vendredi 10 mars 2017

ECOUTEZ-LE

DEUXIEME DIMANCHE DE CARÊME
Mt 17, 5

Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère,
et il les emmena à l’écart, sur une haute montagne.

Pourquoi ces trois et pas les autres ? Telle est sans doute la question qui encombre notre esprit ! Oui, pourquoi eux seulement ? Nous ne pouvons faire que des suppositions hasardeuses, Jésus, Lui, sait pourquoi.
L'intensité de ce qui suivra réclame sans nul doute, un climat de silence et d'intimité. Pierre, par ailleurs, est désigné et reconnu depuis peu, comme le successeur de Jésus : « moi, je te dis que tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. » (Matthieu 16). Jean, quant à lui, sera présent aux côtés de Jésus, au pied de la croix, où Jésus lui confiera Sa Mère et, en la personne de Jean, qui représente l'humanité, nous confiera à sa mère ! « Jésus ayant vu sa mère, et auprès d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère: "Femme, voilà votre fils." 27 Ensuite il dit au disciple: "Voilà votre mère." Et depuis cette heure-là, le disciple la prit chez lui. » (Jean 19) Et, nous le savons Dieu est libre de Ses dons, mais Ses dons ne sont pas anodins, ils engendrent une responsabilité ! Pour Jacques, je ne sais pas !
Toutefois, un témoignage est crédible, dans la mesure où trois personnes disent avoir vu et entendu la même chose ! Un seul peut être pris pour un illuminé, deux risquent de se monter la tête, le troisième permet d'être pris au sérieux !
Tous, il y a peu de temps, ont entendu la première annonce de la Passion :
« Jésus commença depuis lors à déclarer à ses disciples qu'il fallait qu'il allât à Jérusalem, qu'il souffrît beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, qu'il fût mis à mort et qu'il ressuscitât le troisième jour. » (Matthieu 16) alors que Pierre, au nom de tous vient de déclarer : " Vous êtes le Christ, le Fils du Dieu vivant. (Matthieu 16) Le contexte est alourdi , le moral des troupes a besoin d'être relevé et les apôtres soudés, alors, Jésus invite ceux, du moins en ce qui concerne Pierre et Jean qui seront confrontés plus étroitement au drame de la Passion, au reniement pour Pierre et Jacques peut être ce tiers qui, le moment venu, confirmera cette expérience unique, révélatrice du mystère du Christ !
Où Jésus entraîne-t-Il ses amis ? « sur une haute montagne. » N'est-ce pas sur une montagne, le Mont Sinaï, que Moïse bénéficie de ce privilège extraordinaire de converser avec son Dieu ? Moïse, lui, devra se voiler le visage, tellement la Lumière « qui est Dieu, » l'éblouit et irradie d'ailleurs son propre visage.
La montagne est aussi un lieu recherché par Jésus pour s'y recueillir, pour converser sereinement avec son Père. C'est aussi sur la montagne qu'Il entraîne ses apôtres pour leur offrir un peu de repos, c'est sur la montagne qu'Il proclame les béatitudes...Jésus est un familier de ces lieux de recueillement qui lui offrent solitude, silence, paix .
Et n'est-ce pas sur le mont « Golgotha que se dressera la croix, étendard de notre salut ?
Il n'est donc pas surprenant que l'événement qui nous intéresse aujourd'hui se passe sur la montagne. Les trois apôtres retenus pour la circonstance, sont là et :
Il – Jésus - fut transfiguré devant eux ;
son visage devint brillant comme le soleil,
et ses vêtements, blancs comme la lumière.
Jésus fut « transfiguré » son humanité, disparaît, pourrait-on dire, sous la « métamorphose » de la Transfiguration. C'est toujours Jésus certes, mais c'est un avant-goût invisible ordinairement, de son «  Être-Dieu ». Ce qui se montre aux apôtres bouleversés c'est ce que St Jean décrira par la suite dans le prologue : En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ;
« la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l'ont pas arrêtée. Il y eut un homme envoyé par Dieu. Son nom était Jean. Il était venu comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière, afin que tous croient par lui. Cet homme n'était pas la Lumière, mais il était là pour lui rendre témoignage. Le Verbe était la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde. (Jean 1)

C'est encore ce que nous confessons lorsque nous proclamons notre foi avec le symbole de Nicée-Constantinople le dimanche :

« Il est Dieu, né de Dieu,lumière, née de la lumière,
vrai Dieu, né du vrai Dieu
Engendré non pas créé,
de même nature que le Père ; »

Son visage, ses vêtements, toute Son humanité s'efface pour ne laisser voir que la lumière, donc, la gloire du Ressuscité. Jésus, en cet instant veut, par avance, conforter Ses apôtres qui seront soumis à rude épreuve au moment, pendant et immédiatement après la Passion et cette mort infâme sur la croix . Cette expérience spirituelle sera bien nécessaire au moment de l'épreuve
.N'en est-il pas de même dans nos cheminements ?

Les heures de grâce ne sont-elles pas ce roc sur lequel nous pouvons nous appuyer dans les moments plus difficiles, quand la « ténèbre » domine dans nos vies ? Dieu n'est-Il pas le plus sage des pédagogues ? Ne sait-il pas ce dont nous avons besoin pour continuer notre marche vers les sommets ?

Plus tard, Jésus mettra Pierre en garde : « Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous passer au crible comme le froment. Mais moi, j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point; et toi, quand tu seras revenu, affermis tes frères. » (Luc 22) Tout notre vécu a du sans, hier, éclaire et fortifie aujourd'hui . Parfois nous ne comprenons pas. Restons dans la confiance, c'est Dieu qui nous conduit, une expérience en éclaire une autre, tout, absolument tout est grâce dans notre vie de foi.

Les apôtres ne sont pas au bout de leur étonnement : « Voici que leur
apparurent Moïse et Élie, qui s’entretenaient avec lui. » L'un, Moïse nous enracine dans la loi que Jésus vient parfaire, accomplir, conduire à son aboutissement, l'autre, Élie n'est-il pas prophète , un habitué de la « montagne » de son mystère, de son élévation ? N'incarne-t-il pas tous ceux qui, avec lui, comme lui annoncent ce Messie qui vient faire toutes choses nouvelles ? Les prophètes, représentés ici par Élie, sont rendus présents sur cette montagne du Thabor pour témoigner que ce qu'ils ont annoncé se réalise aujourd'hui et se réalisera par delà la mort physique du Christ Rédempteur ? Ils font aussi, l'unité entre l'Ancienne et la Nouvelle Alliance pour les apôtres qui sont
l’Église naissante et qui auront pour mission de la faire grandir jusqu'aux extrémités de la terre ! Mais, pour l'heure, ce que voient ces privilégiés est tellement grand, tellement beau, tellement confortable que : 


«  Pierre alors prit la parole et dit à Jésus :
« Seigneur, il est bon que nous soyons ici !
Si tu le veux,
je vais dresser ici trois tentes,
une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. »


Il est des expériences spirituelles dont on ne voudrait pas voir la fin. Qui après une retraite spirituelle n'a jamais éprouvé le désir de demeurer dans le lieu béni et chaleureux ou Dieu l'a visité ? Cette tentation est fréquente , mais nous savons, au fond de notre être, que toute grâce est une force qui nous propulse vers les frères. Le don de Dieu n'est jamais pour soi tout seul, ce don est un cadeau pour mieux servir nos frères. Non pas de façon abrupte en racontant fadement l'inexprimable, mais en le distillant à doses homéopathiques parce que ce don s'est diffusé dans notre être et, à notre insu passe dans notre parole, notre comportement, notre vie tout entière. Les cadeaux de Dieu sont voulus pour nous imprégner et pour être partagés ! D'ailleurs « cet état de grâce » ne se prolonge jamais, le Seigneur a vite fait de nous rappeler à la réalité, au concret de la vie :

    Il parlait encore,
lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit de son ombre,
et voici que, de la nuée, une voix disait :
« Celui-ci est mon Fils bien-aimé,
en qui je trouve ma joie :
écoutez-le ! »



Dieu se charge de sortir les apôtres de leur « extase ».Il y a :
  • la nuée,
  • la voix du Père ,
  • Son message d'identification,
  • et cette recommandation : écoutez-Le.Les apôtres sont enveloppés dans le rayonnement de Jésus , ils font cette expérience unique de son irradiation, ils sont pris entièrement dans ce grand mystère du Christ « lumière née de la Lumière » dans son rayonnement qui illumine leur être mais , là encore, c'est un avant-goût, une préparation de ce qui va suivre . Car en réalité eux ne sont pas dans la lumière elle -même, mais dans l'ombre de cette lumière,on ne s'approche pas du feu de Dieu sans se consumer . «  Nul ne peut voir Dieu sans mourir » lit-on dans l'Exode. La Lumière, c'est le Père, le Fils en est l'émanation et les apôtres ne font que voir,( c'est déjà énorme pour fortifier leur foi !) ils restent, pour le moment, à l'extérieur de cette lumière, et quelle n'est pas leur surprise quand, de la lumière jaillit une Parole et quelle Parole ! 
« Celui-ci est mon Fils bien-aimé,
en qui je trouve ma joie :
Les apôtres reçoivent confirmation du balbutiement de Pierre quand Il déclare « tu es le messie de Dieu » Ce Messie est le Fils Bien-aimé qui fait la joie de Dieu. S'Il fait la joie de Dieu, c'est qu'Il est en totale harmonie avec Lui ! On ne fait pas la joie de quelqu'un si on s'affiche différent, si on n'en fait qu'à sa tête... Et le Père donne un ordre, mais un ordre plein de suavité : écoutez-Le . Il leur dit, Il nous dit, écoutez-Le, c'est en L'écoutant que vous trouverez votre bonheur « à qui irions-nous Seigneur, tu as les paroles de vie éternelle » . Écoutez-Le dans tout ce qu'Il est, dans tout ce qu'Il dit, dans ce qu'Il fait . Écoutez Jésus c'est accueillir pleinement Sa Parole dans ce qu'elle a d'exaltant, mais aussi dans ce qu'elle a de purifiant ! Si ta main... Coupe, si ton œil,... arrache ….Oui, en ce temps de carême écouter Jésus c'est aussi cela ! Écoutez Jésus, c'est Le suivre dans tous les aspects de sa vie, les heureux et les difficiles et c'est bien ce qui bouleverse ici les apôtres cette difficulté à emboîter le pas dans ceux de Jésus à tel point que :

  
 Quand ils entendirent cela,
les disciples tombèrent face contre terre
et furent saisis d’une grande crainte.
L'exigence évangélique peut nous faire peur parfois, qui n'a jamais pensé ; « mais où cela va-t-il me mener ? » Et qui n'a jamais senti la main de Jésus l'inviter doucement, en le touchant par ses sacrements, à faire confiance, à relever la tête, à élever son cœur, à reprendre courage pour avancer ?

  
 Jésus s’approcha, les toucha et leur dit :
« Relevez-vous et soyez sans crainte ! »
Jésus nous rassure, Jésus continue de nous rassurer aujourd'hui, de nous affermir et il en sera ainsi tant que nous cheminerons sur cette terre. Jésus nous relève sans cesse quand nous trébuchons, Il est toujours Celui qui nous tend Sa main, qui nous remet en route quand nous fléchissons, Jésus ouvre toujours une route nouvelle, des horizons nouveaux !

  
 Levant les yeux,
ils ne virent plus personne,
sinon lui, Jésus, seul.
L'expérience spirituelle est un moment de grâce, elle doit comme je le disais plus haut, nous permettre d'avancer plus sûrement, plus fermement
Abram s’en alla, comme le Seigneur le lui avait dit, et Loth s’en alla avec lui.
Comme à Abram, comme à Moïse, comme aux apôtres, comme à tout homme, toute femme qui met sa confiance dans ce Dieu Très saint et si proche , Dieu nous dit en ce Carême, « va vers le Pays que je te montrerai, sois dans la confiance, dans l'abandon, ne crains pas, je suis avec toi jusqu'à la fin des temps . »


Dieu veille sur ceux qui le craignent,
qui mettent leur espoir en son amour,
pour les délivrer de la mort,
les garder en vie aux jours de famine.

Nous attendons notre vie du Seigneur :
il est pour nous un appui, un bouclier.
Que ton amour, Seigneur, soit sur nous
comme notre espoir est en toi !

L'Ermite

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire