vendredi 30 juillet 2021

LA NOURRITURE QUI DEMEURE

 

XVIII e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE


Année B


(Jn 6, 24-35)



Jésus savait qu'ils étaient sur le point de venir le prendre de force et faire de lui leur roi ; alors de nouveau il se retira, tout seul, dans la montagne. (Jn 6) Tel était le dernier verset de l'Evangile dimanche dernier.

Tandis que Jésus se protège et se repose, seul, dans la montagne, « les apôtres montent en barque et se dirigent vers Capharnaüm , le vent soufflait avec force Les disciples avaient ramé pendant cinq mille mètres environ, lorsqu'ils virent Jésus qui marchait sur la mer et se rapprochait de la barque. Alors, ils furent saisis de crainte. Mais il leur dit : « C'est moi. Soyez sans crainte. » Les disciples voulaient le prendre dans la barque, mais aussitôt, la barque atteignit le rivage à l'endroit où ils se rendaient. (Jean 6)

Que Jésus aille à Capharnaüm, cela est doublement significatif pour nous : c’est là qu’il commence Son annonce de la Bonne Nouvelle, et c’est là qu’il choisit Ses premiers disciples. En choisissant d’habiter Capharnaüm, Jésus accomplit ainsi la prophétie d’Isaïe que nous entendons à Noël (1ère lecture Noël) : «Toi, Galilée, carrefour des païens, le peuple qui habitait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ». Jésus accomplit ainsi la volonté du Père qui a parlé par les prophètes. Et nous comprenons que le choix de Jésus est résolument missionnaire. C’est pour cela qu’il est « sorti » : il accepte de renoncer au calme de Nazareth pour s’installer là où on a le plus besoin de lui : non pas d’abord à Jérusalem, la ville sainte où Dieu habite dans son temple, mais dans une contrée ouverte aux influences païennes, où se mélangent races et religions, au milieu des brebis perdues de la maison d’Israël. Admirable incarnation de Dieu au milieu des hommes !

Le pape, dans la joie de l’Évangile, observe que : « Dans la Parole de Dieu apparaît constamment ce dynamisme de la ‘sortie’ que Dieu veut provoquer chez les croyants. ( … ) Sortir de son confort et avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l’Évangile » (n° 20).

Il n'est donc pas surprenant que la foule s'oriente vers Capharnaüm pour retrouver Sa trace et celle de ses disciples .

 

Quand la foule vit que Jésus n’était pas là, ni ses disciples, les gens montèrent dans les barques et se dirigèrent vers Capharnaüm à la recherche de Jésus.     L’ayant trouvé sur l’autre rive, ils lui dirent : « Rabbi, quand es-tu arrivé ici ? » La foule est avide, elle ne peut plus se passer de Jésus , de Sa Parole, de Ses bienfaits , elle reconnaît en Jésus « le Maître » dont elle a besoin (c'est le sens du terme Rabbi) Jésus l' a compris puisqu'Il l'évoque en saint Marc « En débarquant, il vit une foule nombreuse, et il en eut compassion, parce qu'ils étaient comme des brebis sans pasteur, et il se mit à les enseigner longuement. » (Mc 6) juste avant le multiplication des pains et, en Saint Matthieu, avant d'envoyer ses Apôtres en mission « il fut ému de compassion pour eux, parce qu'ils étaient harassés et abattus, comme des brebis qui n'ont pas de pasteur. » (Mt 9) Mais Jésus est loin d'être dupe sur les motivations qui animent les foules , Il est conscient des ambiguités qui les habitent, s'Il S'est isolé, c'est bien pour éviter d'être proclamé Roi et pour essayer de les entraîner sur un autre chemin, Jésus s'empresse de clarifier :

Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : vous me cherchez, non parce quevous avez vu des signes, mais parce que vous avez mangé de ces pains et que vous avez été rassasiés.     Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle, celle que vous donnera le Fils de l’homme, lui que Dieu, le Père, a marqué de son sceau. »

Le problème n'est-il pas là ? Se laisser purifier par l'Amour de Dieu pour laisser entrer en soi la lumière et apprendre à reconnaître, dans une expérience matérielle, le message divin qui est livré ! Les foules voient tous les jours les actes de Jésus, et la multiplication des pains devrait marquer un sommet, mais la plupart, sinon tous, s'arrêtent au bienfait immédiat éprouvé . Ils avaient faim, Jésus l'a compris et sans même être sollicité , parce qu'Il aime vraiment l'humanité, a pris l'initiative de les secourir en prenant soin de louer le Père premier Auteur de tout bien comme l'écrit si bien Saint François d'Assise dans ses « louanges à Dieu » Tu es trois et tu es un, Seigneur Dieu, tu es le bien, tu es tout bien, tu es le souverain bien, Seigneur Dieu vivant et vrai. La foule a vu du pain, du poisson, un point c'est tout ! Elle est rassasiée, satisfaite, Jésus soulage les corps blessés, affamés, que demander de plus ? Que chercher d'autre ? Elle a trouvé quelqu'un qui allège le poids du jour, elle ne veut surtout pas perdre Sa trace d'où ses déplacements répétés pour Le chercher, Le trouver, et Le suivre . Elle n'hésite même pas à l'interroger sur Son emploi du temps « Quand es-tu arrivé ici ? »

Demander des comptes à Jésus ça nous connaît non ?Tirer la sonnette d'alarme devant le Tabernacle nous savons faire, à grand renfort de pourquoi Mon Dieu, comment est-ce possible ? Où es-tu ? ...Mais demander paisiblement, avec patience et persévérance : que veux-Tu me dire par cet événement, cette épreuve? Se demander sa propre part de responsabilité, c'est dérangeant … Prendre du temps pour chercher à comprendre, pour reconnaître « un passage du Seigneur » dans ma vie, serait autrement plus responsable,curatif, engageant , dynamisant


La foule a mangé à satiété, la foule n'a plus faim , que demander de plus sinon que ça se renouvelle ! Jésus n'hésite pas à pointer du doigt ce qu'elle ne perçoit pas :Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle, celle que vous donnera le Fils de l’homme, lui que Dieu, le Père, a marqué de son sceau. »

Jésus ne nous interdit pas, et à la foule non plus, de travailler pour la nourriture quotidienne, «  tu gagneras ton pain à la sueur de ton front » Gen 3,19 «  donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien » Mt 6,9 mais Il incite fortement à faire des choix et à bien choisir nos priorités ! Pour choisir il convient de connaître et de reconnaître : « Quel profit en effet aura l'homme d'avoir gagné le monde entier et perdu son âme? Car que donnera l'homme en échange de son âme? (Mc 8) lisons-nous dans les conditions pour suivre Jésus . Alors quelle est donc la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle ? Avons-nous remarqué la subtilité qui suit ? C'est celle que vous donnera le Fils de l’homme, lui que Dieu, le Père, a marqué de son sceau. Donnera est un verbe au futur et nous savons que ce chapitre 6 de St Jean a pour titre « discours sur le Pain de Vie » et le Pain de Vie n'est-ce pas Jésus Lui-même, qui, avant de se livrer institue la Sainte Eucharistie : « Et, prenant une coupe, il rendit grâces et dit: " Prenez-la et partagez entre vous. Car, je vous le dis, je ne boirai plus désormais du produit de la vigne, jusqu'à ce que le royaume de Dieu soit venu. " Et il prit du pain, et, après avoir rendu grâces, il le rompit et le leur donna, en disant: " Ceci est mon corps, donné pour vous. Faites ceci en mémoire de moi. " Et pareillement (pour) la coupe, après qu'ils eurent soupé, en disant: " Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang, répandu pour vous. (Lc 22) C'est bien Jésus qui donnera et livrera Son Corps pour nourrir la multitude des croyants et cela jusqu'à la fin des temps. Voilà la nourriture qui demeure , voilà la nourriture pour laquelle les foules, les apôtres et chacun de nous sommes invités à travailler ! D'ailleurs les foules semblent bien avoir compris un « petit quelque chose » ce plus, indicible pour le moment , mais un plus qui les conduit à poser une judicieuse question :

 « Que devons-nous faire pour travailler aux œuvres de Dieu ? » Cette foule perçoit que travailler pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle c'est travailler aux œuvres de Dieu, mais comment ? Et elle ose interroger Jésus pour ouvrir des chemins nouveaux, des perspectives nouvelles .

Jésus leur répondit : « L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » La réponse est claire, mais est-elle aussi simple à mettre en pratique ? La foule est dans un clair - obscur incontestable. Elle reconnaît que cet homme Jésus est différent de tous les prophètes , Il pose des actes qui la fait courir pour Le retrouver quand Il leur échappe, Il est capable de nourrir une multitude, de guérir, de consoler, de lire dans les consciences, la Samaritaine le dit sans ambage : "Venez voir un homme qui m'a dit ce que j'ai fait; ne serait-ce point le Christ?" (Jn 4) de ressusciter même : " Jeune homme, je te le dis, lève-toi! " 1Et le mort se dressa sur son séant et se mit à parler; et il le rendit à sa mère. (Lc 7) mais après tout, Il est comme le commun des mortels et cependant il y a un quelque chose qui attire, qui aimante , « un plus » mais quel est ce plus ? Alors un peu comme Abraham « Abraham dit alors : 

« Oserai-je parler encore à mon Seigneur ? Peut-être en trouvera-t-on seulement vingt ? » Il répondit : « Pour vingt, je ne détruirai pas. » (Gen 18) comme Moïse :Moïse implora le Seigneur, son Dieu, et dit: "Pourquoi, Seigneur, votre colère s'embraserait-elle contre votre peuple, que vous avez fait sortir du pays d'Égypte par une grande puissance et par une main forte? Pourquoi les Égyptiens diraient-ils: C'est pour leur malheur qu'il les a fait sortir, c'est pour les faire périr dans les montagnes et pour les anéantir de dessus la terre? Revenez de l'ardeur de votre colère, et repentez-vous du mal que vous voulez faire à votre peuple. Souvenez-vous d'Abraham, d'Isaac et d'Israël, vos serviteurs, auxquels vous avez dit, en jurant par vous-même: Je multiplierai votre postérité comme les étoiles du ciel, et leur ce pays dont j'ai parlé, je le donnerai à vos descendants, et ils le posséderont à jamais." Et le Seigneur se repentit du mal qu'il avait parlé de faire à son peuple. (Ex 32) , cette foule ose encore demander « ce plus » qui devrait , croit-elle, la convaincre :

Ils lui dirent alors : « Quel signe vas-tu accomplir pour que nous puissions le voir, et te croire ? Quelle œuvre vas-tu faire ?     Au désert, nos pères ont mangé la manne ; comme dit l’Écriture : 
Il leur a donné à manger le pain venu du ciel. » 

Ca leur crève les yeux, ils viennent d'expérimenter quasi le même miracle, et ils ne voient pas , des signes, ils en ont à foison, mais ils en demandent d'autres, ce qui fera dire à Jésus «Cette génération mauvaise et adultère réclame un signe, mais en fait de signe, il ne lui sera donné que celui de Jonas. » Alors il les abandonna et partit. (Mt 16) » et nous pensons au prologue «  Il ( le Verbe) était dans le monde, et le monde par lui a été fait, et le monde ne l'a pas connu. Il vint chez lui, et les siens ne l'ont pas reçu. (Jn 1) leurs yeux sont empêches ce que Jérémie en son temps exprimait en ces termes « Ecoutez ceci, peuple insensé et sans coeur; Ils ont des yeux et ne voient point; des oreilles et ils n'entendent point. (Jér 5) .et nous ne sommes pas différents ! La création tout entière chante et crie la gloire de Dieu, Dieu nous visite sans cesse et nous ne savons ni Le voir, ni L'entendre ! Pourtant si nous tenons debout c'est par la grâce de Dieu, Dieu nous est omniprésent , immanent, mais nous crions à qui veut l'entendre : j'ai eu de la chance ! Je suis né(e) sous une bonne étoile ! Je sais trouver les bonnes ficelles moi ! Etc … Nous ramenons tout à notre perspicacité, notre intuition, notre savoir faire, nous ne savons pas et surtout ne voulons pas donner une place à l'inspiration, à cette présence de l'Esprit Saint qui conduit nos vies et les guide, les éclaire à chaque instant !

Laissez-vous renouveler par la transformation spirituelle de votre pensée.     Revêtez-vous de l’homme nouveau, créé, selon Dieu, dans la justice et la sainteté conformes à la vérité.Eph 4 

Pour cela, il convient de choisir de vivre en Lui, par Lui , pour Lui ! Jésus ne se laisse pas vaincre, si c'était le cas, Il ne serait pas ce Dieu-Amour que nous connaissons : Jésus leur répondit : « Amen,amen, je vous le dis : ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain venu du ciel ; c’est mon Père qui vous donne le vrai pain venu du ciel.     Car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde. »    Ils lui dirent alors : « Seigneur, donne-nous toujours de ce pain-là. » Ils sont de bonne volonté, mais ils n'arrivent pas à percevoir , à reconnaître que Celui qui est là, devant eux,est Ce « Je Suis » qui est descendu , c'est vraiment Lui L'envoyé du Père qui, en Son Père donne la Vie au monde ! Nous dirions aujourd'hui « ils ne connectent pas » la connexion est impossible , ils ne parviennent pas à faire le lien ! Alors  Jésus leur répondit : « Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. » Jésus leur explique, et nous explique, que le vrai pain c'est Lui , Il nous invite à dépasser l'apparence pour voir et comprendre l'essentiel pour cela il convient de faire confiance, de croire vraiment, en un mot : d'aimer. Ce que Paul Baudiquey exprime ainsi : aimer c'est toujours aller plus loin... plus loin que les apparences ( Paul Baudiquey) Jésus les conduit, et nous conduit , pas à pas à la plus merveilleuse des révélations où l'apparence du pain cache le plus grand et beau des mystères que nous appelons la transsubstantiation, où, sous l'apparence du Pain, Jésus se donne en nourriture :

« Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. »

Nous ne tarderons pas à constater l'aveuglement des uns et des autres qui n'arrivent pas à dépasser
cette apparence ...C'est là le pain qui est descendu du ciel: il n'en est point comme de vos pères qui ont mangé la manne et qui sont morts; celui qui mange de ce pain vivra éternellement." Jésus dit ces choses, enseignant dans la synagogue à Capharnaüm. Beaucoup de ses disciples l'ayant entendu dirent: "Cette parole est dure, et qui peut l'écouter?" Jésus, sachant en lui-même que ses disciples murmuraient à ce sujet, leur dit: "Cela vous scandalise? Et quand vous verrez le Fils de l'Homme monter où il était auparavant?… C'est l'Esprit qui vivifie; la chair ne sert de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et vie. Mais il y en a parmi vous quelques-uns qui ne croient point." Car Jésus savait, dès le commencement, qui étaient ceux qui ne croyaient point, et qui était celui qui le trahirait. Et il ajouta: "C'est pourquoi je vous ai dit que nul ne peut venir à moi si cela ne lui a été donné par mon Père." Dès ce moment, beaucoup de ses disciples se retirèrent, et ils n'allaient plus avec lui. (Jn 6)

Demandons à Jésus Lui-même de nous guérir de la maladie de l'apparence, pour

soi – même, pour nos frères et sœurs.

Pour soi-même: guéris-moi Jésus du superficiel, de la recherche démesurée de ce qui se voit, de tout ce qui est trompeur, qui veut impressionner, du désir de briller , du lissage, de l'insignifiant....

Pour nos frères et sœurs : donne-moi Jésus de renoncer à tout jamais aux préjugés qui s'arrêtent à ce qui se voit ou que je crois voir : fragilités, pauvreté ou richesse appuyés sur les seuls indices extérieurs, délivre-moi de toute partialité, des oeillères, de toute forme d'aveuglement...

Ô Jésus permets-nous de vivre dans la justice et la vérité , sous Ton regard, pour reconnaître en tout autre un frère potentiel avec qui je dois apprendre à marcher la main dans la main le regard fixé sur Toi, le seul VRAI...


R/ Le Seigneur donne le pain du ciel ! (cf. 77, 24b)

Nous avons entendu et nous savons
ce que nos pères nous ont raconté :
et nous le redirons à l’âge qui vient,
les titres de gloire du Seigneur.

Il commande aux nuées là-haut,
il ouvre les écluses du ciel :
pour les nourrir il fait pleuvoir la manne,
il leur donne le froment du ciel.

Chacun se nourrit du pain des Forts,
il les pourvoit de vivres à satiété.


Tel un berger, il conduit son peuple.
Il le fait entrer dans son domaine sacré.


L'Ermite


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