TROISIEME DIMANCHE DE CARÊME
Année B
( Jn 2, 13-25 )
Pierre Angulaire
En accueillant les lectures de ce dimanche plusieurs pistes me sont apparues il n'était pas possible de les suivre toutes sans aller dans tous les sens, j'ai donc été confrontée à un choix, à la fois difficile et délicat, j'ai tranché à regret. Qui dit choix, dit abandon , renoncement , j'ai donc renoncé pour approfondir une piste précise : celle du Temple.
Et, tout d'abord, quelle est la différence entre un Temple et une Synagogue , les deux termes étant retenus par Jésus :
« Il s’agit de lieux de culte dont la différence est surtout chronologique. Les plus anciens textes bibliques indiquent que les premiers Israélites célébraient un culte surtout sacrificiel dans des anciens sanctuaires qui avaient été repris des Cananéens, comme Silo, Béthel, Gilgal, etc. Ces sanctuaires étaient le plus souvent situés soit au sommet d’une montagne, soit sous un arbre particulièrement majestueux, soit à côté d’une rivière, etc. Tout croyant pouvait y offrir des sacrifices d’animaux et des libations de liquides ,ainsi que d’autres offrandes végétales.
Durant l’exil à Babylone, alors qu’il n’y avait, ni roi, ni temple, on situe généralement la naissance de la synagogue (qui signifie « assemblée » en grec). Il s’agit d’un lieu de culte qui n’est pas sacrificiel mais où la liturgie est essentiellement constituée de lectures de la Parole (la Tora et les prophètes), de chants et de prières. Lors du retour d’exil à partir de 538, alors que le pouvoir était passé aux Perses, on entreprit la difficile construction d’un second temple, ce qui fut fait finalement en 515. C’est ce temple que le roi Hérode le Grand rénova et amplifia beaucoup au point qu’il était considéré comme l’un des merveilles du monde romain. C’est le temple que Jésus a connu. Ce second temple fut détruit par les Romains en 70 de notre ère lors de la première révolte juive et ne fut jamais reconstruit. Pendant l’époque du second temple, la synagogue continua et se répandit partout en Israël. C’est ce lieu de culte qui a survécu dans le judaïsme et qui est encore utilisé aujourd’hui. (Hervé TREMBLAY, OP)
Comme la Pâque juive était proche, Jésus monta à Jérusalem. Jésus monte à Jérusalem. On ne saura pas comment il a célébré concrètement les sept jours que dure la fête. L’évangéliste nous informe seulement d’un événement qui se déroule dans le Temple et qui a dû sérieusement perturber les préparatifs de la solennité. Cependant, tel qu’il est raconté, il ne semble pas avoir suscité de révolution à Jérusalem. En tout cas, il n’a pas provoqué l’intervention de l’armée romaine, ni celle des gardes du grand prêtre, mais seulement une question sur l’autorité de Jésus. De ce point de vue, la signification de l’épisode est très différente de celle donnée par les évangiles synoptiques. (diverses notes)
L’expulsion des marchands du Temple est racontée vers le début de la vie publique de Jésus, alors que
, selon les évangiles synoptiques, elle a eu lieu après l’entrée messianique à Jérusalem et avant la Passion « Et les foules qui allaient devant lui et qui le suivaient, criaient: " Hosanna au fils de David! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur! Hosanna au plus haut des cieux! "Lorsqu'il entra dans Jérusalem, toute la ville fut en émoi; on disait: " Qui est celui-ci? " Et les foules disaient: " C'est le prophète Jésus, de Nazareth en Galilée. "Jésus entra dans le temple et chassa tous ceux qui vendaient et achetaient dans le temple; il renversa les tables des changeurs et les sièges de ceux qui vendaient les colombes; (Mt 21,1-9) (version considérée comme vraisemblablement plus historique). Cet événement est mis en relation avec la première des trois fêtes de Pâque célébrées par Jésus dans l’évangile de Jean, les deux autres étant signalées « Or la Pâque, la fête des Juifs était proche Jésus donc ayant levé les yeux, et voyant qu'une grande foule venait à lui, dit à Philippe: "Où achèterons-nous du pain pour que ces gens aient à manger?" Il disait cela pour l'éprouver, car lui, il savait ce qu'il devait faire. Philippe lui répondit: "Deux cents deniers de pain ne suffiraient pas pour que chacun en reçoive un morceau." Un de ses disciples, André, frère de Simon-Pierre, (Jean 6,4) (multiplication des pains et discours du pain de vie) et Jn 12, 1 Six jours avant la Pâque, Jésus vint à Béthanie, où était Lazare, le mort qu'il avait ressuscité. Là, on lui fit un souper, et Marthe servait. Or, Lazare était de ceux qui se trouvaient à table avec lui. Marie, ayant pris une livre d'un parfum de nard très pur, très précieux, en oignit les pieds de Jésus, et les essuya avec ses cheveux. Et la maison fut remplie de l'odeur du parfum. (onction de Béthanie, dernier repas et Passion)C’est la première fois que Jésus se trouve dans la Ville sainte et dans le Temple. Jusqu’à présent, dans l’évangile, Jérusalem n’a été mentionnée que par rapport à la délégation de prêtres et de lévites envoyée vers Jean le Baptiste pour l’interroger sur son identité. Le témoignage du Baptiste portait alors à reconnaître en Jésus l’" Agneau de Dieu ". Or, celui-ci va expulser tous les animaux prêts pour le sacrifice, provoquant un déplacement de sens : en l’absence d’animaux, il ne reste que Lui, qui va se présenter comme le sanctuaire démoli et reconstruit.
Dans le Temple, il trouva installés les marchands de bœufs, de brebis et de colombes, et les changeurs. Il fit un fouet avec des cordes, et les chassa tous du Temple, ainsi que les brebis et les bœufs ; il jeta par terre la monnaie des changeurs, renversa leurs comptoirs, et dit aux marchands de colombes : « Enlevez cela d’ici. Cessez de faire de la maison de mon Père une maison de commerce. »
Il est intéressant de savoir que le Temple est cité 111 fois dans le Nouveau Testament mais ce qui devrait nous captiver et surtout , en ce Carême, nous permettre de réfléchir et d'avancer, c'est ce qu'en disent Saint Paul dans ses lettres aux Corinthiens et aux Romains, et Saint Pierre dans sa première lettre . Pourquoi ? Il suffit d'aller voir :
Avant cela je me permets une parenthèse : qu'il s'agisse d'un Temple, d'une Synagogue, d'une église, d'un oratoire... nous parlons de lieux mis à part, la plupart réservés au culte, et /ou, à un enseignement religieux .Tous ces lieux ont pour but d'abriter soit des Ecrits sacrés, soit Dieu Lui-même, c'est le cas de L'Eucharistie dans nos églises, basiliques, cathédrales, oratoires. Dans la Foi, les Ecrits sont considérés comme Présence de Dieu Lui-même. Au temps des Hébreux la Tente de la réunion, Tente appelée aussi, de la RENCONTRE, comportait plusieurs espaces dont le plus sacré était connu comme « Saint des Saints » parce qu'il protégeait l'Arche de l'Alliance, Présence de Dieu au milieu de Son Peuple.
Il serait intéressant d'approfondir cette question des lieux consacrés à la « protection de la Présence »
nous ne pouvons que l'effleurer ici, mais suffisamment , pour mieux percevoir la « sainte colère » de Jésus quand Il voit l'usage dévoyé du Temple de Jérusalem. Qu'un lieu consacré à la RENCONTRE avec le Père soit ainsi transformé en un lieu d'affaires, de circulation de la monnaie, d'échanges et de changes, est pour le moins odieux car il se situe à l'opposé absolu de ce pour quoi il a été prévu.Peut-être pourrions-nous nous interroger sur notre manière de nous conduire dans nos églises lieux qui ont fait l'objet d'une consécration spécifique et qui abritent la Présence réelle, donc Jésus Lui-Même ! D'ailleurs, tout les meubles et objets consacrés au culte divin, appellent un grand respect qu'il s'agisse de l'autel qui représente le Christ Lui-même, les objets sacrés, comme la Patène, le Ciboire, le Calice où sont déposés le Corps et le Sang du Christ, les Livres sacrés – missel d'autel et Lectionnaire – le premier parce qu'il sert au culte, le second parce qu'il est le véhicule de la Parole qui a pris chair pour nous rejoindre et nous sauver.
Ses disciples se rappelèrent qu’il est écrit : L’amour de ta maison fera mon tourment. Des Juifs l’interpellèrent : « Quel signe peux-tu nous donner pour agir ainsi ? » Jésus leur répondit :« Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. » Les Juifs lui répliquèrent :« Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce sanctuaire, et toi, en trois jours tu le relèverais ! » Mais lui parlait du sanctuaire de son corps.
Des Juifs, n'oublions pas que Jésus Lui-même est Juif, ont très mal vécu la réaction de Jésus , ils Lui demandent de justifier Son geste et Son propos, comme ils l'ont déjà fait à la Synagogue de Nazareth puis de Capharnaüm où Jésus leur disait : En vérité, je vous le dis, aucun prophète n'est en faveur dans sa patrie. (Lc 4)
Dans l'Evangile de ce jour, la réponse de Jésus est énigmatique pour ceux qui l'écoutent, ils ne pourront comprendre qu'après la Résurrection. Quand Jésus parle du Sanctuaire de Son Corps, Il donne à comprendre, mais c'est difficile, même pour ceux qui ont eu le privilège de participer à la Transfiguration, que le Corps qui le met en relation avec les uns et les autres, est UN SANCTUAIRE parce qu'il abrite la Divinité du Fils caché sous des apparences humaines ! C'est ce qui permet aux auteurs sacrés de faire un rapprochement entre ce Corps divin et nos corps d'hommes et de femmes consacrés à Dieu par le baptême, devenus ainsi des sanctuaires , des Temples où demeure Dieu Lui-même par Sa Grâce, et quand nous le voulons, par Son Eucharistie :
N'oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu'un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira ; car le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c'est vous. (1Co 3) Quelle conscience avons-nous de notre dignité de filles et de fils de Dieu devenus l'habitation de Dieu Lui-même ? Souvenons-nous de cette très belle salutation de Saint François d'Assise à l'adresse de la Vierge Marie :
Salutation à la Vierge Marie
Salut, Marie, Dame sainte, Reine, sainte Mère de Dieu, vous êtes la Vierge devenue Église : choisie par le très saint Père du ciel, consacrée par lui comme un temple avec son Fils bien aimé et l’Esprit Paraclet ; vous en qui fut et demeure toute plénitude de grâce et Celui qui est tout bien.
Salut, Palais de Dieu ! Salut, Tabernacle de Dieu ! Salut, Maison de Dieu ! Salut, Vêtement de Dieu ! Salut, Servante de Dieu ! Salut, Mère de Dieu !
Nous aussi nous sommes devenus cela, par grâce, or quel usage faisons-nous de nos corps ? Quel soin en prenons-nous ? Quel respect leur accordons-nous ? Nos corps et ceux de nos frères et sœurs ? Ne les transformons-nous pas trop souvent en un capharnaüm du type « Temple de Jérusalem » auquel Jésus a voulu rendre son assignation originelle, à savoir : espace consacré à la prière et à la Rencontre avec notre Père ? Avons-nous conscience de ce qui est dit par Saint Paul : Ne le savez-vous pas ? Votre corps est le temple de l'Esprit Saint, qui est en vous et que vous avez reçu de Dieu ; vous ne vous appartenez plus à vous-mêmes, car le Seigneur a payé le prix de votre rachat. Rendez donc gloire à Dieu dans votre corps (1Co 6) ou bien laissons-nous grouiller en notre sein, toutes les passions de la terre alors que Jésus donne Sa vie pour nous sauver ? Ce Carême pourrait, devrait, nous aider à retrouver la grâce de notre baptême et à rendre grâce pour cette merveille : je suis consacré(e), je suis le temple de Dieu, le Palais de Dieu, le Tabernacle de Dieu, la Maison de Dieu, La tente de la Rencontre avec Dieu ! Qu'est-ce que je fais de cette merveille ?
Suis-je cette pierre vivante dont parle Saint Pierre :
Vous aussi, soyez les pierres vivantes qui servent à construire le Temple spirituel, et vous serez le
sacerdoce saint, présentant des offrandes spirituelles que Dieu pourra accepter à cause du Christ Jésus.
On lit en effet dans l'Écriture : Voici que je pose en Sion une pierre angulaire, une pierre choisie et de grande valeur ; celui qui lui donne sa foi ne connaîtra pas la honte.
Ainsi donc, honneur à vous qui avez la foi, mais, pour ceux qui refusent de croire, l'Écriture dit : La pierre éliminée par les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle,
une pierre sur laquelle on bute, un rocher qui fait tomber. Ces gens-là butent en refusant d'obéir à la Parole, et c'est bien ce qui devait leur arriver.
Mais vous, vous êtes la race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, le peuple qui appartient à Dieu ; vous êtes donc chargés d'annoncer les merveilles de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière. (1P 2)
Sommes-nous ces « pierres vivantes » qui selon le don ou les dons reçus du Seigneur participent à construire le Temple spirituel en donnant de tout notre cœur et de notre être notre foi, notre adhésion à Jésus la Pierre angulaire , le sanctuaire détruit par les hommes mais relevé par Dieu le troisième jour ? Prenons-nous les moyens comme nous y invite Saint Paul :
Ne formez pas d'attelage boiteux avec des non-croyants : quel point commun peut-il y avoir entre la fidélité à Dieu et l'impiété ? quelle communion pour la lumière avec les ténèbres ? quel accord du Christ avec Satan ? ou quel partage pour un croyant avec un non-croyant ? quelle entente pour le temple de Dieu avec les idoles ? Car nous sommes, nous, le temple du Dieu vivant, comme Dieu l'a dit lui-même : Je demeurerai et je marcherai avec eux, je serai leur Dieu et ils seront mon peuple. Sortez donc du milieu de ces gens-là et séparez-vous, dit le Seigneur ; ne touchez à rien d'impur, et moi je vous accueillerai. Je serai pour vous un père, et vous serez pour moi des fils et des filles, dit le Seigneur tout-puissant. (2Co 6)
Il ne s'agit pas de rejeter les mal-croyants et / ou les incroyants, il s'agit de ne pas nous laisser entraîner vers ce qui est bas et conduit à la perdition , mais au contraire de lever la tête et de garder notre regard fixé sur Jésus qui donne tout pour nous et jusqu'à sa propre vie ! Cela en écoutant encore Saint Paul dans sa lettre aux Romains :
C'est ce qui paraîtra au jour où, selon mon Evangile, Dieu jugera par Jésus-Christ les actions secrètes des hommes. Toi qui portes le nom de Juif, ( ou de chrétien) qui te reposes sur la Loi, ( sur l'Evangile) qui te glorifies en Dieu, qui connais sa volonté, qui sais discerner ce qu'il y a de meilleur, instruit que tu es par la Loi (par l'Evangile) ; toi qui te flattes d'être le guide des aveugles, la lumière de ceux qui sont dans les ténèbres, le docteur des ignorants, le maître des enfants, ayant dans la Loi ( l'Evangile) la règle de la science et de la vérité: - toi donc qui enseignes les autres, tu ne t'enseignes pas toi-même! Toi qui prêches de ne pas dérober, tu dérobes! Toi qui défends de commettre l'adultère, tu commets l'adultère! Toi qui as les idoles en abomination, tu profanes le temple ( celui de ton propre corps) ! Toi qui te fais une gloire d'avoir une loi, tu déshonores Dieu en la transgressant! Car " le nom de Dieu est blasphémé à cause de vous parmi les nations ", comme dit l'Ecriture. (Rom 2)
Aussi, quand il se réveilla d’entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela ; ils crurent à l’Écriture et à la parole que Jésus avait dite. Pendant qu’il était à Jérusalem pour la fête de la Pâque, beaucoup crurent en son nom, à la vue des signes qu’il accomplissait. Jésus, lui, ne se fiait pas à eux, parce qu’il les connaissait tous et n’avait besoin d’aucun témoignage sur l’homme ; lui-même, en effet, connaissait ce qu’il y a dans l’homme.
Dans l'homme en effet, dans chacun de nous, il y a le meilleur et le pire, soyons, devenons ces veilleurs, qui n'ont pas peur de faire le tri durant ce Carême pour ne garder et cultiver que le meilleur. Peut-être pourrions-nous décider de ne pas attendre le prochain Carême pour renouveler ce voyage à l'intérieur de nous même. L'Eglise , en revivant les Mystères de la vie de Jésus, nous offre régulièrement des temps forts, devenons avides de ces périodes pour éliminer les mauvaises graines et faire fructifier seulement et surtout la bonne semence qui donnera cent pour un ! Il y va de notre paix intérieure, de notre joie quotidienne, de notre vie éternelle !
La
loi du Seigneur est parfaite,
qui redonne vie ;
la
charte du Seigneur est sûre,
qui rend sages les simples.
Les
préceptes du Seigneur sont droits,
ils réjouissent le cœur ;
le
commandement du Seigneur est limpide,
il clarifie le regard.
La
crainte qu’il inspire est pure,
elle est là pour toujours ;
les
décisions du Seigneur sont justes
et vraiment équitables :
plus
désirables que l’or,
qu’une masse d’or fin,
plus
savoureuses que le miel
qui coule des rayons.
L'ermite
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