vendredi 15 novembre 2024

PETITE FILLE ESPERANCE

 

PETITE FILLE ESPÉRANCE


TRENTE TROISIÈME DIMANCHE


DU TEMPS ORDINAIRE

Année B



(Mc 13, 24-32)

Jésus parlait à ses disciples de sa venue :    « En ces jours-là, après une grande détresse, le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ;    les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées.    Alors on verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec grande puissance et avec gloire.    Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde,
depuis l’extrémité de la terre jusqu’à l’extrémité du ciel.

Laissez-vous instruire par la comparaison du figuier : dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche.   De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte.Amen, je vous le dis : cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive. Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Quant à ce jour et à cette heure-là, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père. »

Avec le chapitre 13 de St Marc nous sommes à la veille de la Passion du Seigneur, le propos de ce jour nous prépare indirectement, au grand bouleversement de la Passion/Résurrection  !

Jésus veut aider Ses disciples à voir au-delà de ce chamboulement ,en des termes de style apocalyptique, bien connu à cette époque, voir la première lecture, En ce temps-là se lèvera Michel, le chef des anges, celui qui se tient auprès des fils de ton peuple. Car ce sera un temps de détresse comme il n’y en a jamais eu depuis que les nations existent, jusqu’à ce temps-ci. Mais en ce temps-ci, ton peuple sera délivré,tous ceux qui se trouveront inscrits dans le Livre.    Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront, les uns pour la vie éternelle,les autres pour la honte et la déchéance éternelles Dn 12. penser aussi à l'Apocalypse de Saint Jean !

Jésus veut orienter leurs regards et leurs cœurs, au delà du drame qu'ils vivront prochainement , à savoir : Son retour en Gloire, à la fin des temps . Jésus veut les aider à voir plus loin que le grand mystère de Sa mort sur une croix, Il veut leur permettre de pressentir que ce monde n'a de sens que dans la pensée du Père et qu'il trouvera son aboutissement quand Lui, Jésus, sera « tout en tous » Jésus veut les éveiller à cette Espérance. Alors, quand tout sera sous le pouvoir du Fils, il se mettra lui-même sous le pouvoir du Père qui lui aura tout soumis, et ainsi, Dieu sera tout en tous. 1 Co. 15, 28

Alors, il n'y a plus de Grec et de Juif, d'Israélite et de païen, il n'y a pas de barbare, de sauvage, d'esclave, d'homme libre, il n'y a que le Christ : en tous, il est tout. Co 3,11

 

« En ces jours-là, après une grande détresse, le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ;    les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées.    Alors on verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec grande puissance et avec gloire.    Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde, depuis l’extrémité de la terre jusqu’à l’extrémité du ciel.

Jésus veut les établir dans l'Espérance de ce monde à venir, tendus, comme l'écrit St Paul vers ce but ultime :

 Oui, je considère tout cela comme une perte à cause de ce bien qui dépasse tout : la connaissance du Christ Jésus, mon Seigneur. À cause de lui, j’ai tout perdu ; je considère tout comme des ordures, afin de gagner un seul avantage, le Christ,

 et, en lui, d’être reconnu juste, non pas de la justice venant de la loi de Moïse mais de celle qui vient de la foi au Christ, la justice venant de Dieu, qui est fondée sur la foi.

 Il s’agit pour moi de connaître le Christ, d’éprouver la puissance de sa résurrection et de communier aux souffrances de sa passion, en devenant semblable à lui dans sa mort,avec l’espoir de parvenir à la résurrection d’entre les morts.

Certes, je n’ai pas encore obtenu cela, je n’ai pas encore atteint la perfection, mais je poursuis ma course pour tâcher de saisir, puisque j’ai moi-même été saisi par le Christ Jésus.Frères, quant à moi, je ne pense pas avoir déjà saisi cela. Une seule chose compte : oubliant ce qui est en arrière, et lancé vers l’avant, je cours vers le but en vue du prix auquel Dieu nous appelle là-haut dans le Christ Jésus.

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 Ils vont à leur perte. Leur dieu, c’est leur ventre, et ils mettent leur gloire dans ce qui fait leur honte ; ils ne pensent qu’aux choses de la terre. Mais nous, nous avons notre citoyenneté dans les cieux, d’où nous attendons comme sauveur le Seigneur Jésus

Christ, lui qui transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux, avec la puissance active qui le rend même capable de tout mettre sous son pouvoir. Ph. 3 C'est justement à cette Espérance que Jésus veut les élever en leur proposant de contempler, avec Lui, un figuier qui se prépare à revivre après un hiver rigoureux !

Laissez-vous instruire par la comparaison du figuier :dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche.    De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte.    Amen, je vous le dis : cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive.    Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas.    Quant à ce jour et à cette heure-là,nul ne les connaît,pas même les anges dans le ciel,pas même le Fils,mais seulement le Père. »

Ces versets peuvent être troublants et en troublent plus d'un . Il me semble toutefois qu'il est extrêmement important de nous attacher essentiellement aux deux derniers d'entre eux. Un : les Paroles du Maître subsisteront elles sont vraies de toujours à toujours

Deux : le Père seul est détenteur du secret, , le Fils Lui-même ne sait pas !

De même que la venue de l'été entraîne un bouleversement absolu dans l'évolution d'un figuier d'une saison à l'autre, de même les signes avant-coureurs du retour du Christ entraînera un bouleversement cosmique dont qu'il ne faut pas craindre les effets et manifestations puisqu'il s'agira là de l'accomplissement total du dessein du Père ! Pour nous il convient de vivre pleinement l'aujourd'hui de Dieu en ayant pour absolue certitude que ces paroles trouveront leur achèvement dans l'éternel présent divin!

Il y aura bien un moment précis, lequel est connu du Père seul, et nous sommes conviés à cette heure, dans la seule espérance qui donne foi au Christ qui affirme que ses paroles demeureront éternellement !

Rappelons que la Transfiguration, que nous célébrons le 6 août chaque année, est un avant-goût de l’Avènement du Christ quand Il reviendra dans la Gloire, quand, Lui, le Bien-Aimé du Père sera TOUT EN TOUS  !

Veillez donc et priez en tout temps, afin que vous soyez en état d'échapper à tout ce qui doit arriver et de vous maintenir devant le Fils de l'homme. Lc 21,36



La petite espérance de Charles Péguy



La foi que j’aime le mieux, dit Dieu, c’est l’espérance

Ce qui m'étonne, dit Dieu, c'est l'espérance.

Et je n'en reviens pas.

Cette petite espérance qui n'a l'air de rien du tout.

Cette petite fille espérance. Immortelle.

Car mes trois vertus, dit Dieu.

Les trois vertus mes créatures. Mes filles mes enfants.

Sont elles-mêmes comme mes autres créatures.

De la race des hommes.

La Foi est une Épouse fidèle.

La Charité est une Mère.

Une mère ardente, pleine de cœur.

Ou une sœur aînée qui est comme une mère.




L'Espérance est une petite fille de rien du tout.

Qui est venue au monde le jour de Noël de l'année dernière.

Qui joue encore avec le bonhomme Janvier.

Avec ses petits sapins en bois d'Allemagne couverts de givre peint.

Et avec son bœuf et son âne en bois d'Allemagne. Peints.

Et avec sa crèche pleine de paille que les bêtes ne mangent pas.

Puisqu'elles sont en bois.

C'est cette petite fille pourtant qui traversera les mondes.

Cette petite fille de rien du tout.

Elle seule, portant les autres, qui traversera les mondes révolus.

Comme l’étoile a conduit les trois rois du fin fond de l’Orient.

Vers le berceau de mon fils. Ainsi une flamme tremblante.

Elle seule conduira les Vertus et le Monde.

Une flamme percera des ténèbres éternelles.

Le prêtre dit. Ministre de Dieu, le prêtre dit :

Quelles sont les trois vertus théologales ?

L’enfant répond

Les trois vertus théologales sont la Foi, l’Espérance et la Charité.

  • Pourquoi la Foi, l’Espérance et la Charité

    sont- elles appelées vertus théologales ?

  • La Foi, l’Espérance et la Charité

    sont appelées vertus théologales

    parce qu’elles se rapportent immédiatement à Dieu.

  • Qu’est-ce que l’Espérance ?

    L’Espérance est une vertu surnaturelle

    par laquelle nous attendons de Dieu, avec confiance,

  • sa grâce en ce monde et la gloire éternelle dans l’autre.


  • Faites un acte d’Espérance. –

    • Mon Dieu, j’espère, avec une ferme espérance, que vous me donnerez, par les mérites de Jésus-Christ, votre grâce en ce monde, et si j’observe vos commandements, votre gloire dans l’autre, parce que vous me l’avez promis, et que vous êtes souverainement fidèle dans vos promesses.

      On oublie trop, mon enfant, que l’espérance est une vertu, qu’elle est une vertu théologale, et que des trois vertus théologales, elle est peut-être la plus agréable à Dieu. Qu’elle est assurément la plus difficile, qu’elle est peut-être la seule difficile et que sans doute elle est la plus agréable à Dieu.

      La foi va de soi. La foi marche toute seule. Pour croire il n’y a qu’à se laisser aller, il n’y a qu’à regarder. Pour ne pas croire il faudrait se violenter, se torturer, se tourmenter, se contrarier. Se raidir. Se prendre à l’envers, se mettre à l’envers, se remonter. La foi est toute naturelle, toute allante, toute simple, toute venante. Toute bonne venante. Toute belle allante. C’est une bonne femme que l’on connaît, une vieille bonne femme, une bonne vieille paroissienne, une bonne femme de la paroisse, une vieille grand-mère, une bonne paroissienne. Elle nous raconte les histoires de l’ancien temps, qui sont arrivées dans l’ancien temps. Pour ne pas croire, mon enfant, il faudrait se boucher les yeux et les oreilles. Pour ne pas voir, pour ne pas croire.

      La charité va malheureusement de soi. La charité marche toute seule. Pour aimer son prochain il n’y a qu’à se laisser aller, il n’y a qu’à regarder tant de détresse. Pour ne pas aimer son prochain il faudrait se violenter, se torturer, se tourmenter, se contrarier. Sa raidir. Se faire mal. Se dénaturer, se prendre à l’envers, se mettre à l’envers. Se remonter. La charité est toute naturelle, toute jaillissante, toute simple, toute bonne venante. C’est le premier mouvement du cœur. C’est le premier mouvement qui est le bon. La charité est une mère et une sœur. Pour ne pas aimer son prochain, mon enfant, il faudrait se boucher les yeux et les oreilles. À tant de cris de détresse.

      Mais l'espérance ne va pas de soi. L'espérance ne va pas toute seule. Pour espérer, mon enfant, il faut être bien heureux, il faut avoir obtenu, reçu une grande grâce. C’est la foi qui est facile et de ne pas croire qui serait impossible.

      C’est la charité qui est facile et de ne pas aimer qui serait impossible. Mais c’est d’espérer qui est difficile. à voix basse et honteusement Et le facile et la pente est de désespérer et c’est la grande tentation.

      La petite espérance s'avance entre ses deux grandes sœurs et on ne prend pas seulement garde à elle. Sur le chemin du salut, sur le chemin charnel, sur le chemin raboteux du salut, sur la route interminable, sur la route entre ses deux sœurs la petite espérance S'avance. Entre ses deux grandes sœurs. Celle qui est mariée. Et celle qui est mère. Et l'on n'a d'attention, le peuple chrétien n'a d'attention que pour les deux grandes sœurs. La première et la dernière. Qui vont au plus pressé. Au temps présent. À l'instant momentané qui passe. Le peuple chrétien ne voit que les deux grandes sœurs, n'a de regard que pour les deux grandes sœurs. Celle qui est à droite et celle qui est à gauche.

      Et il ne voit quasiment pas celle qui est au milieu. La petite, celle qui va encore à l'école. Et qui marche. Perdue entre les jupes de ses sœurs. Et il croit volontiers que ce sont les deux grandes qui traînent la petite par la main. Au milieu. Entre les deux. Pour lui faire faire ce chemin raboteux du salut. Les aveugles qui ne voient pas au contraire. Que c'est elle au milieu qui entraîne ses grandes sœurs. Et que sans elle elles ne seraient rien. Que deux femmes déjà âgées. Deux femmes d'un certain âge. Fripées par la vie. C'est elle, cette petite, qui entraîne tout. Car la Foi ne voit que ce qui est. Et elle elle voit ce qui sera. La Charité n'aime que ce qui est. Et elle elle aime ce qui sera. La Foi voit ce qui est. Dans le Temps et dans l'Éternité. L'Espérance voit ce qui sera. Dans le temps et dans l'éternité. Pour ainsi dire le futur de l'éternité même. La Charité aime ce qui est. Dans le Temps et dans l'Éternité. Dieu et le prochain. Comme la Foi voit. Dieu et la création. Mais l'Espérance aime ce qui sera. Dans le temps et dans l'éternité. Pour ainsi dire dans le futur de l'éternité. L'Espérance voit ce qui n'est pas encore et qui sera. Elle aime ce qui n'est pas encore et qui sera Dans le futur du temps et de l'éternité. Sur le chemin montant, sablonneux, malaisé. Sur la route montante. Traînée, pendue aux bras de ses deux grandes sœurs, Qui la tiennent pas la main, La petite espérance. S'avance. Et au milieu entre ses deux grandes sœurs elle a l'air de se laisser traîner. Comme une enfant qui n'aurait pas la force de marcher. Et qu'on traînerait sur cette route malgré elle. Et en réalité c'est elle qui fait marcher les deux autres. Et qui les traîne. Et qui fait marcher tout le monde. Et qui le traîne. Car on ne travaille jamais que pour les enfants. Et les deux grandes ne marchent que pour la petite.

      Charles Péguy, Le Porche du mystère de la deuxième vertu, 1912


      L'Ermite


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