AIMONS !
TRENTE ET UNIÈME DIMANCHE
DU TEMPS ORDINAIRE
Année B
(Mc 12, 28b-34)
un scribe s’avança vers Jésus pour lui demander :« Quel est le premier de tous les commandements ? » Jésus lui fit cette réponse :« Voici le premier :Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur.Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force. Et voici le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là. » Le scribe reprit :« Fort bien, Maître, tu as dit vrai : Dieu est l’Unique et il n’y en a pas d’autre que lui. L’aimer de tout son cœur, de toute son intelligence, de toute sa force,et aimer son prochain comme soi-même, vaut mieux que toute offrande d’holocaustes et de sacrifices. » Jésus, voyant qu’il avait fait une remarque judicieuse, lui dit : Tu n’es pas loin du royaume de Dieu. »Et personne n’osait plus l’interroger.
AIME ! AIMONS ! AIMEZ !
Un seul a conjugué ce verbe à toutes les personnes : LE SEIGNEUR JÉSUS qui est allé jusqu'à l'extrême de l' AMOUR ! Lui seul a donné Sa Vie, de bout en bout, par
AMOUR de l'humanité Il a commencé par épouser cette humanité en S'anéantissant dans un corps d'homme épousant toutes ses limites, Il S'est livré aux mains des hommes jusqu'à mourir sur une croix pour élever cette humanité à la dignité de FILS de DIEU !Ayant plusieurs fois déjà « balbutié » car nous ne faisons qu'effleurer la Parole divine, balbutié cette péricope, je vous propose aujourd'hui un des nombreux poèmes où le P. Paul BAUDIQUEY évoque l'une des multiples facettes du véritable AMOUR, le seul capable de retourner le monde !
Ça veut dire quoi : Aimer ?
La question est redoutable.
Deux sortes de gens la posent :
Des gens « blessés » trop malheureux,
parce qu'ils ne sont pas
- parce qu'ils ne sont plus – aimés
et ça leur fait tellement mal
qu'ils ont envie de ricaner.
Et puis des gens heureux
qui n'en reviennent pas,
tellement c'est incroyable d'être aimé.
En dehors de ceux-là, il n'y a personne :
des morts-vivants,
hommes et femmes de peu de poids !
Car l'amour est un fardeau
il est très lourd à porter :
il nous met dans la dépendance
et nous n'aimons pas ça.
L'autre se met à compter, autant et plus que moi :
me voici dépourvu et mendiant..
Aimer , c'est prendre le risque
d'être « envoyé sur les roses »
On s'expose « au droit de réponse »
et celle-ci peut être parfaitement cruelle.
L'amour, en ce sens , est l'échec de Dieu,
avant même d'être le nôtre:
on n'est jamais sûr que l'autre répondra,
on est sans pouvoir sur sa liberté,
ses acquiescements et ses refus.
Aimer, ça ne va pas de soi,
et rien, jamais n'est gagné d'avance.
Il faut un intense, un incessant et toujours neuf
investissement de soi.
Un éveil, une vigilance que rien n'épuise,
que rien ne lasse.
L'amour n'est pas un instinct :
l'instinct est de s'emparer pour survivre.
L'amour est un don, plus obstiné, plus entêté,
que tous les désirs de survivre et de posséder.
On le dit « aveugle »
et il l'est malgré son absolue claire-voyance
car il demeure fermé
à toutes les bonnes raisons qu'on lui oppose,
à commencer par la soi-disant folie de sa déraison.
Dieu, Lui-même, se l'entend dire tous les jours,
Lui, qui supporte tout, tolère tout
et qui use si peu de sa « « toute-puissance »
pour mettre un peu d'ordre et châtier les coupables...
Un Père qui laisse tout faire, ça ressemble à quoi …
Que de mépris, de hargne et de haine on devine
à l'égard de tous ceux et celles
que ça n'intéresse pas d'avoir le dessus,
qui n'ont que faire d'être obéis au doigt et à l’œil,
inexorablement.
Ils déclenchent plus de réprobation
que les voleurs et les assassins.
Ils font justice de toute bonne conscience.
L'amour est un appel
à cette autre part de nous-mêmes
qui est vulnérable et sans défense.
Un appel totalement dépourvu
du pouvoir de s'imposer comme tel.
Il ne sait qu'attendre, patienter, espérer,
en pure perte de soi ,
en pur désir que l'autre s'attende à nous ,
s'éveille, consonne,
ouvre sa porte et nous accueille.
A tout refus il ne sait qu'opposer
l'obstination d'un don plus total.
Il est sans défense parce qu'il n'a rien à perdre
tout à attendre, à recevoir et à donner !
L'amour se prouve
autant qu'il s'éprouve
en aimant !
Aimer, c'est éprouver le goût de l'autre
et, d'abord, que l'autre a du goût :
il y a tant de gens « insipides ».
Tout d'un coup
- « coup de foudre » le bien nommé -
ou lentement,
quelqu'un se met à avoir un goût
que les autres n'ont pas.
Une impérieuse nécessité, un manque fondamental
se sont ainsi donné rendez-vous
pour nous tenir « par le bout du cœur »
La carapace vole en éclats ;
on devient fragile et comme blessé à vif :
on rêvait de se faire tout seul
et l'autre vous devient indispensable.
Il est beau ce cri de Prouhèze
à l'Ange qui lui demande de renoncer
en ce monde à ce Rodrigue
qu'elle aime plus que son âme :
« il ne saura donc jamais ce goût que j'ai ! »
Le goût de l'autre s'éprouve sur ses lèvres.
Le goût de l'autre embaume comme le parfum des terres .
Le goût de l'autre prend forme d'un visage :
tout l'univers se recompose en lui
et devient beau à n'y pas croire,
Le goût de l'autre a parfum de caresses,
le goût de l'autre est attente et prémices.
Le goût de l'autre est recueillement
et silence adorant,
retenue et respect, attente immobile.
Car le goût de l'autre échappe aussi
et fuit comme une eau vive.
Et c'est tant mieux,
car c'en serait fait et de lui et de moi,
si nous nous « tenions »
si nous nous appartenions.
S'appartenir : appartements, propriétés,
installations …
On n'entre pas en amour
comme on se met en ménage.
Il faut un lieu et la maison peut être ce lieu,
si elle est elle-même « acte d'amour » : demeure,
foyer et source.
Mais le propre de la source est justement
d'aller plus loin.
Aimer, c'est toujours aller plus loin...
Plus loin que les apparences,
plus loin que les déceptions,
plus loin que les lassitudes
plus loin que les solitudes.
L'amour est nomade.
Il parcourt le désert à la recherche d'un puits.
Il peuple le désert, le peuple de désir,
le peuple d'Espérance.
C'est en étant nomade que l'amour est fidèle,
fidèle à la quête inlassable de l'autre,
à la quête infatigable de l'autre et des autres.
Il va, d'étapes en étapes, accompagné des siens,
de ceux qu'Il a fondé et dont Il se reçoit.
Il sait faire halte dans l'innocence du jour ;
les oasis, comme une visitation de l'ombre
et de l'eau
Mais une urgence secrète lui enseigne à repartir
et la marche reprend à la rencontre d'inconnus,
comme autant de surprises.
En
dehors de cette souveraine liberté
du don et de l'accueil,l'amour ignore tout ; il ne veut rien savoir.
Il ouvre sur ce qui va venir :
l'amour et l'à-venir vont la main dans la main,
tournant résolument le dos au passé figé et clos.
Le passé n'est pas nié, ni oublié, car l'homme à l'égal de l'arbre,
ne peut pas vivre sans racines.
Mais les racines qui clouent au sol
sont point d'appui et sont tremplin ;
elles libèrent l'audacieux élan du tronc
et des ramures
et servent son désir de peupler l'espace
et d'étreindre le ciel.
L'Amour déplie : il donne à l'aimé
de s'ouvrir à tout son déploiement.
Il est le contraire même de l'enfermement,
à l'opposé de toute main-mise.
L'amour et la surprise iront toujours de pair :
ceux que nous aimons nous surprendront
toujours ;
ceux que nous aimons, nous étonneront toujours ;
ceux que nous aimons nous émerveillent encore.
L'Amour est porteur de lumière,
comme le visage qu'il anime et qu'il transfigure ;
on y voit luire la lumière du blé
et la flamme du vin .
L'Amour est un feu qui brûle sans se consumer,
qui mord profond, comme mord la flamme
dans la chair d'un quartier de hêtre,
éclatant de sa déchirure.
L'Amour est bûcheron des certitudes ;
Il s'entête au plus vrai
il sait porter ses coups..
L'Amour est vigneron : il sait nous vendanger.
Viendra le jour des Noces
dont l'attente nous consume :
aucune goutte, d'aucune grappe n'y sera oubliée,
aucune goutte d'aucune grappe n'y sera perdue .
Paul BAUDIQUEY ( Pleins signes-Cerf)
LE CHANT D'ASSISE
O mes bien-aimés, soyez humbles.
O mes bien-aimés soyez doux
. Ne vous inquiétez ni d’honneurs, ni de dignité, ni de louanges.
Fuyez les vanités. Toutes les vanités.
Et dites-vous que le savoir des anges
Ne suffit même pas pour comprendre ce qui de Dieu seul est compris
Ai m e z ! Aimez et ne jugez pas.
Si vous voyez une homme pécher mortellement,
haïssez le péché, mais ne jugez pas l’homme.
Ne le méprisez pas. Ne méprisez personne.
Car vous ne savez pas le jugement de Dieu.
Et tel semble damné qui est sauvé, peut-être.
Et tel semble sauvé qui est déjà damné.
Vous ne savez pas qui sont ceux à qui Dieu tendra la main.
Ô vous tous, gens de la terre, qui cheminez si douloureusement.
Ayez d’abord la Charité.
Aimez-vous les uns les autres.
Consolez-vous les uns les autres
Soutenez-vous les uns les autres.
Fût-on brûlé d’amour à en mourir.
On n’aime pas encore assez.
On n’aime jamais assez.
L’amour est tout qui est Dieu même.
Et que votre amour ne soit pas borné.
Car le Seigneur, mon Dieu, n’admet.
Ni vos frontières ni vos murs.
Christ a dit : Tu ne tueras point.
Je vous salue et vous bénis.
A Dieu, pour chacun d’entre vous, je demande.
La grâce de force pour renoncer le mal.
La grâce de Sérénité dans l’oblation.
La grâce de Joie dans l’épreuve.
Et que, par la vertu de la Croix acceptée.
Par la parole et par le sang de Jésus-Christ.
La terre enfin soit délivrée du mal. Amen! Amen !
Ainsi, sur Assise endormie.
Où le tombeau basilical si lourdement proclame.
Que son chant ne fut pas compris.
L’âme du petit pauvre.Chante inlassablement pour le salut des hommes.
ASSISE ! ASSISE ! ASSISE !
Capitale spirituelle du monde.
Lieu de l’amour et de la joie de l’Évangile.
Luira-t-elle jamais cette aube.
Où tous nos vains orgueils.
Où tous nos vains espoirs viendront, pieds nus, vers saint François.
Faire leur amende honorable !
AIMEZ ET NE JUGEZ PAS !
Léon Chancerel
L'Ermite
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