vendredi 3 mars 2017

SI TU ES CAP !

PREMIER DIMANCHE DE CAREME
(Mt 4, 1-11)

QUARANTE JOURS ET QUARANTE NUITS AU DESERT


Essayons de réaliser, sérieusement , ce que cela représente de ne rien prendre de substantiel durant une aussi longue période !
Essayons de ressentir toutes les envies qu'un tel choix peut développer dans notre être, tous les « si » qui monteraient et s'installeraient dans notre esprit !
Essayons d'éprouver tous les maux, réels ou imaginaires qui iraient grandissant , dans notre organisme !
Laissons-nous alors, approcher par cet être insidieux qui en veut à notre intégrité, comme il en voulait à celle de Job. Job, à ce moment-là, était en pleine possession de ses capacités, nous, après quarante jours et quarante nuits de totales privations, serions réduits à une extrême fatigue, assoiffés, affamés, éprouvés dans toutes nos facultés . Et voilà que ce Dominateur ricanant, se contorsionnant, provocateur à souhait, nous frôle et susurre à notre oreille épuisée : « es-tu cap ? »
Touchés à vif, nous nous redresserions, et que ferions-nous ? Répondre ici, à la place de chacun serait présomptueux de ma part , autant de personnes, autant de réactions différentes ...il n'est pas inutile de nous attarder à cette réflexion pour tenter d'appréhender le vécu de Jésus, vrai homme, Verbe incarné, venu prendre sur Lui, en Lui, toutes notre humanité.
Jésus, n'a pas fait semblant ! Jésus a connu en tant qu'homme ce tiraillement de la faim, de la soif, des envies, de l'épuisement et quand l’Insidieux vient et fait miroiter de quoi combler immédiatement Ses manques, et Jésus ne flanche pas !
Le Sournois commence par camper le tableau :« Si tu es Fils de Dieu, » ( si tu es cap!) prouve-le ! La tentation est insondable ! Démontrer d'un coup de baguette magique, « oui JE SUIS LE FILS DE DIEU, JE SUIS DIEU » et je vais te le montrer, te le prouver ! Peut-être pensons-nous qu'en répondant positivement à cette provocation Jésus se serait libérer d'un interlocuteur bien gênant ! Mais Jésus, Sagesse éternelle du Père, sait qu'en entrant dans cette provocation, c'est l'escalade, et qu' Il n'en finira pas .
De plus, la suggestion du Rusé, est fallacieuse, une telle démonstration de puissance, serait de pur orgueil, même épuisé, Jésus peut, tant bien que mal, aller se procurer du pain chez des amis. Changer des pierres en pain : «  ordonne que ces pierres deviennent des pains. » serait vouloir prouver Ses capacités, Ses pouvoirs, et mettre en évidence ce dont l'habile Maléfique n'est pas sûr à cent pour cent , à savoir : la divinité de Jésus ! Jésus n'a rien à prouver, rien à démonter, rien à faire valoir, Il est venu pour révéler l'Amour du Père Il renvoie donc ce fourbe à l’Écriture Sainte : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain,mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » Jésus le renvoie à l'essentiel, le pain est utile et nécessaire mais la Parole de Dieu est indispensable, c'est une nourriture supérieure qui entretient, nourrit , développe la vie de l'esprit. Jésus lui révèle que le matériel est soumis au spirituel qui lui est supérieur. Jésus répond sans éclat ni de voix, ni gesticulations, Il remet le Provocateur à sa juste place, et se situe au-dessus d'une hasardeuse polémique.
Alors, ce chafouin ne lâche pas prise , Il déplace Jésus jusque sur le sommet du Temple dans la ville Sainte et reprend sa rengaine « Si tu es Fils de Dieu, »

« Si tu es Fils de Dieu,
jette-toi en bas ;
car il est écrit :
Il donnera pour toi des ordres à ses anges,
et :   
 Ils te porteront sur leurs mains,
de peur que ton pied ne heurte une pierre.
 »


Je le vois, gesticulant, grimaçant, ronronnant , pour convaincre Jésus d'un fol exploit, qui pourrait épater les foules qui Le porteraient en triomphe, sans négliger les courbettes, les cris de gloire...ce à quoi nous cédons si facilement et, quand nous cédons, au terme, c'est la mort infâme assurée. N'est-ce pas ce qui , aujourd'hui comme hier leurre des quantités de personnes ?
Nos jeunes actuellement qui se laissent dévoyer par des appels intempestifs au jihad. Ils seront martyrs ! Et les familles pleurent, et ces jeunes disparaissent pour un néant !
Nos adultes ici et là qui rêvent de gloire, pas de service, non, c'est trop humble ! (Serviteur ? Mais c'est s'abaisser!) De gloire ! et, pour y parvenir cèdent à toutes sortes de sollicitations de l'argent, de la chair, de la domination et deviennent des bourreaux pour leurs semblables ( je n'ose pas dire leurs frères), parfois des meurtriers, pour se tailler une place au soleil, en éliminant discrètement, celui qui fait de l'ombre ! Et cela, aujourd'hui, dans nos sociétés dites civilisées. Et n'allons pas croire trop vite que nous sommes purs de toute velléité du genre, il y a tellement de façons d'épater ses frères !
Jésus ne vient pas épater par des tours de magie ou/et de passe-passe, Jésus vient soigner, guérir, libérer, éclairer, en un mot : Jésus vient justement « sauver ce qui était perdu ». Jésus ne vient pas en remontrer, Il ne vient pas démontrer, Il vient s'agenouiller à nos pieds, Il vient nous laver :  : « Alors, Seigneur, pas seulement les pieds,lui dira Pierre, mais aussi les mains et la tête ! » (Jean 13)

Jésus lui déclara :(Au Maléfique)
« Il est encore écrit :

Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »

Là, notre Bourreau, devrait avoir « le bec fermé »,il ne peut plus se poser de questions , il ne peut plus tergiverser, Celui à qui il vient se mesurer, n'est autre que Dieu Lui-même, enveloppé dans l'homme ! Et malgré cela, ce dévoyé, ce perturbateur, continue son escalade, et il fait cela depuis des siècles et des siècles, en ronronnant dans le cœur des humains qui , à la différence de Jésus, se laissent attirer par toutes sortes de glorioles pour briller, pour épater, ébahir, bluffer, pour démontrer leur supériorité, leur savoir faire et leur savoir être ! Vraisemblablement ce « tordu » est sourd et aveugle, pas du tout muet puisqu'il ose renchérir, il va jusqu'à l'extrême, et il agit de même dans nos vies mais nous sommes tellement infatués, parfois anesthésiés, que nous ne le voyons plus ! Jésus ne l'a pas cloué , il persévère :

Le diable l’emmène encore sur une très haute montagne
et lui montre tous les royaumes du monde et leur gloire.
    Il lui dit :
« Tout cela, je te le donnerai,
si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi. »


Pouvoir, savoir, AVOIR , donc posséder et être possédé, devenir « la chose » du matériel, l'esclave de l'argent, l'esclave des biens de ce monde ! Ah, posséder ! Et je pense à une connaissance, le doigt tendu, me disant, face à un espace dont on ne voyait pas le bout, et devant sa fille : «  Ça, puis ça, et encore cela et ...c'est à nous ! » Sa fille tentait vainement de lui montrer la vanité de ses propos ...dans les mois qui ont suivi, hélas, cette personne s'est retrouvée dans une structure spécialisée parce qu'elle avait sombré dans la nuit de l'esprit ! Posséder le monde demeure un rêve mais : « que sert à l'homme de gagner l'univers s'il vient à perdre son âme ? » Lc 9. « Que sert à l'homme de parler la langue des anges, d'avoir une foi à transporter les montagnes, de distribuer tous ses biens de livrer son corps aux flammes, s'il lui manque l'amour ? » Cor13

« Tout cela, je te le donnerai,
si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi. »


L'aveuglement du Maléfique est démesuré ! Ses prétentions sont ridicules ! Et pourtant, il ose, il tente le tout pour le tout, il n'a rien puisque tout est à Dieu, et il veut s'approprier un bien qui ne lui appartient pas pour le donner à Dieu, c'est un comble ! On appelle cela de l'usurpation ! Ne crions pas trop vite au scandale car il peut nous arriver d'utiliser le bien d'autrui à un enrichissement personnel parfois en donnant à ces actes une apparente noblesse de cœur ! Car si nous entrouvrons notre porte au Rusé il nous entraîne, sans défaillir, vers un libertinage nauséabond ! Ici nous grappillons un bout de terrain, là nous nous cueillons quelques fruits dans le champ du voisin, il en a tellement , ailleurs ...et ainsi de suite, c'est insidieux et bien réel, nous perdons toute notion du juste, du vrai, du bon , du noble …
Jésus,ici, va monter d'un cran, Il ne craint pas d'identifier son interlo-cuteur, gardant le même calme, le même ton Jésus le révèle à lui-même :

« Arrière, Satan !
car il est écrit :
C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras,
à lui seul tu rendras un culte.
 »

Aïe ! Arrière, Satan ! C'est lui dire je sais qui tu es ! Je ne tremble pas devant toi ! Un seul a droit au culte d'adoration : « le Seigneur Dieu » Saurons-nous entendre cette affirmation de Jésus ? Saurons-nous l'accueillir dans notre vie à une époque où nous adorons tout et n'importe quoi ? Cette réalité est à ce point banalisée que nous adorons le chocolat, l'argent, les femmes, les chaussures, les ...Pensons-nous ce que nous disons ? Sommes-nous attentifs en usant et abusant du vocabulaire ?
Et saurons-nous, durant ce temps que nous offre l’Église pour nous tourner vers le Père, rester sereins et dire, dans une confiance tranquille, « Arrière Satan » , à toutes les sollicitations que notre société déploie pour nous étourdir , et nous éloigner subrepticement de notre engagement baptismal ? Alors ce Tortueux se comportera comme aves Jésus :
le diable le quitte.
Et voici que des anges s’approchèrent,
et ils le servaient.
Chers amis, prions vraiment, avec force, les uns pour les autres afin de nous laisser toucher, transformer, purifier par ce Dieu de tendresse et d'amour ! « Tout âme qui s'élève, élève le monde » écrivait Ste Élisabeth de la Trinité je crois, alors soyons, devenons de ceux-là ! Le diable n'aura plus de prise , il s'éloignera, et les anges nous serviront pour la plus grande gloire de Dieu !
Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint.


P.S Veuillez m'excuser si cette méditation est un peu moins travaillée , le Seigneur m'a demandé de me faire proche durant toute cette semaine de la Sœur du monastère voisin qui accompagnait depuis quatre ans sa compagne « grabataire ». Cette dernière est entrée dans la paix de Dieu le 28 février et nous avons célébré ses obsèques, ce matin.



L'Ermite

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire