vendredi 26 septembre 2014

QUE PENSEZ-VOUS DE CECI ?

VINGT SIXIÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

(Mt 21, 28-32)


« Que pensez-vous de ceci ? »

Avons-nous entendu cette question de Jésus ? Posée, en son temps, à son entourage, cette question s’adresse à nous aujourd’hui. Sans doute Jésus veut-il attirer notre attention sur la parabole qui suit,  nous tenir en éveil pour susciter une vraie réflexion sur l’attitude des deux fils et sur la conclusion, pas moins surprenante, qui devrait nous piquer au vif : les prostitués ? Les publicains ? Pourraient nous devancer dans le Royaume ? Comme souvent, Jésus va droit là où Il veut nous conduire ! A savoir : une remise en question de nos agissements, de notre regard souvent perverti, de nos jugements qui ont vite fait de classer nos frères, et de dire, en nous redressant comme le Pharisien venu au Temple pour se recueillir : 

« O Dieu, je te rends grâces de ce que je ne suis pas comme le reste des hommes, qui sont rapaces, injustes, adultères, ni encore comme ce publicain. Je jeûne deux fois la semaine; je paie la dîme de tout ce que j'acquiers. (Luc  18) 

Ailleurs nous lisons :

« L’homme regarde le visage, mais Dieu regarde le cœur.»  (1Samuel 16)

En effet, Dieu ne s’arrête pas aux apparences, ce que nous avons tendance à faire, Dieu Lui, regarde le cœur, les attitudes et intentions profondes de l’homme.
Ici, quand Jésus demande notre avis, Il sait très bien que dans un premier mouvement notre regard se portera sur nos voisins. En réalité, Jésus pose une question pour nous inviter à réfléchir sur notre manière de nous conduire, personnellement. Ne sommes-nous pas, chacun, ces deux fils qui, parfois disent oui et font non, et d’autres fois disent non, et, par un retour sur soi-même font oui ? Il ne s’agit pas du tout du voisin, mais de soi ! Ces deux hommes, c’est, moi, c’est vous, c’est chacun de nous ! St Paul n’en a-t-il pas fait la cuisante expérience quand il écrit :

«  Je ne comprends rien à ce que je fais : ce que je veux, je ne le fais pas, mais ce que je hais, je le fais. Vouloir le bien est à ma portée, mais non pas l'accomplir, puisque le bien que je veux, je ne le fais pas et le mal que je ne  veux pas, je le fais, ce n'est pas moi qui agis, mais le péché qui habite en moi.  (Romains  7)

Nous sommes en effet des êtres terriblement complexes. Je ne peux m’empêcher de penser à cette personne qui me disait : « merci de prier pour moi, pour que je ne critique pas mes frères ! » Cette personne ne veut pas critiquer et, cependant elle tombe facilement dans ce piège ! Et nous pourrions ici, faire mémoire de toutes nos bonnes intentions avortées, nous voulions le bien, le bon, et nous sommes tombés dans le mal, le mauvais ! Nous avons envie de penser et de dire : « c’est le propre des enfants ! » mais non chers amis, c’est notre façon d’agir, aujourd’hui quel que soit notre âge, notre situation ! Et l’évangile de ce jour nous permet de comprendre à quel point notre cœur est malade d’être divisé ! Cette parabole nous invite à prier Dieu, Notre Père pour qu’Il unifie notre cœur, pour que « notre OUI, soit OUI, et notre NON un vrai Non ! » comme Jésus nous le demande ailleurs. Pour que ce Père nous affermisse dans nos bons désirs, dans notre volonté de nous conduire en vrais fils de Son cœur.

Avez-vous remarqué, le nombre de fois où nous disons OUI, au Seigneur au cours de la liturgie Eucharistique ? Notre OUI, se traduit par AMEN, si nous disons AMEN c’est que nous sommes d’accord avec ce qui est exprimé et que faisons-nous ce ces « AMEN » répétés au cours de nos semaines ? Le risque est d’en faire un automatisme, alors qu’il s’agit d’affirmer notre adhésion. Il serait intéressant de se poser et de regarder, dans notre missel le nombre de fois où nous avons dit « OUI-AMEN » et où nous avons fait « NON » tournant le dos, sans même nous  rendre compte de notre engagement, je vous assure que nous ne serions pas fiers du tout !  Nous disons facilement OUI ; nous prenons des résolutions, nous nous engageons à pardonner et à faire la paix ; mais rien ne bouge. Notre OUI est bien vite oublié. Alors nous t’en prions : viens à notre secours Seigneur. Aide-nous à mettre notre vie en accord avec nos paroles. Aide-nous à mettre ce OUI en pratique. Car :

« Dieu ne désire pas la mort du méchant, nous disait Ézéchiel dans la première lecture, mais qu’il se convertisse et qu’il vive ! »

Dieu Notre Père veut notre bonheur et notre bonheur est d’être établi dans la paix du cœur ! N’est-elle pas, cette paix un des fruits de l’Esprit Saint ? N’est-elle pas le don par excellence de l’Amour de Jésus ? :

« Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Ce n'est pas à la manière du monde que je vous la donne. Que votre cœur cesse de se troubler et de craindre. » (Jean  14)

Le moment est peut-être venu de demander à Jésus « pourquoi Il nous parle ici des publicains et des prostitués ? Cela ne vous paraît-il pas étrange ? Le patron, ou protecteur des publicains pourrait être celui qui apparaît avec le Pharisien dans l’Évangile, au chapitre 18 de St Luc, écoutons-le :

« Le publicain, se tenant à distance, n'osait pas même lever les yeux au ciel; mais il se frappait la poitrine en disant: " O Dieu, ayez pitié de moi le pécheur ! "  (Luc 18)

N’est-il pas le modèle de ceux qui savent se remettre en question ? De ceux qui savent rentrer en eux-mêmes et reconnaissent que leurs actes de collent pas vraiment avec les attentes de Jésus dans l’Évangile ? Demandons-lui de nous éclairer, de nous apprendre à nous interroger sur l’adéquation de nos actes avec la Parole de Jésus.

La protectrice des prostituées serait Marie Madeleine dont les larmes ont lavé les pieds de Jésus chez le Pharisien Simon. Sa vie désordonnée la remplissait de contrition au point qu’elle se tenait derrière Jésus, tendue vers ses pieds qu’elle inondait de ses larmes et essuyait de ses cheveux. Oui, ses cheveux qui constituaient sa parure hier, étaient utilisés ici comme un torchon de pieds ! Son attitude induisait des pensées peu glorieuses dans l’esprit de Simon : 

« S'il était prophète, il saurait qui et de quelle espèce est la femme qui le touche, que c'est une pécheresse. «  (Luc  7)  

Jésus sait fort bien et Il va le lui prouver :

Simon: " Vois-tu cette femme ? Je suis entré dans ta maison, et tu n'as pas versé d'eau sur mes pieds; mais elle, elle a arrosé mes pieds de (ses) larmes et les a essuyés avec ses cheveux.  Tu ne m'as point donné de baiser; mais elle, depuis que je suis entré, elle ne cessait pas d'embrasser mes pieds. Tu n'as pas oint ma tête d'huile; mais elle, elle a oint mes pieds de parfum.  C'est pourquoi, je te le dis, ses nombreux péchés lui sont pardonnés, parce qu'elle a beaucoup aimé; mais celui à qui l'on pardonne peu, aime peu. " Et à elle, il dit: " Tes péchés sont pardonnés.  (Luc  7)





Jésus ne fait pas ici l’éloge du péché mais celui du repentir humble, sincère et confiant. Et c’est cela qu’Il nous demande d’imiter. Jésus nous invite à nous remettre en question comme le « saint » publicain et à regretter profondément nos égarements comme « sainte » Marie Madeleine ! Prenons exemple sur eux, Dieu nous appelle, en Jésus à une profonde conversion, à un total
retournement.
 
Que notre Oui soit OUI, que notre Non soit NON dans toutes les circonstances de notre vie.


« Si le méchant se détourne de sa méchanceté pour pratiquer le droit et la justice, il sauvera sa vie. Parce qu'il a ouvert les yeux, parce qu'il s'est détourné de ses fautes, il ne mourra pas, il vivra. » 

Ce sera ma conclusion emprunté à la première lecture et, surtout mon souhait !


L'Ermite

samedi 20 septembre 2014

ALLEZ VOUS AUSSI A MA VIGNE

VINGT CINQUIÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
Mt 20,1-16


Nous ouvrons aujourd’hui le cycle des trois paraboles de Jésus sur la vigne. En ce dimanche 21 septembre, les ouvriers qui vont travailler à la vigne. Le dimanche 28 septembre, les deux fils qui ont une réponse différente, et, le dimanche 5 octobre, les ouvriers qui veulent la posséder en tuant le fils.
La première lecture d’Isaïe éclaire très bien l’Évangile de ce jour.
« Mes pensées ne sont pas vos pensées, et mes chemins ne sont pas vos chemins, déclare le Seigneur. Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus des vôtres, et mes pensées, au-dessus de vos pensées. » Is 55, 6-9
L’écoute de cet évangile ne peut pas ne pas nous surprendre, le déroulement de l’action est tellement à l’opposé de nos manières d’agir et de penser. Notre façon d’exercer la justice tellement éloignée de celle que nous venons d’entendre ! Qui, parmi nous, se risquerait à donner le même salaire à celui qui a supporté le poids du jour et à celui qui n’a travaillé qu’une heure, en fin de journée, quand le soleil brûle moins fort ? Nous sommes devant une énigme qu’il nous faut résoudre en parcourant l’Écriture Sainte.
Dans la bible, la « vigne » a une signification profonde elle est le symbole de
l’Alliance de Dieu avec son peuple :


La vigne du Seigneur, le tout-puissant, c'est la maison d'Israël, et les gens de Juda sont le plant qu'il chérissait. Il en attendait le droit, et c'est l'injustice. Il en attendait la justice, et il ne trouve que les cris des malheureux. (Isaïe  5)
Moi, je t'avais plantée, vignoble de choix, tout entier en cépage franc. Comment as-tu dégénéré en vigne inconnue aux fruits infects ?
Même si tu te laves avec de la soude et que tu emploies des flots de lessive, la crasse de ta perversion subsiste devant moi-oracle du Seigneur DIEU-. (Jérémie  2)
Il est question de « vigne » 39 fois dans les livres prophétiques et, nous l’avons entendu, quand Dieu parle de la « vigne » Il parle de son peuple, un peuple capricieux, qui abîme l’œuvre du Maître et qui devient incapable de réparer ses erreurs. Dieu seul, en Jésus, peut soigner et guérir nos blessures, notre péché ! Il faut cet amour fou, dont nous parlions dimanche dernier pour nous tirer de notre bourbier !
Dans l’Évangile de ce jour, ce 'Allez, vous aussi, à ma vigne » que Jésus répète en ces trois paraboles est une invitation pressante à entrer dans l’Alliance, venez partager l’Alliance avec moi selon le sens constant de la Tradition biblique Dans
Saint Jean, au chapitre 15, Jésus ne se définit-il pas comme étant Lui-même la Vigne dont nous sommes les sarments ?
Je suis la vigne, vous êtes les sarments. Celui qui demeure en moi, et en qui je demeure, porte beaucoup  de fruits: (Jean 15)
Nous sommes les sarments, nous sommes donc rattachés au Cep-Jésus, en nous coule la même sève, si nous restons reliés nous portons du fruit, un fruit savoureux. Mais, pour cela nous devons rester relier !
« Le Royaume des cieux est comparable au maître d’un domaine »  ce qui suit, n’est autre qu’un développement pour nous permettre de comprendre la manière d’agir de ce Maître, sa volonté, le fond de sa pensée à notre égard. Jésus veut nous permettre de comprendre l’amour inlassable et insondable du Père qui ne cesse de nous appeler, à toute heure et à n’importe quel âge !
Il n’est jamais trop tard pour entrer dans le Royaume des cieux. Tous ceux qui n’ont pas encore découvert l’Amour de Dieu, demeurent ses invités, en permanence. Quoi qu’ils en pensent et quelle que soit leur situation présente.
Nous ne pouvons donc jamais désespérer de notre Salut éternel et de celui de ceux
dont nous portons la responsabilité. Dieu les appelle comme il nous appelle. C’est la Grâce de Dieu qui est à l’œuvre et nous l’oublions facilement en pensant que nous sommes les uniques missionnaires de l’Évangile du Christ.
Jésus ne se contente pas de nous raconter cette parabole comme une espérance. Il l’a vécue réellement, en invitant à entrer dans le Royaume, à la dernière minute avant sa mort, le criminel crucifié à côté de lui, sur la croix. Il est vraiment l’invité de la dernière heure et il  fut le premier à entrer dans ce Royaume : « Aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le paradis. »
Ce qu’il a dit au terme de cette parabole « Les derniers seront les premiers. » se réalise chaque jour désormais comme au jour du salut sur la croix. Il n’y aura jamais un exclu dans le cœur de Dieu. C’est nous qui sommes capables de nous exclure, de refuser cet amour, mais le Seigneur nous offre son amour jusqu’à l’extrême de l’extrême, si nous tombons, Il nous relève, si nous Lui tournons le dos, Il nous appelle. Jamais le Seigneur ne nous fermera la porte de son cœur, à la première heure, comme à la dernière heure Il se tient à notre propre porte et Il frappe :
 « Voici, je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui et je prendrai le repas avec lui et lui avec moi. Le vainqueur, je lui donnerai de siéger avec moi sur mon trône, comme moi aussi j'ai remporté la victoire et suis allé siéger avec mon Père sur son trône.  (Apocalypse  3)
Voilà la geste du Seigneur qui ne se lasse pas de nous appeler, de nous inviter ! Un autre verset mérite et appelle notre attention :
 « Si je veux donner à ce dernier autant qu'à toi : n'ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mon bien ? Vas-tu regarder avec un œil mauvais parce que moi, je suis bon ? »
Ah ! Le regard ! Notre regard ! Il est souvent cause de bien des maux, de l’enfance à un âge avancé ! N’est-ce pas une remarque fréquente chez les enfants qui se bagarrent ? « Il m’a regardé » L’enfant perçoit tout de suite ce qu’il y a de mauvais dans la façon de regarder, et l’adulte n’est pas en retard pour cela ! Jésus le sait et le souligne parce que dans cette façon de regarder, de penser se révèlent nos jalousies, nos envies, nos désirs d’être supérieurs aux autres. Jésus n’est pas calculateur, Il semble se refuser à comptabiliser nos supposés mérites.
Le seul don que Dieu veut nous faire, c’est de se donner lui-même. Il nous a créés non pour un salaire écrit sur une fiche de paie mais pour partager sa Vie éternelle et nous combler de sa bonté de son Bonheur qui ne se partagent pas au pourcentage de nos mérites mais à l’infini des mérites du Christ.
Le don de Dieu ne s’inscrit pas sur une feuille comptable, en heures de travail selon le contrat ou en heures supplémentaires. Si l’homme contemporain a tendance à demander des comptes à Dieu et même à oser lui conseiller ce qu’il devrait faire s’il était juste, s’il était bon, Jésus, lui, nous propose de faire confiance à ce Dieu « dont les pensées dépassent nos pensées »
C’est un don infini qui dépasse tout calcul et toute imagination, puisque c’est lui qu’il nous donne. Les textes évangéliques se bousculent alors dans notre pensée :
« Dieu a tellement aimé le monde, qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui  ne périsse point mais ait la vie éternelle. » Jean  3)
« Mais Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a aimés, et alors que nous étions morts par nos offenses, nous a rendus vivants avec le Christ »  (Éphésiens 2)
Et nous pourrions continuer longtemps…
 L’Amour de Dieu est infini et inconditionnel. Sa patience est infatigable et prend le temps de nous inviter sans cesse, jusqu’à la dernière seconde de notre vie, jusqu’au moment où le choix est encore possible. Il souhaite également que nous ayons le même regard et la même pensée que lui. Pourquoi être autrement ? Au lieu de dresser des barrières entre les hommes travaillons à les rapprocher, semons de l’amour et nous récolterons l’Amour !
Travaillons avec lui à inviter tous les hommes à son Royaume éternel. Les tard-venus sont tout autant les bienvenus dans la maison du Père. Tant qu’ils n’ont pas pris place à la Table de famille, leur place leur est toujours réservée, aussi large pour ces derniers que pour les premiers appelés. Peut-on proportionner l’infini de Dieu aux limites humaines qui sont les nôtres ?
Ainsi les derniers seront premiers, et les premiers seront derniers. Et la salle des noces, la salle de l’Alliance sera remplie !




L'Ermite

samedi 13 septembre 2014

QUI DONC EST DIEU POUR NOUS AIMER AINSI ?

VINGT QUATRIÈME DIMANCHE DU 
TEMPS ORDINAIRE

FÊTE DE LA CROIX GLORIEUSE


Jean (III, 13-17).

N’est-il pas surprenant de voir associé la Gloire à la croix ? En effet, chacun d’entre nous sait ce que signifie la croix dans sa vie, chacun sait, faiblement certes, ce que représente la croix de Jésus ! Comment oser dés lors, parler de croix glorieuse ? 



Cette fête remonte au IV siècle. Hélène, la mère de l’Empereur Constantin vient de se convertir. Elle découvre, lors d’un pèlerinage en Palestine, les restes de la Sainte Croix. C’est de là qu’est née, dans l’art chrétien, la tradition de représenter des croix. Au départ, c’était des croix vides, sans le crucifié. On a voulu, ainsi mettre en valeur la victoire du Christ sur la mort. Ce n’est que plus tard, au Moyen âge, qu’on y a représenté le Christ souffrant : c’est une manière de signifier sa solidarité avec les souffrances humaines, Dieu s’est fait homme, pour assumer notre condition humaine. Dans Sa Mort, Il assume notre mort. Il est du côté des victimes de la violence, des massacres, des génocides, de la maladie, du handicap.

 « Il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à mourir et à mourir sur une croix."

Lorsque nous évoquons la Croix glorieuse nous parlons de la victoire de Jésus sur toutes les formes de mort. Et, lorsque nous la portons sur nous elle est le signe de notre appartenance à la famille des chrétiens, elle est ce rappel constant d’un amour qui n’a pas de limites.

A l’époque de Jésus, mourir crucifié, est le supplice le plus avilissant qui est réservé aux esclaves. En tant que citoyen romain, Paul a échappé à la crucifixion pour être décapité. La réalité d’un Dieu qui se dépouille pour prendre la condition de serviteur, n’est-ce pas difficile à admettre ? Comment peut-on envisager un tel excès d’amour ? A travers son message, aujourd’hui, Paul nous invite à fixer notre regard sur la croix glorieuse jusqu’au moment où s’impose cet amour excessif. Ce geste peut nous libérer et nous sauver, bien mieux que le Serpent d’airain planté en terre.

« Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. »

Voilà jusqu’où peut aller l’amour de Dieu Père. Sommes-nous conscients de la profondeur de cet amour ? Dieu, le Père par excellence, donne son Fils unique pour rassembler les hommes, pour les libérer de leurs esclavages, pour leur faire partager sa Gloire !

« C'est à peine si quelqu'un voudrait mourir pour un juste; peut-être pour un homme de bien accepterait-on de mourir. Mais en ceci Dieu prouve son amour envers nous: Christ est mort pour nous alors que nous étions encore pécheurs. Et puisque maintenant nous sommes justifiés par son sang, à plus forte raison serons-nous sauvés, par lui, de la colère.  (Romains 5) »

Paul a bien perçu cet amour quand il écrit cela dans l’épitre aux Romains. Donner sa vie pour un juste, passe encore, mais donner sa vie pour les pécheurs que nous sommes, demande de la part du Père et de la part du Fils, une dose infinie d’abnégation, d’oublie de soi, de sortie de soi pour permettre à cette humanité blessée de guérir et d’accéder à la Gloire .Il est difficile pour les créatures que nous sommes de comprendre à quel point nous sommes aimés !

« Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné son fils, son unique !  Quant à Jésus ne dit-il pas : Me voici, car c'est bien de moi qu'il est écrit dans le rouleau du livre: Je suis venu, ô Dieu, pour faire ta volonté.
Il déclare tout d'abord: Sacrifices, offrandes, holocaustes, sacrifices pour le péché, tu n'en as pas voulu, ils ne t'ont pas plu. Voici, je suis venu pour faire ta volonté. Il C'est dans cette volonté que nous avons été sanctifiés par l'offrande du corps de Jésus Christ, faite une fois pour toutes.  (Hébreux  10) »


La volonté du Père ce n’est pas la mort du Fils sur une croix, la volonté du Père c’est le salut de l’humanité ! C’est par  ses blessures, celles de Jésus, que nous sommes guéris ! Mais, pour être guéris, nous devons accueillir l’amour ! Guéris, nous le sommes en puissance, mais la concrétisation de notre guérison dépend de notre désir de guérir et des moyens que nous prenons pour être soignés ! Ne sommes-nous pas persuadés que dans l’épreuve de la maladie, la guérison de notre corps dépend en bonne partie de notre volonté et des moyens que nous prenons pour retrouver une bonne santé ? Il en est de même pour notre âme, la guérison n’est pas automatique, nous devons accueillir l’amour infini de Dieu dans notre vie et nous laisser transformer par cet amour, nous laisser travailler par cet amour, affiner, 

« Car l'or s'éprouve dans le feu, et les hommes agréables à Dieu dans le creuset de l'humiliation. (Sirac  2). »

Sur la croix, Jésus ne réclame pas la justice, Il nous offre son amour ! La croix demeure le symbole de la mort et du mal que les hommes sont capables de se faire les uns aux autres quand ils refusent de s’aimer vraiment. L’amour, ce ne sont pas les hommes qui l’ont inventé, c’est Dieu. Et quand les hommes inventent la croix, Dieu continue d’inventer l’Amour ! C’est ainsi qu’Il rejoint les hommes qui se clouent les uns les autres sur la croix. C’est là que nous découvrons la nouvelle manière d’aimer de Dieu, une manière bouleversante que personne n’aurait pu imaginer : les hommes clouaient Jésus sur la croix et voilà que dans le même temps, Dieu clouait son amour sur le mal des hommes. Désormais, il n’existe plus aucun mal qui puisse échapper à la puissance de l’Amour. Comme l’écrit Saint Paul : « Là où le péché a abondé, l’Amour a surabondé. »

Les textes de ce jour nous invitent à accueillir cette Bonne Nouvelle. La première lecture a été écrite plusieurs siècles avant Jésus-Christ. Elle nous raconte les tribulations des hébreux durant la traversée du désert. Nous avons peut-être été surpris par cette étrange histoire du serpent de bronze. Il semble que l’auteur a repris un vieux mythe du monde oriental. Les hébreux, dans le désert, ont récriminé contre Dieu. Il leur manquait les bonnes nourritures de l’Égypte, ils étaient de plus en plus dégoûtés par cette nourriture misérable, fade et insipide… Une question : de nos jours qui récrimine contre les émissions, les articles et les livres qui sont de fausses nourritures et qui devraient nous dégouter ? Le serpent de bronze est le point de départ de la guérison car il oblige à lever les yeux, à regarder vers le haut ! C’est le signe qu’on se tourne vers Dieu et qu’on veut accueillir son amour !

Puissions-nous garder nos  yeux fixés sur Jésus en croix, non de façon morbide mais pour contempler l’amour ! Pour nous laisser toucher par les blessures de Jésus, pour nous blottir dans ses blessures qui nous apportent la guérison ! La croix, c’est Jésus qui l’embrasse, qui la porte et qui est porté, exposé, il faut cette folie d’amour pour s’y laisser attacher. Nous ne pouvons que nous glisser dans, sous son ombre, nous laisser envelopper, nous laisser abriter comme on cherche l’ombre pour ne pas être brûlés par le soleil. Nous avons à rechercher l’ombre de la croix, pour nous y blottir et nous recevoir recouverts, protégés de tout mal ! La croix comme abri ! A l’ombre de la croix de Jésus nous ne craignons rien. Jésus nous enserre avec les bras de la croix, sa croix, ils sont notre sécurité, notre protection, notre secours, notre libération et notre liberté. Jésus a accepté la croix, Jésus s’est livré pour chacun de nous, ta croix Jésus, devient ma protection, mon salut , mon abri et ma gloire !

Par la croix du vrai Pasteur
Alléluia, où l’enfer est désarmé,
Par le corps de Jésus Christ
Alléluia, qui appelle avec nos voix,
Sur l’Église de ce temps,
Que l’Esprit vient purifier !

Fais paraître ton jour et le temps de ta grâce,
Fais paraître ton jour, que l’homme soit sauvé !

Par la croix du Premier-né
Alléluia, le gibet qui tue la mort,
Par le corps de Jésus-Christ,
Alléluia, la vraie chair de notre chair,
Sur la pierre des tombeaux,
Alléluia, sur nos tombes à venir


L'Ermite



samedi 6 septembre 2014

JE FAIS DE TOI UN GUETTEUR !

VINGT TROISIÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

Matthieu 18, 15-20


Le passage du livre du Prophète Ézéchiel que nous venons d’entendre est impressionnant de corrélation avec l’évangile de ce jour. Si Jésus vient parfaire comme nous le rappelions récemment, et comme nous le verrons aujourd’hui encore, le Prophète, de la part du Seigneur, ouvre des portes qui nous entraînent sur des chemins de présence et de responsabilité.

« Je fais de toi un guetteur pour la maison d’Israël » dit le Seigneur Dieu à Ézéchiel, nous entendons « un veilleur » quelqu’un d’une grande capacité de présence, à l’écoute de Celui qui parle, donc un silencieux, un priant susceptible, d’entendre et de transmettre ce qu’il entend parce qu’il en a reçu la mission.

 «Si je dis au méchant : 'Tu vas mourir', et que tu ne l'avertisses pas, si tu ne lui dis pas d'abandonner sa conduite mauvaise, lui, le méchant, mourra de son péché, à toi, je demanderai compte de son sang. » si le Prophète n’accomplit pas la mission confiée, quelles que soient les raisons de son silence, le Seigneur le rend responsable des conséquences que cet état de fait, entraîne dans la vie du pécheur concerné ! Comment oserions dire encore, « ce n’est pas mon problème », je ne suis pas responsable, il est assez grand pour savoir ce qu’il doit faire ! Dès l’Ancien Testament, Dieu le Père nous rend responsables les uns des autres, nous sommes fortement invités à porter nos frères dans la prière « Dieu fait de nous des veilleurs » et, avec une infinie délicatesse, de leur permettre de prendre conscience, de la gravité de leurs actes !

Jésus, Lui, nous donne la marche à suivre, Il nous indique les étapes de la prise en charge du frère dévoyé :  

« Si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute. S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère.

Cette première étape demande d’avoir bien réfléchi, pris conseil sans doute et beaucoup prié, et, pourquoi pas, d’avoir jeûné ! Elle suppose une relation avec cette personne, nous ne pouvons pas et ne devons pas arriver avec les gros sabots de nos certitudes dans la vie de nos frères au risque de les déstabiliser et de les éloigner à jamais. C’est loin d’être facile, mais le Seigneur nous le demande. Pour s’approcher ainsi de nos semblables nous devons évacuer tout esprit revanchard, toute forme de récupération, cette démarche doit être empreinte de gratuité et d’amour vrai, profond, de la personne en question. St Paul ne nous dit-il pas aujourd’hui : «  Frères, ne gardez aucune dette envers personne, sauf la dette de l'amour mutuel, … l'accomplissement parfait de la Loi, c'est l'amour. » Se taire serait manquer d’amour, se taire, serait laisser aller son frère à sa perte, je, nous sommes responsables les uns des autres, aimer vraiment, est très exigeant.

 « S’il ne t’écoute pas, prends encore avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins. »

Enfermé dans son péché le frère peut nous rejeter, nous insulter, nous renvoyer à notre propre vie, il nous faut alors une grande humilité pour reconnaître nos  failles sans pour autant abandonner ce combat. J’ai connu ce genre de situation, où trois hommes profondément croyants, ont réfléchi et prié avant d’aller rencontrer un frère dans la foi, dont la vie faisait scandale dans la communauté des croyants. Ils ont rencontré là un homme humble, prisonnier d’une passion infernale, dont il ne savait comment se libérer. Il a remercié ses frères dans la foi qui lui demandaient de faire un choix et le suppliaient pour l’Église du Christ qui en était éclaboussée. Humblement, le pécheur a reconnu sa faute, il a fait le choix qui convenait et, aider par ses frères,  a changé de lieu et même de profession !

« S’il refuse de les écouter, dis-le à la communauté de l’Église ; »

Il s’agit ici de la hiérarchie. A ce stade, toutes sortes de tentations nous assaillent du genre : après tout, je ne suis pas concerné ! Ou, pourquoi m’en mêler, c’est de la délation ! L’Église doit être au courant, si Elle ne dit rien c’est qu’Elle a de bonnes raisons ! N’y trouve-t-elle pas son compte ? Tout cela n’est que tentations et appartient au monde des ténèbres. Notre devoir fraternel est d’informer en restant excessivement discret dans la démarche avant et après, c’est de l’ordre du secret. Peut-être serons-nous rabrouer, qu’importe, nous avons agi en toute vérité, avec amour et parce que nous avions des preuves tangibles. J’ai, là aussi, vécu semblable situation, j’ai été écartée, j’ai continué de prier et,
cinq ans plus tard, la situation a implosé et l’ecclésiastique que j’avais alerté m’a dit : « dire que tu m’avais alerté, je n’ai pas su recevoir » ! Le Seigneur ne nous reprochera pas d’avoir échoué dans une démarche droite, par contre Il nous demandera des comptes si nous n’avons pas accompli notre mission.

« S’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain. »

Ce qui ne nous empêche pas de continuer de prier pour le frère concerné et de continuer de demander sa conversion.

 Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel. 

Jésus semble nous inviter à coopérer à la mission de l’Église hiérarchique, à la libération de nos frères pour leur permettre de vivre plus et mieux sous le Regard aimant du Seigneur qui nous aime et « ne veut pas la mort du pécheur mais qu’Il vive ! » allons-nous nous dérober par lâcheté ? Allons-nous devenir complices de sa faute ? Si les circonstances nous empêchent sérieusement d’intervenir, après avoir consulté pour être sûrs de ne pas fuir nos responsabilités, dans certains cas, il sera justifié de démissionner.

Encore une fois, je vous le dis : si deux d'entre vous sur la terre se mettent d'accord pour demander quelque chose, ils l'obtiendront de mon Père qui est aux cieux. Quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d'eux. »

Dans tous les cas demeure le devoir de la prière. La prière obtient tout : « C'est pourquoi, je vous le dis, tout ce que vous demandez dans la prière, croyez que vous l'obtenez, et ce sera (fait) pour vous. » écrit St Marc. Certes la réponse du Seigneur peut ne pas être immédiate pour bien des raisons. Soit notre cœur n’est pas prêt, embourbé lui-même dans bien des passions, soit l’intéressé fait la sourde oreille, soit les deux, mais le Seigneur est assez puissant pour avoir raison, à un moment de nos surdités respectives. St Jacques ne nous dit-il pas : « la prière fervente du juste a beaucoup de puissance ; » N’oublions pas cette précision : « du juste » c'est-à-dire de celui qui essaie de vivre selon le cœur de Dieu, qui, comme Jésus, essaie d’accomplir la volonté du Père. Il arrivera aussi que notre prière semblera inefficace, à nos yeux, Jésus nous en donne la raison dans St Marc : « Ce genre ne peut être chassé que par la prière et le jeûne »Nous devons, comme je le disais plus haut, y mettre le prix. « Mes petits enfants, nous dit St Jean, n'aimons pas de parole et de langue, mais en action et en vérité. »


Au cours de cette Eucharistie demandons la grâce de cet amour, les uns pour les autres, ce sens des responsabilités, de la prière, la force de la foi qui déplace les montagnes, l’humilité qui se souvient « qu’un frère soutenu par son frère est une ville forte » Qu’il en soit ainsi !

L'Ermite