vendredi 22 octobre 2021

TA FOI T'A SAUVE


XXX e DIMANCHE


DU TEMPS ORDINAIRE


Année B


(Mc 10, 46b-52)



Tandis que Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une foule nombreuse, Jéricho vient du nom hébreu : lune (« jareah »). Jéricho est donc la ‘ville de la lune en hébreu. Or la lune croît et décroît, elle change sans cesse (par opposition au soleil) : elle est devenue dans le monde de Jésus le symbole de la disparition et du déclin. L’évangéliste Marc précise bien que Jésus sort de Jéricho avec ses disciples : symboliquement c’est l’invitation à sortir de nos déclins, à ne pas se résigner à la disparition.

Sortir de Jéricho est aussi l’invitation à quitter nos déclins intérieurs : lorsque décline notre soif de Dieu, notre soif de vivre ; lorsque baisse l’intensité de notre amour pour Dieu, l’intensité de notre amour pour les autres, sortons de ces Jérichos-là avec le Christ ! Quittons nos logiques dépressives...

D’autant plus que Jésus se met en route vers Jérusalem : autre nom symbolique.

Yerou-shalaïm : la ville de la paix (shalom) ou de la plénitude (shelemout). Jésus passe de Jéricho à Jérusalem : il nous fait passer avec lui du déclin à la paix, de la disparition à la plénitude… (notes)

le fils de Timée, Bartimée, un aveugle qui mendiait, était assis au bord du chemin.   Quand il entendit que c’était Jésus de Nazareth, il se mit à crier :« Fils de David, Jésus,prends pitié de moi ! » Deux autres noms ont toute leur importance dans ce texte : « Bar-timée »et « fils de David ».

C’est tellement important que Marc précise : « Bar-Timée » c’est le fils de Timée. Or

Timée vient d’une racine grecque qui signifie : « châtiment ». Bar-Timée est donc le fils du châtiment ; ce que traduit bien hélas sa condition d’aveugle, puisqu’à l’époque beaucoup croyaient que la cécité était un châtiment de Dieu (ce que Jésus ne cessera de dénoncer).

Le fils de Timée croise le « fils de David ». Et David veut dire : « Bien Aimé ». Voici donc que le fils du châtiment rencontre le fils Bien Aimé !

Choc terrible : qui va l’emporter : la peur du châtiment ou la foi en la puissance de l’amour ?

La peur ou la foi ? : dilemme terriblement actuel…

Lorsque des intégristes religieux de tous bords voudraient revenir à la peur comme moteur  de la conversion vers Dieu.

Lorsque les questions de violence sociale (dans nos écoles ou nos cités…) risquent d’être instrumentalisées dans les débats politiques.

Les Évêques français appellent depuis longtemps à revaloriser la famille comme lieu primordial  d’éducation à la confiance : « la famille est le premier lieu où les hommes et les femmes apprennent la confiance en eux-mêmes et la confiance dans les autres » (Message du 18/10/2006).(notes)

La scène est simple : Jésus sort de Jéricho entourée d'une foule nombreuse qui L'accompagne en route pour Jérusalem. Assis au bord du chemin, un aveugle, Bartimée, dont le nom signifie « fils de Timée » mendie pour survivre.

On ne prenait guère le nom de son père que lorsque celui-ci avait occupé un certain rang dans la société. Il semblerait que Bartimée était né dans une position bien différente de celle où il se trouvait à ce moment-là. C'est peut-être à cause de cela que Marc ne fait mention que de lui, bien qu'il y eût là, deux aveugles en même temps !

Cet épisode est raconté par les trois évangélistes, et c'est Matthieu qui évoque deux aveugles : « Comme ils sortaient de Jéricho, une foule nombreuse le suivit. Et voici que deux aveugles, assis sur le bord du chemin, entendant dire que Jésus passait, se mirent à crier » (Mt 20) l’apôtre Matthieu qui a été témoin de la guérison, n’a pu se tromper ; Marc et Luc, qui n’y ont pas assisté, parlent de celui dont il a été le plus question, qui paraît avoir porté la parole, et qui a le plus frappé : c’est Bartimée.

Beaucoup de gens le rabrouaient pour le faire taire, mais il criait de plus belle :« Fils de David, prends pitié de moi ! »

Bartimée porte douloureusement son handicap, on le comprend ! Quand il entend que Jésus est là, il s'agite, veut Le rencontrer, mais la foule le trouve importun et tente de le faire taire, lui, crie plus fort encore , il résiste,il doit à tout prix attirer l'attention de Jésus !

Nous avons compassion de cet homme en détresse, là de loin, cette foule nous répugne et pourtant ,nous en faisons partie hélas ! Ne nous dédouanons pas trop vite , réfléchissons plutôt à nos comportements . N'avons-nous pas vite fait d'exclure tel et tel parce qu'il dérange, parce qu'il nous gêne, parce qu'il n'est pas du même bord que nous , parce que ...

 Jésus s’arrête voilà Jésus ! Quand Jésus entend cette souffrance, notre souffrance Il s'arrête , non pour ignorer, pour rabrouer, mais pour nous prendre sur Ses épaules , encore faut-il que nous sachions L'appeler au secours, que nous acceptions d'être aidés, que nous le désirions de tout notre cœur , que nous criions avec confiance « aie pitié de moi » « viens à mon aide » ! À mon secours ! Non pas comme une leçon apprise, mais du fond de notre cœur , avec « nos tripes » si vous me permettez cette expression familière. Parce que nous croyons vraiment du fond de notre être, avec toutes les fibres de notre être, que Jésus est notre seul Sauveur, n'est-ce pas le sens de son nom ?

Jésus s’arrête et dit : Jésus parle à Bartimée, Jésus parle tout au fond de notre cœur, est-ce que nous L'entendons dans le brouhaha de nos vies, est-ce que nous savons nous taire pour entendre une autre voix que la nôtre ? Sommes-nous capables de faire silence quelques instants pour entendre cette voix aimante qui ne veut que notre bien, ou continuons-nous de nous étourdir ?

Jésus s’arrête et dit :« Appelez-le. » Comme il est intéressant ce constater lapédagogie de Jésus : Jésus demande à ceux qui veulent éloigner cet homme dérangeant de participer à sa guérison. Jésus aurait pu fendre la foule avec détermination pour s'approcher de cet homme. Non ! Jésus , sans faire de morale à qui que ce soit, transforme les opposants en collaborateurs de Son œuvre de Salut ! Ceux qui excluaient, sont invités à transmettre la merveilleuse nouvelle ce qu'ils font sans sourciller :On appelle donc l’aveugle, et on lui dit :« Confiance, lève-toi ; il t’appelle. » 

Non seulement la foule appelle l'aveugle, mais du rejet, elle en vient à l'inviter à la confiance puisque le voilà appelé donc invité ! Quel retournement ! En appelant Bartimée Jésus appelle sans en avoir l'air, tous ceux qui sont présents, à changer de regard. Aucun discours de la part de Jésus, et pourtant, une invitation pour chacun à se laisser rencontrer. Cette invitation nous rejoint également,  sommes-nous suffisamment attentifs pour percevoir les appels ténus et pourtant bien réels du Seigneur dans nos vies ? Quand Jésus nous appelle personnellement, si nous obtempérons c'est tout une foule qui peut être mise en mouvement aujourd'hui et dans la suite des temps !

L’aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus.Trois verbes d'action en réponse à cet appel : jeta ! Bondit ! Courut !

Jeta : Bartimée, sans plus attendre , se libère de ce qui l'encombre : ce manteau qui entrave son élan physiquement et spirituellement et socialement ! Physiquement ce manteau entrave ses mouvements et ralentit son élan.

Spirituellement, ce manteau l'enferme dans son statut de personne handicapée et réduit son activité

Socialement ce manteau est un peu son identité , c'est ainsi qu'il est connu et reconnu par les passants : « celui-qui-porte-un-grand-manteau-assis-sur- le -chemin- et-qui-demande-l'aumône » ! Puissions-nous, nous délester de tout ce qui encombre et ralentit notre marche avec Jésus!

Bondit : c'est un peu comme s'il a déjà recouvré la vue. Jésus s'intéresse à lui, il bondit comme un cabri. A ceux qui voient de s'écarter, sa joie explose, Bartimée fonce vers une voix pour rencontrer ce Fils de David dont il entend dire tant de bien ! Est-ce que je bondis quand le Seigneur m'appelle par l'intermédiaire d'une soeur, d'un frère, d'une motion intérieure ?

Courut il ne marche pas en tâtonnant comme habituellement, le voilà qui court dans la direction d'où vient la voix ! Ordinairement il lui faut du temps pour aller d'un point à un autre : peur de tomber, peur de bousculer quelqu'un, peur de se tromper de chemin ! Sa démarche est hésitante ! En cet instant, tout est oublié Bartimée court,( est-ce que je cours lorsque j'entends la voix du Seigneur ?)  s'élance vers cette Rencontre qui va changer sa vie, rien ne peut l'arrêter, sinon la voix de Jésus qui reprend la parole :

   Prenant la parole, Jésus lui dit :« Que veux-tu que je fasse pour toi ? » Jésus, quant à Lui, n'impose rien ! Il veut entendre de la bouche de Bartimée son attente précise .Jésus ne se substitue pas à nous Il souhaite que Bartimée, chacun de nous , expose son besoin. Jésus connaît toutes nos attentes , cependant Il nous permet d'exercer notre discernement, en nous laissant choisir ! Bartimée nourrit bien des attentes : un toit, des subsides pour vivre dignement, mais le plus important pour lui, n'est-ce pas de trouver son autonomie, d'être utile à la société et de se rendre utile. S'il reçoit la guérison de sa cécité, il ne sera plus au bord d'un chemin à attendre que des passants lui accordent une piécette. Il pourra gagner sa vie, soutenir les autres, se prendre en charge décemment. Jaillit alors sa demande, directe , sans discours inutile :

« Rabbouni, que je retrouve la vue ! » Bartimée n'a jamais vu Jésus puisqu'il est

aveugle, mais il écoute, il entend ce que disent les gens autour de lui, même en marge de cette société qui le laisse sur le bord de la route, il s'est forgé une idée de la personne. Certains l'appellent « Maître » Rabbi ! Bartimée, avec certains autres, introduit cette nuance affective qui révèle dés cet instant la tendresse qu'il éprouve pour l'homme Jésus : Rabbouni ! Il établit immédiatement une nuance de tendresse et demande, non d'être assisté, mais de pouvoir se prendre en charge en recouvrant la vue. En retrouvant la vue, sa vie sera renouvelée, il pourra nourrir des projets, s'organiser, travailler, intégrer la société, s'y faire une place. Non plus celle d'un aveugle assis au bord d'un chemin mais celle d'un homme libre, autonome, il rêve à cet  « a-venir », de cet « à-venir » tout se bouscule dans son esprit, seule , la voix du Rabbouni peut le rappeler à la réalité :

« Va, ta foi t’a sauvé. » il y a de quoi être renversé comme l'ont été les trois apôtres lors de la Transfiguration ! Bartimée a simplement exposé son attente et le voilà non seulement guéri, (nous trouvons cela dans la suite du verset) mais sauvé, le salut promis est entré dans la maison de son cœur parce qu'il a sincèrement reconnu en Jésus, son Sauveur, Celui qui pouvait le tirer de son marasme , de sa vie improductive, et le propulser vers une vie de service, de don de soi !

Aussitôt l’homme retrouva la vue, et il suivait Jésus sur le chemin. Bartimée ne cherche pas à récupérer son vieux manteau, son escarcelle, sa canne d'aveugle, Bartimée guéri entre dans le peuple de l'Alliance il se met en marche à la suite de Jésus ! Alors, oui Bartimée peut changer sa ritournelle, de « Fils de David, aie pitié de moi, il peut reprendre à son compte la première lecture du jour :


 Poussez des cris de joie pour Jacob,

acclamez la première des nations !
Faites résonner vos louanges et criez tous :
« Seigneur, sauve ton peuple,
le reste d’Israël ! »
    Voici que je les fais revenir du pays du nord,
que je les rassemble des confins de la terre ;
parmi eux, tous ensemble, l’aveugle et le boiteux,

la femme enceinte et la jeune accouchée :

c’est une grande assemblée qui revient.
    Ils avancent dans les pleurs et les supplications,
je les mène, je les conduis vers les cours d’eau
par un droit chemin où ils ne trébucheront pas.
Car je suis un père pour Israël,
Éphraïm est mon fils aîné

L'Ermite

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