vendredi 13 mai 2022

COMME JE VOUS AI AIMES

 

CINQUIEME DIMANCHE


DE PÂQUES

Année C

(Jn 13, 31-33a.34-35)




Au cours du dernier repas que Jésus prenait avec ses disciples, quand Judas fut sorti du cénacle, Jésus déclara :« Maintenant le Fils de l’homme est glorifié,et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est glorifié en lui,Dieu aussi le glorifiera ;et il le glorifiera bientôt.

Nous avons souvent un peu de difficulté à bien comprendre le sens de la Gloire de Dieu, être glorifié, etc . Le Père DOMERGUE , un Jésuite décédé en 2015 en donne un aperçu que je trouve, pour ma part, remarquable, je vous le partage en mettant en caractères gras ce qui touche le plus :« Le thème de la gloire occupe une place considérable dans les deux Testaments et, par suite, dans la liturgie. C'est parce qu'il représente l'aboutissement de l’œuvre divine. Disons tout de suite qu'à l'instar de toutes les réalités qui veulent signifier ce qui se passe en Dieu et avec Dieu, cet accomplissement est «déjà là et pas encore» : avec la venue du Christ, «les temps sont accomplis», mais nous sommes pourtant dans l'attente de son retour, «à la fin des temps». Paul nous dit : «C'est en espérance que vous êtes sauvés». Mais n'oublions pas que l'espérance est certitude. Glorifier Dieu, lui «rendre gloire», c'est reconnaître dès maintenant qu'il est l'amour absolu, sans mélange ni réserve, un amour tel que nous avons à y croire sans pouvoir l'imaginer.

Mais n'oublions pas que l'espérance est certitude. Glorifier Dieu, lui «rendre gloire», c'est reconnaître dès maintenant qu'il est l'amour absolu, sans mélange ni réserve, un amour tel que nous avons à y croire sans pouvoir l'imaginer. De cet amour, nous n'avons qu'une preuve : le Christ, l'unique juste, la seule image du Dieu invisible, a donné sa vie pour les injustes, cette vie qui est vie divine et que ces injustes que nous sommes ont voulu lui prendre. En vain, car justement il a donné ce dont nous voulions nous emparer. Notre geste prédateur s'est doncretrouvé sans objet. On ne peut s'emparer de ce qui se donne : on ne peut que le recevoir. L'amour méconnu devient donc connaissable. Le thème de la gloire comporte cet aspect de connaissance et de reconnaissance de notre part : rendre gloire à Dieu c'est, dans la foi, proclamer qu'il est amour et seulement amour. «Rendre gloire» : ce verbe «rendre» signifie que le don précède notre louange, qui est expressive de notre retour à Dieu, notre source. Nous rendons ce que nous recevons pour que cela nous soit redonné : l'échange ne s'interrompt pas. En Genèse 28,12, Jacob voit les «Anges» descendre vers lui et remonter vers Dieu sur l'échelle qui unit la terre au ciel.

Habités par la gloire de Dieu

La gloire de Dieu vient nous visiter, nous sommes nous aussi «glorifiés». Comment cela ? Bien sûr, dans le Christ. C'est le «Fils de l'homme», le fruit ultime de l'humanité, qui va être glorifié. Nous sommes appelés à ne faire qu'un avec lui, à devenir son «corps». Ainsi, la gloire de Dieu remplira l'univers et cela signifie que l'amour, cet autre nom de Dieu, habitera toute chose. Il faudra beaucoup de temps pour que tous les hommes lui ouvrent leur porte. «Les temps sont accomplis» signifie que tout nous est déjà donné dans le Christ, mais ce «tout» ne peut devenir nôtre sans notre assentiment. En attendant, le Fils de l'homme va anticiper ce terme en donnant sa vie, faisant ainsi totalement corps avec l'Amour qui fonde toute chose et que nous appelons «Dieu». Là, à la Pâque, ce que nous appelons «Incarnation» est achevé et le Fils, devenu pleinement humanité et lourd de tous les hommes, entre dans cette gloire qui est le rayonnement de Dieu. N'allons donc pas chercher la gloire de Dieu trop loin ni trop haut : elle est là, la terre en est pleine ; elle nous habite. Bien sûr, nous ne pouvons en prendre conscience que par la foi. Nous sommes habitués à voir le soleil se lever, les saisons se succéder, les moissons abonder, la vie s'engendrer, et nous pensons en avoir dit le dernier mot en qualifiant tout cela de «phénomènes naturels». Nous avons raison, mais la foi nous donne accès à la face cachée de la nature, à la gloire qui la fonde. Comme le Christ qui va être «glorifié», et en lui, la nature vit en passant par la mort en vue d'une renaissance. La gloire a le dernier mot.

L'amour, présence du Christ

Nous pouvons être surpris d'entendre Jésus dire à ses disciples « Je suis encore avec vous mais pour peu de temps… » Et il insiste : « Vous me chercherez et, comme je l'ai dit aux Juifs, où je vais vous ne pouvez venir, je vous le dis à vous aussi maintenant » (passage omis dans le Missel). De fait, il devra traverser seul sa Passion. Mais il y a plus : désormais Jésus ne sera plus à portée de leurs mains et de leurs yeux ; ils n'entendront plus directement sa parole. Cela signifie-t-il qu'il ne leur sera plus présent ? Certainement pas ! Souvenons-nous de ses derniers mots selon Matthieu : « Je suis

avec vous toujours jusqu'à la fin du monde. » Bien d'autres passages nous disent cette proximité du Christ ressuscité : nous ne faisons qu'un avec lui. Le discours après le dernier repas, d'où est tiré notre évangile, le répète sous diverses formes. Cette insistance signifie d'ailleurs que cela ne saute pas aux yeux : la présence du Christ, répétons-le, ne sera désormais perceptible que par la foi. De plus, elle ne se réalisera qu'à travers les autres ou, plus exactement, elle nous habitera quand nous accepterons de nous unir à eux pour ne former qu'un seul corps. Ce corps deviendra alors son Corps. Rappelons Matthieu 18,20 : « Là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis là au milieu d'eux » (voir aussi Jean 14, 23). Tout cela est en pleine cohérence avec le « commandement nouveau » que donne le Christ à la suite de l'annonce de son départ : c'est l'amour qui construit le Corps. Quand l'amour est là, Dieu est là ; le Christ est là. La Trinité ne nous dit-elle pas déjà que Dieu est relations ? L'amour est ce qui relie et allie. Dieu est cela. »

Et c'est parce que l'AMOUR, - mais pas l'amour frelaté, l'AMOUR sain et saint, l'AMOUR fort, vrai,- construit le monde que Jésus en fait un commandement !

Petits enfants,c’est pour peu de temps encore que je suis avec vous.Je vous donne un commandement nouveau :c’est de vous aimer les uns les autres.
Comme je vous ai aimés,vous aussi aimez-vous les uns les autres. À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples :si vous avez de l’amour les uns pour les autres. »

Au moment de remonter vers le Père, dont le NOM est AMOUR, que pouvait direJésus à Ses disciples sinon leur demander avec la force d'un commandement de s'aimer ; dans ce commandement, je perçois trois niveaux :

    1 .Je vous donne un commandement nouveau :c’est de vous aimer les uns les autres

    2. Comme je vous ai aimés,vous aussi aimez-vous les uns les autres.

    3. À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples :si vous avez de l’amour les uns pour les autres. »

Je vous donne un commandement nouveau :c’est de vous aimer les uns les autres En réalité jusque là, rien de nouveau. Nous trouvons en effet, dans le Lévitique :Tu ne te vengeras pas. Tu ne garderas pas de rancune contre les fils de ton peuple. Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Je suis le Seigneur (Lv 19)

Le Lévitique est un recueil de lois, il comporte un recueil indépendant (Lv 10-16) dont la date de compilation doit remonter au VIème siècle,( avant le Christ) tandis que la rédaction de Lv 17-26 se situe vers l'Exil (influence du Deutéronome et surtout d’Ézéchiel). Écrit dans le courant sacerdotal, on ne s'étonne pas de n'y trouver que des applications propres à la liturgie et à une conduite moralement conforme au culte. Jésus citera le Lévitique dans une interprétation large du "tu aimeras Dieu et ton prochain".

Toujours au Chapitre 19 de ce même document nous trouvons : « cet émigré installé chez vous, vous le traiterez comme un indigène, comme l'un de vous; tu l'aimeras comme toi-même; car vous-mêmes avez été des émigrés dans le pays d'Égypte. C'est moi, le Seigneur, votre Dieu. » (Lv 19)

A coup sûr c'est au second niveau que nous trouvons la nouveauté évoquée par Jésus :Comme je vous ai aimés,vous aussi aimez-vous les uns les autres.Dans l'Ancienne Alliance il nous est demandé d'aimer Dieu et d'aimer nos frères. Le Livre du Deutéronome en fait un principe vital et propose même un moyen quasi mnémotechnique pour s'imprégner de cet amour et lui permettre de perdurer à travers les générations :Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de

toute ta force. Ces commandements que je te donne aujourd'hui resteront dans ton cœur. Tu les rediras à tes fils, tu les répéteras sans cesse, à la maison ou en voyage, que tu sois couché ou que tu sois levé ; tu les attacheras à ton poignet comme un signe, tu les fixeras comme une marque sur ton front, tu les inscriras à l'entrée de ta maison et aux portes de tes villes. (Dt 6) Jésus va encore plus loin , Il en fait un devoir de conformité à Sa propre Personne : « comme je vous ai aimés ! » Dit autrement, je vous ai tout donné, j'ai vécu en pauvre et en serviteur au milieu de vous, je n'ai fait aucune différence entre les personnes, en refusant toute forme de compromission, tout ce que j'ai reçu de mon Père je vous l'ai donné, je vous ai appris à ne pas répondre au méchant, à vivre dans la justice et la vérité ...je ne me suis pas révolté, j'ai respecté votre liberté jusqu'à accepter la trahison et tout ce que cet acte a induit , cela par amour et seulement par amour. C'est donc ainsi qu'à votre tour vous devez aimer et dans quel but ? Si vous voulez être mes disciples c'est en devenant d'autres moi-même :

À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples :si vous avez de l’amour les

uns pour les autres. Un amour qui va jusqu'à donner sa vie, les saints l'ont fait, et nous sommes appelés à la sainteté. Pensons à Thérèse de l'Enfant Jésus qui a aimé au point qu'une sœur acariâtre et aigrie s'étonnait de l'intérêt que lui portait cette jeune religieuse qui, en réalité menait un combat terrible pour dépasser ses propres répulsions et ne lui offrir que son amour !

Je me souviens de ce saint prêtre, émule du Saint Curé d'Ars, dont l'organiste était terriblement jalouse, possessive, violente dans son verbe et dans ses actions...ce saint prêtre prenait tellement sur lui pour ne rien ajouter aux blessures de cette personne qu'il en faisait de terribles crises de foie. Jamais il ne s'est plaint, jamais il ne l'a bousculée ou rembarrée.

Oui c'est à l'amour que nous avons les uns pour les autres que nous pourrons manifester l'amour du Christ . Il serait bon et judicieux de lire, relire, et lire encore , pour nous en imprégner cet extraordinaire chapitre 13 de la Première lettre de Saint Paul aux Corinthiens en remplaçant le terme « charité » par celui d'amour, le premier (Charité) étant parfois chargé de consonances caricaturales

LECTURE DE LE PREMIERE LETTRE DE SAINT PAUL AUX CORINTHIENS

Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas la l'amour, je suis un airain qui résonne ou une cymbale qui retentit. Quand j'aurais le don de prophétie, que je connaîtrais tous les mystères, et que je posséderais toute science; quand j'aurais même toute la foi, jusqu'à transporter des montagnes, si je n'ai pas l'amour, je ne suis rien.Quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais mon corps aux flammes, si je n'ai pas l'amour, tout cela ne me sert de rien

L'amour est patient, il est bon; l'amour n'est pas envieux, l'amour n'est point inconsidéré, il ne s'enfle point d'orgueil; il ne fait rien d'inconvenant, il ne cherche point son intérêt, il ne s'irrite point, il ne tient pas compte du mal;il ne prend pas plaisir à l'injustice, mais il se réjouit de la vérité; il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout.

L'amour ne passera jamais. S'agit-il des prophéties, elles prendront fin; des langues, elles cesseront; de la science, elle aura son terme. Car nous ne connaissons qu'en partie, et nous ne prophétisons qu'en partie; or, quand sera venu ce qui est parfait, ce qui est partiel prendra fin. Lorsque j'étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant; lorsque je suis devenu homme, j'ai laissé là ce qui était de l'enfant. Maintenant nous voyons dans un miroir, d'une manière obscure, mais alors nous verrons face à face; aujourd'hui je connais en partie, mais alors je connaîtrai comme je suis connu. Maintenant ces trois choses demeurent: la foi, l'espérance, l'amour; mais la plus grande des trois c'est l'amour- charité.

N'ayons pas peur,c'est possible si nous nous livrons à l'Esprit d'Amour qui vit et agit en nous depuis notre Baptême, c'est Lui, qui nous rend capables d'aimer COMME Jésus nous aime !


L'Ermite

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