CINQUIEME DIMANCHE DE CARÊME
Année B
(Jn 12, 20-33)
Avant d'entrer dans la méditation de l’Évangile de ce dimanche regardons ce qui précède.
Au Chapitre 10, Jésus parlant du BON PASTEUR nous dit :
Je suis le bon pasteur. Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis. (Jn 10)
Suit la Fête de la Dédicace où Jésus est pris à partie par des hommes de son peuple qui, n'obtenant pas ce qu'ils cherchent, nourrissent une sourde colère qui les conduit à vouloir se saisir de Lui :
Là-dessus, ils cherchèrent de nouveau à se saisir de lui, mais il s'échappa de leurs mains. (Jn 10)
Au Chapitre 11, le ton change ; après la résurrection de Lazare certains des opposants sont troublés
« Beaucoup d'entre les Juifs qui étaient venus près de Marie et de Marthe, et qui avaient vu ce qu'avait fait Jésus, crurent en lui. (Jn 11)
Mais certains, nourrissant toujours la même colère, vont trouver les pharisiens :
L'un d'eux, Caïphe, qui était grand prêtre cette année-là, leur dit: "Vous n'y entendez rien; vous ne réfléchissez pas qu'il est de votre intérêt qu'un seul homme meure pour le peuple, et que toute la nation ne périsse pas." Il ne dit pas cela de lui-même; mais étant grand prêtre cette année-là, il prophétisa que Jésus devait mourir pour la nation; Et non seulement pour la nation, mais aussi afin de réunir en un seul corps les enfants de Dieu qui sont dispersés. Depuis ce jour, ils délibérèrent sur les moyens de le faire mourir. C'est pourquoi Jésus ne se montrait plus en public parmi les Juifs; mais il se retira dans la contrée voisine du désert, dans une ville nommée Ephrem, et il y séjourna avec ses disciples. (Jn 11)
Or le temps de la Pâque approchait , les esprits s'échauffaient et les tensions grandissaient :
« Cependant la Pâque des Juifs était proche, et beaucoup montèrent à Jérusalem, avant la Pâque, pour se purifier. Ils cherchaient Jésus et ils se disaient les uns aux autres, se tenant dans le temple: "Que vous en semble? Pensez-vous qu'il ne viendra pas à la fête?" Or, les Pontifes et les Pharisiens avaient donné l'ordre que, si quelqu'un savait où il était, il le déclarât, afin qu'ils le fissent prendre. (Jn 11)
Suit l'onction à Béthanie chez Lazare , Marthe et Marie et la surprenante entrée de
Jésus à Jérusalem, que la foule rend triomphante,« Ayant appris que Jésus se rendait à Jérusalem, ils prirent des rameaux de palmiers, et allèrent au-devant de lui, en criant: "Hosanna! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le Roi d'Israël !" (Jn 12)
Ce que les Pharisiens sont loin d'apprécier :
Les Pharisiens se dirent donc entre eux: "Vous voyez bien que vous ne gagnez rien: voilà que tout le monde court après lui." (Jn 12)
C'est dans ce contexte que Jésus et Ses apôtres avancent pour célébrer la Pâque dans la chambre Haute, empruntée, puiqu'ils n'ont rien en propre ! Mais dans un climat tout différent, dans un esprit de service et de don de soi. Mais nous n'en sommes pas là :
Il y avait quelques Grecs parmi ceux qui étaient montés à Jérusalem pour adorer Dieu pendant la fête de la Pâque. Ils abordèrent Philippe, qui était de Bethsaïde en Galilée, et lui firent cette demande : « Nous voudrions voir Jésus. » Philippe va le dire à André, et tous deux vont le dire à Jésus.
Ces hommes , pèlerins parmi tant d'autres, semblent sincères, ils s'adressent à des disciples de la même origine qu'eux , ils espèrent ainsi que leur démarche aboutira plus facilement. Ils sont montés à Jérusalem pour « adorer Dieu » pendant la fête de Pâque et demandent à voir Jésus sans se douter qu'Il est Dieu Lui-même, et qu'en Le rencontrant , ils s'approcheront de Dieu. Les disciples , honnêtement, transmettent cette attente à Jésus Lui-même . Au lieu de tenter un déplacement, Jésus qui sait , Lui, que Son Heure approche, va tenter de faire prendre conscience de la gravité du moment. Peut-être pas d'ailleurs pour cet instant, mais afin qu'après l'événement pascal , la foi des disciples soit fortifiée en se souvenant de Ses paroles .
Alors Jésus leur déclare :« L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié
Il ne s'agit pas de nos glorioles, nous l'avons déjà évoqué, mais de cette GLOIRE -
Toutefois, alors que notre Maître et Seigneur meurt sur la croix un officier romain n'hésite pas à s'écrier : « Vraiment, cet homme était le Fils de Dieu ! » (Mc 15) C'est par Son abaissement, Sa capacité à s'offrir jusqu'à l'extrême, que Jésus glorifie le Père, Le rend Présent et agissant au cœur de l'humanité !
Marie Elle-même glorifie le Père parce qu'Elle accepte de porter en son sein le Verbe de Dieu et Elle Le chante dans le Magnificat que nous reprenons chaque jour à l'office de Vêpres !" Mon âme glorifie le Seigneur, et mon esprit tressaille de joie en Dieu, mon Sauveur, » (Lc, 1) Marie a compris , sait , dit et chante l'œuvre de Dieu en son sein ! C'est l'œuvre de l'Esprit de Dieu et non la sienne, Elle en est la Servante : « Voici la Servante du Seigneur » répond-Elle à l'Ange venu de la part du Père.
Lazare donne à Jésus l'occasion de manifester Sa divinité mais de façon tellement subtile qu'il faut une foi à tout épreuve pour discerner ce que révèlent les mots :« Cette maladie ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié. » (Jn 11)
Mais pour manifester cette Gloire , le Fils (le grain de blé) doit aller jusqu'à l'extrême de l’Amour (le grain doit mourir ) Et c'est Jésus lui-même qui le dit » Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » (Jn 15)
Jésus nous montre, en effet, le chemin :
Amen, amen, je vous le dis : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit.
Ici, le grain de blé n'est autre que Jésus Lui-même. Ce qui est vrai et vérifiable dans et pour la nature, l'est encore bien davantage pour Jésus. Le grain mis en terre après
Qui aime sa vie la perd ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle. Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive ; et là où moi je suis, là aussi sera mon serviteur. Si quelqu’un me sert, mon Père l’honorera.
Jésus nous invite , nous appelle à donner notre vie , au jour le jour, selon notre vocation personnelle , pour répandre la Vie autour de nous. Donner sa vie c'est consentir à mourir à nos égoïsmes, à nos recherches d'intérêts, pour permettre à ceux qui nous entourent, ceux avec qui nous effectuons un petit bout de chemin de trouver la Vie et de la communiquer à leur tour. Donner sa vie, c'est regarder Jésus et apprendre, en Le regardant, à renoncer, pour devenir semence de Vie éternelle !
Parlant du grain qui meurt pour donner la vie, Jésus est entraîné plus loin Il éprouve, dès cet instant, les affres de la Passion, et le partage simplement avec ceux qui font route avec Lui, mais qui restent dépassés par Son propos ! Comment pourraient ils imaginer d'ailleurs ce qui va suivre et comprendre le sens de ce qu'ils entendent ?
Maintenant mon âme est bouleversée. Que vais-je dire ? “Père, sauve-moi de cette heure” ? – Mais non ! C’est pour cela que je suis parvenu à cette heure-ci ! Père,
glorifie ton nom ! » Alors, du ciel vint une voix qui disait :« Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore. » C'est dans Sa chair d'homme que Jésus entre dans la Passion, en tant qu'homme Il pressent tout ce que cela va entraîner d'humaine souffrance morale et physique, mais Il est en même temps conscient que c'est l'unique manière de révéler et Son ETRE-DIEU et l'Amour infini du Père, pour cette humanité dévoyée. Aussi, tout en redoutant, Il reconnaît être venu pour cela et ne revient pas en arrière et supplie le Père de glorifier Son Nom.Il m'est difficile d'exprimer exactement ce que je ressens, je m'y essaie toutefois. En disant « glorifie Ton Nom » Jésus ne demande pas pour Lui, Jésus, Il ne réclame pas d'être reconnu, mais Il demande la révélation de cette présence divine en Lui. En donnant la force d'aller jusqu'à l'extrême de l'Amour à Jésus, Le Père se glorifie Lui-même ,Il glorifie « QUI IL EST » : Dieu, en Jésus, et glorifie également l'Esprit Saint . Dieu, en effet, Père et Fils et Esprit Saint, est tout entier présent en Jésus à l'Heure de la Passion que Jésus seul, Verbe incarné souffre dans Sa chair !
Mais quel est le NOM DE DIEU ? Nous disons « Dieu » parce que nous avons une perception très partielle de QUI IL EST , notre vocabulaire est limité parce que nous sommes limités. Dieu est « CELUI - QUI - EST », Il est le « TOUT AUTRE », et le « TOUT-PROCHE », l'INDICIBLE, l'infiniment grand bien qu'infiniment petit ! Je vous partage la très belle prière de Grégoire de Nazianze que nous disons à l'office des heures en temps Ordinaire . C'est une très belle approche de L'INNOMMABLE que nous appelons Dieu, et dont le terme qui l'exprime sans doute le mieux est AMOUR comme l'écrit l'Evangéliste Saint Jean, cet AMOUR manifesté en Christ ! « Celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu, car Dieu est amour. » (1Jn 4)
Voici la Prière de Saint Grégoire de Nazianze (329-390) à Dieu le Père :
« Ô Toi l'au-delà de tout, comment T'appeler d'un autre nom ? »
La réponse du Père que la foule entend et qui la dépasse, manifeste cette omniprésence de Dieu Trine tout au long du parcours terrestre de Jésus . Que de fois en effet avons-nous entendu Jésus nous dire, « Je ne fais rien de Moi-même , c'est le Père qui est en Moi ... » Le Père et Moi nous sommes un » « le Père aime le Fils, et lui montre tout ce qu'Il fait. » Que de fois L'avons-nous vu se retirer dans le silence, à l’Écoute du Père pour se conformer toujours au plus près, à Sa volonté Sainte . Et c'est cela qu'Il nous demande aussi, à chacun selon notre appel, notre degré d'adhésion .
En l’entendant, la foule qui se tenait là disait que c’était un coup de tonnerre. D’autres disaient :« C’est un ange qui lui a parlé. » Mais Jésus leur répondit :« Ce n’est pas pour moi qu’il y a eu cette voix, mais pour vous. Au fond Jésus n'a pas besoin d'être conforté, c'est la foule qui en a besoin. Cette foule qui demain ne comprendra plus rien et qui en partie s'associera aux vociférations de ceux qui accablent Jésus jusqu'à ce qu'elle se réveille et prenne conscience d'avoir participé par son péché, sa veulerie, participé à cette injuste et ignoble condamnation !
Et la façon la plus sûre de lui résister n'est-elle pas de garder notre regard fixé, rivé sur Jésus qui nous dit en cette heure solennelle : et moi, quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. » Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir. Ce que le verset d'introduction à la célébration de Laudes durant le Carême traduit ainsi :
Les yeux fixés sur Jésus Christ, entrons dans le combat de Dieu.
Nous approchons de la Grande Semaine que nous allons vivre au plus près de Jésus livré, offert pour notre salut : essayons de la vivre dans le silence et le recueillement afin de chanter à pleins poumons l’alléluia pascal !
Bois
tout en feu, buisson ardent
où rien n’est cendres,
Croix
où le Fils se laisse pendre
quand vient le temps,
Dieu
parle en toi, et tu portes le prix
de la rançon ;
De
son Amour tu nous donnes la mesure,
montrant le corps et la
blessure
où il nous dit
quel est son nom !
R/
Quand il viendra juger le monde,
que le Seigneur nous soit
pitié !
Bois où l’Enfer est englouti
dans
sa victoire,
Croix qui redresses plein de gloire
le Fils
maudit,
Arbre de vie qui détruis le poison
du fruit
mauvais ;
Ton Sang divin fait mûrir sur le calvaire
le
Fruit voulu par notre Père,
que nous cueillons
pour notre
Paix.
Bois où chacun peut regarder
dans sa
détresse
Le Fils que Dieu, plein de tendresse,
nous a
livré ;
Pour le pardon tu attires vers toi
tout
l’univers ;
De tout péché tu guéris et tu
délivres,
Rameau vivant qui fais revivre
celui qui voit
le
cœur ouvert.
Bois merveilleux orné du sang
qui nous
protège,
Croix où l’Agneau a pris au piège
le lion
méchant,
Tu t’es levé comme un signe de paix
pour les
pécheurs ;
Au sein des eaux tu détruis notre
esclavage
En nous ouvrant le seul passage
vers les secrets
du
Dieu Sauveur.
Bois où se meurt le Premier-né
dans les
épines,
Croix où le prêtre est fait victime
pour nos
péchés,
Tu es la pierre où repose le front
du
Bien-Aimé :
Sur ton autel s’accomplit le
sacerdoce
Quand retentit le chant des noces
où les nations
lui
sont données.
Bois où la Femme est rachetée
des fautes
d’Ève,
Croix où Marie se livre au glaive,
le cœur
broyé,
Tes bras voleurs lui arrachent l’enfant
né de
son corps ;
Et, Vierge Mère, elle enfante à la vraie
vie
Les fils que Dieu, dans sa folie,
sauve en
souffrant
jusqu’à la mort.
D. Rimaud — CNPL
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