens, suis-moi mon ami n'aie pas peur

Même si l'obscurité nous aveugle

Je suis là et je marche avec toi

Ensemble nous irons, l'espoir au fond du cœur

Car au bout de nos peurs

Et au bout de nos peines il y a la lumière

Tout au bout du chemin



Va plus loin (va plus loin)

Va plus loin (va plus loin, va plus loin)

Même si tu te crois arrivé

Va plus loin (va plus loin)

Va plus loin (va plus loin, va plus loin)

Le voyage est à peine commencé (va plus loin)

Et la route est encore longue vers la fraternité

Et l'horizon de l'amitié



Je suis là mon ami près de toi

Même si tu redoutes d'être seul

Je suis là et je marche avec toi

Je te donne la main pour aller sans faiblir

Et la joie dans le cœur Va, regarde plus loin

La lumière promise est au bout du chemin




Va plus loin (va plus loin)

Va plus loin (va plus loin, va plus loin)

Même si tu te crois arrivé

Va plus loin (va plus loin)

Va plus loin (va plus loin, va plus loin)

Le voyage est à peine commencé (va plus loin)

Et la route est encore longue vers la fraternité

Et l'horizon de l'amitié

Writer(s): John Littleton, Michel Prophette


L'Ermite



vendredi 23 avril 2021

DONNER SA VIE, POUR LA RECEVOIR

 

QUATRIEME DIMANCHE DE PÂQUES


Année B




Journée mondiale de prière

pour les vocations


(Jn 10, 11-18)

En ce jour où la liturgie nous propose la Parabole du Bon Pasteur, il me semble judicieux, de donner d'abord la Parole, au Pape François, Pasteur de l'Eglise universelle et successeur du Seul et Unique Bon Pasteur le Seigneur Jésus – Christ. Sans doute en conclusion je soulignerai quelques points de l'Evangile de ce dimanche, mais le Message du Saint Père est d'une telle profondeur , d'une telle richesse, qu'il devient un appel pour chacune de nos vies.

Message du Saint Père pour la 58ème journée mondiale de prière pour les vocations .

La 58ème journée mondiale de prière pour les vocations a lieu comme chaque année le 4ème dimanche de Pâques, c’est à dire le dimanche 25 avril 2021. A cette occasion, le Pape François nous adresse un message qui, en cette année dédiée à Saint Joseph, nous invite à redécouvrir les songes, la fidélité et le service de Saint Joseph, gardien des vocations.

 

Saint Joseph : le songe de la vocation

 Chers frères et sœurs !

Le 8 décembre dernier, à l’occasion du 150ème anniversaire de la proclamation de saint Joseph comme Patron de l’Eglise universelle, a commencé l’année spéciale qui lui est consacrée. (cf. Décret de la Pénitencerie Apostolique, 8 décembre 2020). Pour ma part, j’ai écrit la Lettre apostolique Patris corde, dans le but « d’accroître l’amour envers ce grand Saint ». Il s’agit en effet d’une figure extraordinaire, en même temps « si proche de la condition humaine de chacun de nous ». Saint Joseph n’impressionnait pas, il n’était pas doté de charismes particuliers, il n’apparaissait pas exceptionnel aux yeux de celui qui le rencontrait. Il n’était pas célèbre et ne se faisait même pas remarquer : les Evangiles ne rapportent même pas une de ses paroles. Pourtant, à travers sa vie ordinaire, il a réalisé quelque chose d’extraordinaire aux yeux de Dieu.

Dieu voit le cœur (cf. 1 S 16, 17) et en saint Joseph, il a reconnu un cœur de père, capable de donner et de susciter la vie dans le quotidien. C’est à cela que tendent les vocations : susciter et régénérer des vies chaque jour. Le Seigneur désire modeler des cœurs de pères, des cœurs de mères : des cœurs ouverts, capables de grands élans, généreux dans le don de soi, compatissants en réconfortant les angoisses et fermes pour renforcer les espérances. C’est de cela que le sacerdoce et la vie consacrée ont besoin, aujourd’hui de manière particulière, en des temps marqués par des fragilités et des souffrances dues aussi à la pandémie, qui a suscité des incertitudes et des peurs concernant l’avenir et le sens même de la vie. Saint Joseph vient à notre rencontre avec sa douceur, comme un saint de la porte d’à côté; en même temps, son témoignage fort peut nous orienter sur le chemin.

Saint Joseph nous suggère trois paroles-clé pour la vocation de chacun. La première est rêve. Tout le monde dans la vie rêve de se réaliser. Et il est juste de nourrir de grandes attentes, des attentes élevées que des objectifs éphémères – comme le succès, l’argent et le plaisir – ne parviennent pas à satisfaire. En effet, si nous demandions aux personnes d’exprimer en un seul mot le rêve de leur vie, il ne serait pas difficile d’imaginer la réponse : “amour”. C’est l’amour qui donne sens à la vie, parce qu’il en révèle le mystère. En effet, la vie, on ne l’a que si on la donne, on ne possède vraiment que si on donne pleinement. Saint Joseph a beaucoup à nous dire à ce sujet, parce que, à travers les rêves que Dieu lui a inspirés, il a fait de son existence un don.

Les Evangiles racontent quatre songes (cf. Mt 1, 20 ; 2, 13.19.22). C’étaient des

appels divins, mais ils ne furent pas faciles à accueillir. Après chaque songe, Joseph a dû changer ses plans et se remettre en cause, sacrifiant ses projets pour satisfaire ceux, mystérieux, de Dieu. Il a fait confiance jusqu’au bout. Mais nous pouvons nous demander : “Qu’était un rêve nocturne pour y placer tant de confiance ?”. Bien que l’on y prêtât beaucoup d’attention dans le passé, ce n’était quand même pas grand-chose face à la réalité concrète de la vie. Pourtant saint Joseph se laissa guider par ses songes sans hésiter. Pourquoi ? Parce que son cœur était orienté vers Dieu, il était déjà disposé à son égard. Sa vigilante “oreille intérieure” n’avait besoin que d’un petit signe pour reconnaître la voix. Cela vaut également pour les appels qui nous sont adressés : Dieu n’aime pas se révéler de manière spectaculaire, en forçant notre liberté. Il nous transmet ses projets avec douceur ; il ne nous foudroie pas avec des visions éclatantes, mais il s’adresse avec délicatesse à notre intériorité, en se faisant intime à nous et en nous parlant à travers nos pensées et nos sentiments. Et ainsi, comme il le fit avec saint Joseph, il nous propose des objectifs élevés et surprenants.

Les songes, en effet, ont conduit Joseph dans des aventures qu’il n’aurait jamais imaginées. Le premier déstabilisa ses fiançailles, mais le rendit père du Messie ; le second le fit fuir en Egypte, mais il sauva la vie de sa famille. Après le troisième, qui annonçait le retour dans sa patrie, le quatrième lui fit encore changer ses plans, le ramenant à Nazareth, là même où Jésus allait commencer l’annonce du Règne de Dieu. Dans tous ces bouleversements, le courage de suivre la volonté de Dieu se révéla donc vainqueur. Il en est ainsi de la vocation : l’appel divin pousse toujours à sortir, à se donner, à aller plus loin. Il n’y a pas de foi sans risque. C’est seulement en s’abandonnant avec confiance à la grâce, mettant de côté ses propres programmes et son propre confort, qu’on dit vraiment “oui” à Dieu. Et chaque “oui” porte du fruit, parce qu’il adhère à un dessein plus grand, dont nous n’apercevons que des détails, mais que l’Artiste divin connaît et porte en avant, pour faire de chaque vie un chef-d’œuvre. En ce sens, saint Joseph représente une icône exemplaire de l’accueil des projets de Dieu. Mais le sien est un accueil actif : jamais défaitiste ou qui abandonne, il « n’est pas un homme passivement résigné. Il est fortement et courageusement engagé » (Patris corde, n. 4). Puisse-t-il aider chacun, particulièrement les jeunes en discernement, à réaliser les rêves de Dieu pour eux ; puisse-t-il inspirer l’initiative courageuse de dire “oui” au Seigneur, qui toujours surprend et jamais ne déçoit !

Une seconde parole marque l’itinéraire de saint Joseph et de la vocation : service.

Des Evangiles ressort la manière dont il a vécu en tout pour les autres et jamais pour lui-même. Le Peuple saint de Dieu l’appelle très chaste époux, révélant ainsi sa capacité à aimer sans rien retenir pour lui. En libérant l’amour de toute possession, il s’ouvrit en effet à un service encore plus fécond : son soin aimant a traversé les générations, sa garde attentive l’a rendu patron de l’Eglise. Il est aussi le patron de la bonne mort, lui qui a su incarner le sens oblatif de la vie. Son service et ses sacrifices ont été possibles, mais seulement parce qu’ils étaient soutenus par un amour plus grand : « Toute vraie vocation naît du don de soi qui est la maturation du simple sacrifice. Ce type de maturité est demandé aussi dans le sacerdoce et dans la vie consacrée. Là où une vocation matrimoniale, célibataire ou virginale n’arrive pas à la maturation du don de soi en s’arrêtant seulement à la logique du sacrifice, alors, au lieu de se faire signe de la beauté et de la joie de l’amour elle risque d’exprimer malheur, tristesse et frustration » (ibid., n. 7).

Le service, expression concrète du don de soi, ne fut pas seulement pour saint Joseph un idéal élevé, mais il devint une règle de vie quotidienne. Il s’employa à trouver et à aménager un logement où faire naître Jésus ; il se prodigua pour le défendre de la fureur d’Hérode en organisant un voyage rapide en Égypte ; il s’empressa de retourner à Jérusalem à la recherche de Jésus perdu ; il entretint sa famille en travaillant, même en terre étrangère. Il s’adapta, en somme, aux diverses circonstances avec l’attitude de celui qui ne perd pas courage si la vie ne va pas comme il veut : avec la disponibilité de celui qui vit pour servir. Dans cet esprit, Joseph accueillit les nombreux et souvent imprévus voyages de la vie : de Nazareth à Bethléem pour le recensement, puis en Égypte et encore à Nazareth, et chaque année à Jérusalem, bien disposé chaque fois à aller à la rencontre de circonstances nouvelles, sans se plaindre de ce qui arrivait, prêt à aider pour régler les situations. On peut dire qu’il a été la main tendue du Père céleste à son Fils sur la terre. Il ne peut donc qu’être un modèle pour toutes les vocations, qui sont appelées à ceci : être les mains laborieuses du Père pour ses fils et ses filles.

J’aime penser alors à saint Joseph, gardien de Jésus et de l’Eglise, comme gardien

des vocations. De sa disponibilité à servir provient en effet, son soin dans la garde. « Il se leva ; dans la nuit, il prit l’enfant et sa mère, et se retira en Égypte » (Mt 2, 14), dit l’Evangile, indiquant sa promptitude et son dévouement pour sa famille. Il ne perdit pas de temps à réfléchir sur ce qui n’allait pas, pour ne pas se dérober à celui qui lui était confié. Ce soin attentif et attentionné est le signe d’une vocation réussie. C’est le témoignage d’une vie touchée par l’amour de Dieu. Quel bel exemple de vie chrétienne nous offrons lorsque nous ne poursuivons pas obstinément nos ambitions et que nous ne nous laissons pas paralyser par nos nostalgies, mais que nous prenons soin de ce que le Seigneur, à travers l’Eglise, nous confie ! Alors Dieu répand son Esprit, sa créativité, sur nous; et il opère des merveilles, comme en Joseph.

En plus de l’appel de Dieu – qui réalise nos plus grands rêves – et de notre réponse – qui se réalise dans le service disponible et dans le soin attentif -, il y a un troisième aspect qui traverse la vie de saint Joseph et la vocation chrétienne, en rythmant le quotidien : la fidélité. Joseph est « l’homme juste » (Mt 1, 19), qui, dans le silence actif de chaque jour, persévère dans l’adhésion à Dieu et à ses plans. Dans un moment particulièrement difficile, il se met à « considérer toutes les choses » (cf. v. 20). Il médite, pondère : il ne se laisse pas dominer par la hâte, ne cède pas à la tentation de prendre des décisions hâtives, ne suit pas l’instinct et ne vit pas dans l’immédiat. Il cultive tout dans la patience. Il sait que l’existence ne s’édifie que sur une adhésion continue aux grands choix. Cela correspond à la douceur laborieuse et constante avec laquelle il a exercé l’humble métier de charpentier (cf. Mt 13, 55), pour lequel il n’inspira pas les chroniques du temps, mais le quotidien de chaque père, de chaque travailleur, de chaque chrétien au long des siècles. Parce que la vocation, tout comme la vie, mûrit seulement à travers la fidélité de chaque jour.

Comment s’alimente cette fidélité ? A la lumière de la fidélité de Dieu. Les premières paroles que saint Joseph s’est entendu adresser en songe furent l’invitation à ne pas avoir peur, parce que Dieu est fidèle à ses promesses : « Joseph, fils de David, ne crains pas » (Mt 1, 20). Ne crains pas : ce sont les paroles que le Seigneur t’adresse aussi, chère sœur, et cher frère, quand, malgré les incertitudes et les hésitations, tu ressens comme ne pouvant plus être différé le désir de lui donner ta vie. Ce sont les mots qu’il te répète quand, là où tu te trouves, peut-être au milieu d’épreuves et d’incompréhensions, tu luttes pour suivre chaque jour sa volonté. Ce sont les paroles que tu redécouvres lorsque, sur le chemin de l’appel, tu retournes au premier amour. Ce sont les paroles qui, comme un refrain, accompagnent celui qui dit oui à Dieu par sa vie comme saint Joseph : dans la fidélité de chaque jour.

Cette fidélité est le secret de la joie. Dans la maison de Nazareth, dit une hymne

liturgique, il y avait « une joie limpide ». C’était la joie quotidienne et transparente de la simplicité, la joie qu’éprouve celui qui garde ce qui compte : la proximité fidèle à Dieu et au prochain. Comme il serait beau si la même atmosphère simple et radieuse, sobre et pleine d’espérance, imprégnait nos séminaires, nos instituts religieux, nos maisons paroissiales ! C’est la joie que je vous souhaite, frères et sœurs, qui avec générosité avez fait de Dieu le rêve de votre vie, pour le servir dans les frères et dans les sœurs qui vous sont confiés, à travers une fidélité qui est déjà en soi témoignage, à une époque marquée par des choix passagers et des émotions qui disparaissent sans laisser la joie. Que saint Joseph, gardien des vocations, vous accompagne avec un cœur de père !


Rome, Saint Jean de Latran, 19 mars 2021, Fête de Saint Joseph


Je le disais en introduction, je ne retiens que quelques éléments de cet évangile le Saint Père nous offrant une méditation suffisamment dense sur la VOCATION !

Jésus déclara : « Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis. Le berger mercenaire n’est pas le pasteur, les brebis ne sont pas à lui :
s’il voit venir le loup, il abandonne les brebis et s’enfuit ; le loup s’en empare et les disperse. Ce berger n’est qu’un mercenaire, et les brebis ne comptent pas vraiment pour lui.

N'est un BON PASTEUR quel que soit d'ailleurs son appel à SERVIR, que celle, celui qui DONNE SA VIE. Et, en Jean 15, 13 Jésus affirme« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » Or nous n'aurons jamais fini d'aimer, d'apprendre à aimer, de nous livrer à l'amour. « L'amour est porteur de lumière, c'est un feu qui brûle sans se consumer » écrit Paul BAUDIQUEY Jésus nous montre le chemin de l'Amour tout au long de Sa vie, c'est par AMOUR qu'Il se laisse clouer sur une croix. Il se tait, Il accepte les injures, Il refuse d'être défendu, que dit-Il à Pierre qui blesse un soldat ? : " Remets ton glaive à sa place; car tous ceux qui prennent le glaive périront par le glaive. Ou penses-tu que je ne puisse pas recourir à mon Père, qui me fournirait sur l'heure plus de douze légions d'anges? Comment donc s'accompliraient les Ecritures, d'après lesquelles il doit en être ainsi? " En ce même moment Jésus dit aux foules: " Comme contre un brigand, vous êtes sortis avec des glaives et des bâtons pour me prendre! Chaque jour j'étais assis dans le temple, où j'enseignais, et vous ne m'avez pas arrêté. Mais tout cela est arrivé afin que fussent accomplies les Ecritures prophétiques. " Alors tous les disciples l'abandonnèrent et prirent la fuite. (Matthieu 26) Et l'Amour n'abandonne pas l'aimé. Jésus peut donc poursuivre le portrait du Bon Pasteur et s'identifier :

Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent,

comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis.

Ses brebis, chacun de nous, Il les connaît, et elles Le connaissent ! Connaissons-nous vraiment Jésus ? Prenons-nous vraiment les moyens de Le connaître : sacrements, approfondissement de Sa Parole en fréquentant assidûment les Evangiles ? Cherchons-nous à nous retrouver seul à seul avec Lui, dans un cœur à cœur brûlant au feu de Son propre Amour ? C'est à nous de mesurer et notre attachement et les moyens que nous nous donnons pour aimer ce Dieu qui en Jésus, s'est fait homme, est mort sur une croix pour nous élever à la dignité de fils !

J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. Par anticipation Jésus donne Sa vie pour celles et ceux qui ne Le connaissent pas encore et qu'Il espère voir rejoindre la Communauté-Eglise, et c'est à nous qu'Il confie cette mission . Car aimer c'est partager . Si nous nous nous reconnaissons disciples nous brûlons de voir et de savoir que Celui que nous aimons est RECONNU et AIME par une multitude frères. Si Jésus nous comble nous désirons ardemment que nos frères en humanité fassent la même expérience que nous ! Nous espérons que le Père soit « tout en tous » « Et lorsque tout lui aura été soumis, alors le Fils lui-même fera hommage à celui qui lui aura soumis toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous. (1Cor15) C'est pour cela qu'Il peut encore affirmer :

Voici pourquoi le Père m’aime : parce que je donne ma vie, pour la recevoir de

nouveau. Nul ne peut me l’enlever : je la donne de moi-même. J’ai le pouvoir de la donner, j’ai aussi le pouvoir de la recevoir de nouveau : voilà le commandement que j’ai reçu de mon Père. » Jésus, n'est pas un mercenaire , Il n'agit pas par obligation mais par pur amour et c'est ce qu'Il attend de chacun de nous , de tous les appelés quelle que soit leur vocation.

« Si l'Amour vous visite

Ouvrez grand votre porte, ouvrez grand votre cœur,

Entendez-Le , faites lui confiance …

l'Amour élague pour élargir et libérer la vie....

L'Amour fera de nous ce « rien du tout »

dont Dieu Lui-même a fait présence »

Paul Baudiquey



L'Ermite