vendredi 3 septembre 2021

OUVRE-TOI

 

XXIII e DIMANCHE


DU TEMPS ORDINAIRE


Année B




(Mc 7, 31-37)



La liturgie omet la rencontre de Jésus avec la femme syro -phénicienne, cette personne qui se contente « des miettes qui tombent de la table du Maître » et nous conduit en Décapole.

Jésus quitta le territoire de Tyr ; passant par Sidon, il prit la direction de la mer de Galilée et alla en plein territoire de la Décapole.

La Galilée de l'Évangile et ses voisines païennes

Au Nord de la sèche et abrupte Judée, la Galilée, si fertile et de très composite, se trouve en rapport direct avec le monde plus ou moins hellénisé. C'est en Galilée que s'est écoulé la plus grande partie de la vie de Jésus, à Nazareth. A Cana, il accomplit son premier miracle. A Capharnaum, au bord de cette Mer de Galilée qu'est le lac de Génézareth (21 km Y 12 km) traversé par le Jourdain, où convergent tant de ruisseaux intarissables, il séjourne fréquemment et il prêche. Cette grosse bourgade juive, poste frontière, est le siège du riche centurion qui a bâti la synagogue ; c'est le bureau de nombreux publicains . Mais Jésus enseigne aussi aux alentours de ce lac de Ti- bériade (autre nom de cette Mer) , souvent sur l'autre rive, celle des territoires de plusieurs villes de Decapóle.

Cette Galilée, le monde hellénistique menace de l'absorber. D'autre part la secte des Pharisiens voudrait l'isoler entièrement du monde païen : le monde impie des Séleucides, des Hérodes, des Romains. Moins soumise à la domination très sévère du Judaïsme, toute cette tétrarchie et plus encore la riche plaine frontière de Génézareth, à l'Est, étaient ouvertes partiellement aux influences hellénistiques, par plusieurs facteurs. D'abord la politique hellénisante des Hérodes, leurs fondations de villes nouvelles. Ensuite la présence, sur le pourtour extérieur de la Galilée, (et même à l'intérieur de celle-ci : Scythopolis) de vieilles villes libres très hellénisées, à l'Est et au Sud-Est, dans la tétrarchie de Philippe et en Pérée ; comme sur le littoral maritime. Dans les territoires ruraux de ces villes libres, Jésus entrera plus d'une fois pour y trouver un refuge contre Hérode Antipas ou les Pharisiens.

Au bout d'un an de prédication, Jésus, pour échapper à leur menace, doit quitter la Galilée. Il va dans les territoires des villes libres, les ports de Tyr et Sidon, dans les campagnes de Césarée de Philippe sur l'autre rive du lac, sur le territoire libre de Gadara ; enfin en Pérée, à Jéricho, afin de gagner Jérusalem pour les fêtes... et la Passion

Dans le quatrième Évangile, l'itinéraire de Jésus en Galilée est très réduit : car Jean, pour atteindre aux plus grands effets, centralise l'action de Jésus à Jérusalem. Luc cite bien Tyr et Sidon, mais non Césarée de Philippe ; Jean ignore ces noms (de J.COLIN)

Pour résumer : nous retrouvons Jésus en milieu païen.

Des gens lui amènent un sourd qui avait aussi de la difficulté à parler, et supplient Jésus de poser la main sur lui. l’Évangéliste ne dit pas de qui il s'agit mais évidemment, de personnes qui ont entendu parler de Ses miracles puisqu’elles supplient Jésus de poser Sa main sur l'infime.Il ne s'agit pas de compatriotes mais d'étrangers mais , nous l'avons découvert au fil de nos méditations, Jésus ne fait pas de différence entre les hommes, Jésus instaure, ou veut instaurer, peu à peu, une fraternité universelle. Nous trouvons cela clairement exprimé par Pierre dans le Livre des Actes de Apôtres  « Comme la discussion était devenue vive, Pierre intervint pour déclarer: " Vous le savez, frères, c'est par un choix de Dieu que, dès les premiers jours et chez vous, les nations païennes ont entendu de ma bouche la parole de l'Évangile et sont devenues croyantes. Dieu, qui connaît les cœurs, leur a rendu témoignage, quand il leur a donné, comme à nous, l'Esprit Saint. Sans faire la moindre différence entre elles et nous, c'est par la foi qu'il a purifié leurs cœurs ». (Act 15)

Et nous ? Je ne m'attarderai pas sur cette question « des nôtres, pas des nôtres ? » « frères ? Étrangers ?» Par le baptême, nous sommes tous de la même famille et appelés à étendre le Royaume, qu'en est-il dans les faits ?Quelles barrières construisons-nous , quels murs édifions-nous ?

Isaïe , dans la première lecture, n'annonce - t-il pas un Dieu SAUVEUR de TOUS les humains ?

Dites aux gens qui s’affolent :
« Soyez forts, ne craignez pas.

Voici votre Dieu :
c’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu.
Il vient lui-même et va vous sauver. »
    Alors se dessilleront les yeux des aveugles,
et s’ouvriront les oreilles des sourds.
    Alors le boiteux bondira comme un cerf,
et la bouche du muet criera de joie ; 
car l’eau jaillira dans le désert,
des torrents dans le pays aride.
    La terre brûlante se changera en lac,
la région de la soif, en eaux jaillissantes.

Jésus vient accomplir cette bonne Nouvelle et la parfaire, Bénissons-Le ! Et , surtout ECOUTONS -LE !

Jésus l’emmena à l’écart, loin de la foule, lui mit les doigts dans les oreilles, et, avec sa salive, lui toucha la langue. Jamais, jusqu'à cet instant nous n'avons vu Jésus agir de cette manière :

  • Jésus emmène l'infirme à l'écart, loin de la foule : Jésus agit ainsi habituellement quand Il veut s'entretenir seul, avec Son Père, Il gravit souvent une montagne lieu où Il trouvera plus aisément le silence.


    Ici, pour le moment, la communication habituelle est impossible puisque la personne n'entend pas et s'exprime avec difficultés. Il ne peut y avoir de dialogue préalable comme Jésus le fait habituellement.
    - « Crois-tu, toi, au Fils de l’Homme ? - « Et qui est-il, Seigneur, pour que je croie en lui ? » - « Eh bien ! Tu l’a vu, c’est lui qui te parle » Il dit : « Je crois, Seigneur » et il se prosterna devant lui. Jn 9, 35-38

    De plus, cet homme est païen et la demande est effectuée par des païens , à ce stade, tous auraient des difficultés à comprendre les questions de Jésus. Jésus s'adapte au contexte et nous-mêmes sommes nous sensibles au contexte dans lequel nous évoluons ? Sommes-nous attentifs à éviter toute gêne inutile chez nos frères ? Evitons-nous de les mettre en difficulté ?

  • Contrairement à la demande qui lui est adressée d'imposer les mains, Jésus lui met les doigts dans les oreilles et de la salive sur la langue , c'est la toute première fois semble-t-il, que Jésus opère de cette manière. Ces gestes correspondent à une pratique courante des guérisseurs de l'époque de Jésus : le contact physique localisé et la salive, sont source présumée de vie, proche de la parole.Savons-nous nous mettre à la portée de nos frères ? Tenir compte de leurs pratiques, pour éviter de les déstabiliser, de les troubler , de poser des actes ou d'exprimer des paroles qu'ils ne comprendraient pas, c'est aussi cela l'inculturation !

Puis, les yeux levés au ciel, il soupira et lui dit : « Effata ! », c’est-à-dire : « Ouvre-toi ! »     

- Vient la prière

Alors Jésus leva les yeux au ciel et dit : « Père, je te rends grâce parce que tu m'as exaucé. Je savais bien, moi, que tu m'exauces toujours ; (Jn 11)

Puis il leva les yeux au ciel et pria ainsi : « Père, l'heure est venue. Glorifie ton Fils, afin que le Fils te glorifie. (Jn 17)

Jésus prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il les bénit, les rompit et les donna à ses disciples pour qu'ils distribuent à tout le monde. (Lc 9)

Jésus prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction, rompit les pains, et il les donnait aux disciples pour qu'ils les distribuent. Il partagea aussi les deux poissons entre eux tous. (Mc 6)

levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction ; il rompit les pains, il les donna aux disciples, et les disciples les donnèrent à la foule. (Mt 14)

Pourquoi Jésus lève-t-Il les yeux au ciel ? Tout simplement parce que c'est Sa façon

d'entrer en communication intime avec Son Père. Il entre alors dans une communion d'amour absolue avec Dieu Père, Ils sont toujours ensemble comme le dit Jésus « Moi et le Père nous sommes un ». Jn 10, 30 mais il est des moments où Jésus a très certainement encore plus besoin de ressentir cette présence, ce qui explique ce regard vers l'infini. C'est un bref, mais intense moment d'échange qui convie aussi l'Esprit Saint pour accomplir non une œuvre personnelle, mais une œuvre Trinitaire où le Père, le Fils et l'Esprit sont à l’œuvre ! L'Esprit-Saint n'est-Il pas Communion d'amour du Père pour Son Fils et du Fils pour Son Père ?

Et nous, avons-nous ce « réflexe » instantané avant toute action de tourner notre regard vers Celui de qui nous vient tout bien ? Nous ne sommes que des instruments au service de l'Amour ! Comment ferai-je œuvre divine si je pose des actes purement humains ! Que valent nos actes s'ils ne trouvent naissance dans le sein de la Trinité Sainte ? Si Jésus, avant d'agir se tourne vers Son Père, à combien plus forte raison devons-nous appeler la Trinité Sainte à notre aide. Sans le secours du Seigneur, nous semons du vent, rien de plus ! « Notre secours est dans le Nom du Seigneur qui a fait le ciel et la terre ! » Ps 124 Se sentant fort de la Présence du Père et de l'Esprit Saint, Jésus

soupira et lui dit : « Effata ! », c’est-à-dire : « Ouvre-toi ! » C'est  un impératif ! N'aie pas peur, lance-toi, tu n'es pas seul, ouvre-toi ! Cette parole de Jésus s'adresse , en cet instant, à toi ma sœur, mon frère, à moi ! Ouvre-toi à ma grâce, écoute ce que te dit l'Esprit et lance-toi dans la grande aventure de l'amour ! N'est-ce  pas aussi ce qui est dit par le célébrant , au nom de Jésus, à celui qui reçoit le sacrement du Baptême pour l'inviter à proclamer la Gloire de Dieu, à chanter Ses louanges , à bénir Son Nom ?

Ses oreilles s’ouvrirent ; sa langue se délia, et il parlait correctement. Il ne dit pas n'importe quoi , lui, le sourd , le bègue, parle correctement et toi ? Et moi ? Dieu continue de parler à notre cœur est-ce que nous L'entendons ? Pour l'entendre il convient de savoir se mettre à l'écart, de lever les yeux vers le Père, le Fils et l'Esprit Saint, comme nous l'apprend Jésus Lui-même, de faire silence, d'exprimer notre foi et nous entendons alors , si nos oreilles, celles de notre cœur, sont ouvertes en grand, nous entendons la Trinité qui nous révèle le chemin à suivre, la parole à exprimer, l'acte à poser ...Mais savons-nous écouter Dieu qui nous parle ???

Voici ce que disait le Pape Benoît XVI en 2006

« Il n’existe pas seulement la surdité physique, qui isole l’homme en grande partie de la vie sociale. Il existe également un affaiblissement de la capacité auditive à l’égard de Dieu, dont nous souffrons particulièrement à notre époque. Tout simplement, nous n’arrivons plus à l’entendre – trop de fréquences différentes parasitent nos oreilles… Avec l’affaiblissement de la capacité auditive ou même la surdité à l’égard de Dieu, nous perdons également notre capacité de parler avec lui ou de lui. De cette façon, nous perdons une perception décisive. Nos sens intérieurs courent le danger de s’éteindre. Avec la disparition de cette perception, l’étendue de notre rapport avec la réalité en général est également limitée de façon drastique et dangereuse. L’horizon de notre vie se réduit de façon préoccupante. »

Comment en effet entendre la voix de Dieu dans mon cœur, si j'écoute, en boucle, de

la musique qui est le plus souvent un tintamarre plus qu'une musique qui élève l'esprit  ? Si je suis constamment dans l'action, le mouvement, le tapage ? Si je suis une véritable tornade qui bouscule tout sur son passage ? Si, « prier », c'est du temps perdu selon mes critères personnels ? L'action ! Rien que l'action ! Toujours l'action ! Comment puis-je entendre Celui qui parle à mon cœur?

Souvenons-nous de l'expérience du Prophète Élie « Là, il ( le prophète Élie) entra dans la caverne, et il y passa la nuit. Et voici que la parole du Seigneur lui fut adressée, et il lui dit: «Que fais-tu ici, Élie?» Il répondit: «J'ai été plein de zèle pour le Seigneur, le Dieu des armées; car les enfants d'Israël ont abandonné votre alliance, renversé vos autels, et tué par l'épée vos prophètes; je suis resté moi seul, et ils cherchent à m'ôter la vie.» Le Seigneur dit: «Sors, et tiens-toi dans la montagne devant le Seigneur, car voici que le Seigneur va passer.» Et il y eut, devant le Seigneur, un vent fort et violent qui déchirait les montagnes et brisait les rochers: le Seigneur n'était pas dans le vent. Après le vent, il y eut un tremblement de terre: le Seigneur n'était pas dans le tremblement de terre. Et après le tremblement de terre, un feu: le Seigneur n'était pas dans le feu. Et après le feu, un murmure doux et léger. Quand Élie l'entendit, il s'enveloppa le visage de son manteau et, étant sorti, il se tint à l'entrée de la caverne. Et voici qu'une voix se fit entendre à lui, en disant: «Que fais-tu ici, Élie?» (1R 19)

Pour entendre la voix de Dieu au profond de mon cœur je dois me réserver des temps de silence, des lieux de silence, pour Lui ouvrir mon cœur et entendre Sa Parole.

 Alors Jésus leur ordonna de n’en rien dire à personne ; mais plus il leur donnait cet ordre, plus ceux-ci le proclamaient. C'est ce qu'on appelle, dans l’Église, le secret messianique. Jésus ne tient pas à lever trop vite le voile, Jésus tient à prendre le temps de l'évangélisation pour enraciner Son message et permettre à Ses contemporains de se poser les bonnes questions et d'y répondre peu à peu en considérant l’œuvre accomplie.Quant à l'entourage de cette personne délivrée de son handicap , il ne peut cacher son étonnement, son admiration :

Extrêmement frappés, ils disaient : « Il a bien fait toutes choses : il fait entendre les sourds et parler les muets. »


R/ Je veux louer le Seigneur,
tant que je vis.
(Ps 145, 2)

Le Seigneur garde à jamais sa fidélité,
il fait justice aux opprimés ;
aux affamés, il donne le pain ;
le Seigneur délie les enchaînés.

Le Seigneur ouvre les yeux des aveugles,
le Seigneur redresse les accablés,
le Seigneur aime les justes,
le Seigneur protège l’étranger.

Il soutient la veuve et l’orphelin,
il égare les pas du méchant.
D’âge en âge, le Seigneur régnera :
ton Dieu, ô Sion, pour toujours !


L'Ermite

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